(Ma'âlim-ul-Madrasatayn)
Les Repères des deux Ecoles
Celle des califes
et
Celle
d'Ahl-ul-Bayt (a.s)
Sayyid Murtadâ
Al-'Askarî
Publication de la
Cité du Savoir
Editeur:
Abbas
Ahmad al-Bostani
(La Cité
du Savoir)
C. P. 712 Succ.
(B)
Montréal,
Qc., H3B 3K3
Canada
E-Mail: abbas
@bostani.com
Site wb:
www.bostani.com
Première
édition: Novembre 2002
Titre original
(arabe): Ma'âlim-ul-Madrasatayn
Auteur:
'Allâmah Sayyid Murtadâ Al-'Askarî
Traducteur:
Sayyid Abû 'Ali Hâshimî
© Tout droits de reproduction et d'adaptation
réservés à:
Abbas Ahmad al-Bostani
ISBN: 2-922223-16-7
Avis
au lecteur : abréviations et termes utilisés dans ce livre :
V = Verset du Coran
Vs = Versets.
Muhammad = le prénom du Prophète
de l'Islam.
Mohamed = prénom de musulman.
Compagnon = Compagnon du Prophète de
l'Islam, en particulier
compagnon = celui qui
tient compagnie
prophète = tout
prophète autre que Muhammad (SAW).
Prophète = Muhammad (SAW).
(SAW) = Sallâllahu 'Alayhi wa
'âlihi wa Sallam
(a. s.) = 'Alayhis-Salâm
(r. d.) = radiyallâhu
'anhû ('anhâ)
imam = celui qui
guide la prière ou calife
Imam = l'un des douze Imams d'Ahlul-Bayt (a.s)
Ahlul-Bayt = La famille du Prophète
('Ali, Fâtimah, Hassan, Hussayn, et neuf des descendants de Hussayn (a.
s.).
Makkah = La Mecque.
***********************
**************************
Table
des Matières
Avis
au lecteur 5
1ère
partie 7
- I -
Préliminaires (9)
Introduction
9
- II -
De l'Impact de la Discorde au Sein
de la Communauté Musulmane (13)
Lors
du premier voyage 13
Lors
du deuxième voyage 14
- III -
Certains Attributs d'Allah - Exaté soit-IL - et l'Origine de la
Divergence les Concernants (21)
L'opposition
quant à l'interprétation des hadiths précédents 23
L'origine
du désaccord relatif aux attributs divins et à la
visibilité d'Allah 24
- IV -
L'Origine du Désaccord Relatif
aux Qualités Spécifiques des Prophètes (27)
1- La
considération des reliques bénies des prophètes 27
L'effet
bénéfique de la salive du Prophète 28
La
recherche de la bénédiction dans l'eau ayant servi aux ablutions
du Prophète 28
La
recherche de la bénédiction dans les cheveux du Prophète 29
La
recherche de la bénédiction dans l'endroit touché par la
main du Prophète 30
2- La
demande de l'intercession au Messager d'Allah 31
Premièrement:
chercher accès auprès d'Allah par l'intermédiaire du
Prophète (SAW) avant sa création (physique) 31
Deuxièmement:
Durant sa vie 32
Troisièmement:
Après sa mort 33
Nous
abordons à présent l'origine de ces divergences et de la
négation des traits distinctifs du Messager 33
- V -
Les Divergences Relatives à la Commémoration :
des Prophètes (a. s) et des Saints Serviteurs d'Allah (40)
1-
Maqâmu - 'Ibrâhîm (la station d'Abraham) 40
2-
Al-Çafâ et Al-Marwah 41
3- La
lapidation 41
4
Le Sacrifice 42
5- La
bénédiction s'étend d'Adam 43
- VI -
La Divergence relative à la Construction des Tombeaux et des
Mausolées élevés
sur les Tombes des Prophètes (a. s.) et à la
Validité de la Prière faite en ces Lieux (44)
1- La
défectuosité de ce récit 44
La
défectuosité de ce récit 46
Arguments
en faveur de la prise des Mausolées des prophètes pour des lieux
de prière 47
-VII -
L'Origine de la Divergence relative aux Pleurs versés sur le Mort (50)
Le
Messager (SAW) pleure son fils Ibrâhîm 50
Le
Prophète (SAW) pleurait sur la tombe de sa mère jusqu'à
faire pleurer ceux qui étaient avec lui. .
. 51
Le
Prophète (SAW) désigne les jours de deuil à la mort de
quelqu'un 51
L'origine
de la divergence relative à cette question 52
- VIII -
Versets Coraniques dont l'Interprétation est l'Objet de
Divergence (54)
A-
L'invocation de quelqu'un d'autre qu'Allah 54
B- Le jugement
de quelqu'un d'autre qu'Allah 55
Réplique
des antagonistes: 55
La
Royauté appartient à Allah 56
Le
Créateur, Celui Qui ressuscite les morts 57
L'Intercesseur,
Le Maître 57
L'invocation
du Messager (SAW) par Laquelle on cherche accès auprès d'Allah 58
L'ORGUEIL
ÉTERNEL DES ÊTRES HUMAINS 59
1- Le premier
mobile à l'origine des divergences susmentionnées 59
a)- Au
début de la Création 59
b)-
Dans les communautés anciennes: 60
c)- A
l'époque du Sceau des prophètes 61
d) A notre époque 62
2- Le
deuxième mobile à l'origine des divergences 62
II ème
Partie :
Les Sources de la
Shari'ah islamique
selon les Recherches respectives des Deux Ecoles (65)
Préliminaires
67
SUJETS
DE DIVERGENCE 67
La
langue arabe - la terminologie islamique 68
A
La langue des Arabes 68
B
La terminologie Shar'î ou islamique 69
C- La
terminologie musulmane usuelle 69
D- Le
sens propre et le sens figuré : 71
2- La
compilation des recueils de langue arabe 72
Le Premier
Champ de Recherche :
Les approches
respectives des deux Ecoles (73)
A- La
définition du ''Compagnon'' dans les deux Ecoles. 74
1)-
Dans l'Ecole des califes 74
2)- La
définition du "Compagnon" dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt 75
3)-
Leur critère quant à la détermination du
"Compagnon" 75
Critique:
76
B-
L'équité des Compagnons dans les deux Ecoles 77
1)-
Selon l'Ecole des califes, tous: 77
2)-
L'opposition de l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.) au sujet de l'équité
des Compagnons. 79
3)-
Critère pour la distinction du croyant de l'hypocrite 81
2e Champ de Recherche:
Les Approches respectives de la Question de l'Imamat, par les deux
Ecoles (85)
Chapitre
1
L'Avènement
du califat musulman La Réalité historique 86
L'ordre
d'écrire le testament du Messager d'Allah 87
L'attitude
du calife 'Umar face à la mort du Prophète 88
La
"Saqîfah" et le serment d'allégeance
prêté à Abû Bakr 89
L'annonciateur
95
L'allégeance
générale 96
Après
l'allégeance générale 97
L'inhumation
du Messager d'Allah (SAW) - ceux qui y étaient présents 97
Après
l'inhumation du Messager 98
Le
retranchement dans la maison de Fatima (a. s) 99
La
désignation de 'Umar au califat son investiture 105
La
délibération et l'investiture de 'Uthmân 106
L'Imam
'Ali (a. s.) savait que le califat fut volontairement écarté de
lui 110
L'allégeance
prêtée serment à l'Imam 'Ali (a. s.) 114
Chapitre
2
De
l'Imamat: Recherches dans l'Ecole des califes 116
La
terminologie de cette recherche 116
1)- Ash-Shûrâ
(la délibération) 116
2)- Al-Bay'ah
116
3) et
4)- Le calife et le prince des croyants 118
5)- L'Imam 119
6)- Al-'Amr - 'Ulûl-'Amr
120
7)- Al-Waçiyyu
- le Waçî du Prophète (le légataire). 121
Le
Califat et l'Imamat. Le point de vue de l'Ecole des califes 121
1)-
L'argumentation de l'Ecole des califes 121
2)-
Critique de ces deux arguments: 122
Le
point de vue de l'Ecole des califes au sujet du califat - récapitulatif 124
1)- La
Shûrâ comme argument 124
2)-
L'argument de la bay'ah (l'allégeance) 128
3)- Le
troisième argument: Les actes des Compagnons 134
4)-
L'établissement du califat par la force et la coercition Discussion
de cet argument. 140
5)-
L'obligation d'obéir à l'imam (au calife) quand bien même
il désobéit au Messager 141
Chapitre
3
De l'Imamat :Recherches dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a.
s.) 145
L'infaillibilité
d'Ahlul-Bayt (a. s.) 146
L'importance
que donnait le Messager (SAW) à la désignation de ses
légataires 148
Les
traditions prophétiques relatives à la désignation; De son
dépositaire (le détenteur de l'autorité après lui) 152
Le
dépositaire du Messager (SAW): Son ministre, son héritier et son
successeur. Al-Waçîy (le
dépositaire) dans les hadiths du Messager 152
Le
testament dans les livres des nations antérieures 154
Le
testament dans les récits des Compagnons et des Tâbi'îne 155
1)-
Dans le sermon d'Abî Dhar 155
2)-
Dans des propos d'al-Ashtar 155
3)- Le
récit de 'Amru b. al-Hamiq al-Khuzâ'î 155
4)-
Dans une lettre de Mohamed b. Abî Bakr 156
5)-
Dans une lettre de 'Amru b. al-'Açi 156
6)-
Dans les propos de l'Imam 'Ali (a. s.) et dans son argumentation 156
7)-
Dans le sermon d'Al-Hassan (a. s.) 157
8)- Dans
les condoléances de la Shi'ah présentées à l'Imam
Al-Hussayn (a. s.) après la mort de son frère l'Imam Al-Hassan
(a. s.) 157
9)-
Dans le sermon de l'Imam Al-Hussayn (a. s.) 158
10)-
Dans les propos de 'Abdullah b. 'Ali, l'oncle du 1er calife 'Abbasside
As-Saffâh (le sanguinaire) 159
11)-
Dans les propos de Mohamed b. 'Abdillah b. al- Hassan lors de son argumentation
à l'encontre du calife 'Abbasside, Al-Mançur. 159
Waçîyyun-Nabîy:
(le dépositaire du Prophète) (SAW) 160
L'Ecole
des califes fournit de grands efforts en Vue de masquer les récits
relatifs au testament et d'interpréter ceux qui s'étaient
répandus 166
Comparaison des hadîths rapportés par la mère des Croyants
'Aïsha 170
L'occultation
des mérites de l'Imam 'Ali (a. s.) 172
La
prohibition d'écrire le hadîth du Messager 184
La
politique du califat quraishite et des Banî Umayyah 185
1)-
À l'époque de Mu'âwiyah 185
a)-
L'enseignement de la haine et de la malédiction de 'Ali (a. s.) aux
habitants de la grande Syrie fut systématique depuis l'époque de
Mu'âwiyah 186
b)-
Les raisons de la rancune que nourrissait Mu'âwiyah à
l'égard de Banî Hâchim 187
c)- La
politique d'Ibnuz-Zubayr 187
d)-
Après Ibnuz-Zubayr 188
2) A l'époque de 'Abdul-Malik et de son fils
Al- Walîd 188
-
Exemples de ce que fit Al-Hajjâj dans la mise en application de la
politique quraïshite. 189
-
Comme Al-Hajjâj, son frère Mohamed b. Yûssuf allait dans le
même sillage pendant qu'il était gouverneur du Yaman 190
3)- A
l'époque de 'Umar b. Abdil-'Azîz 191
Les
Umayyades tuaient les hommes nommés 'Ali 193
4)- A
l'époque des Abbassides 193
a)-
Des actes des savants 194
b)-
Les actes des dirigeants 195
c)-
Des actes du reste de la population 195
Dix
sortes d'occultation et de falsification de la Sunnah du Messager (SAW) et des
récits relatifs à la sîrah d'Ahlul-Bayt et des Compagnons 197
|1|-
La suppression d'une partie du hadith prophétique; Et son remplacement
par un mot vague 197
|2|-
La suppression de la totalité du récit relatif à la sîrah
des Compagnons, avec, toutefois, une allusion à cette suppression 200
|3|-
L'interprétation du sens du hadith prophétique 201
|4|-
La suppression d'une partie du propos d'un Compagnon sans y faire allusion 203
|5|-
La suppression de l'intégralité du hadîth
prophétique sans y faire allusion 204
-Ibn
Kathîr fit de même dans son livre . 206
|6|-
L'interdiction d'écrire la sunnah du Messager 206
|7|-
La dépréciation des récits, des narrateurs de la sunnah du
Messager (SAW) et des livres qui critiquent l'Autorité en place et -
parfois - le meurtre des opposants 208
|8|-
La mise à feu des livres et des bibliothèques.
. . . . 208
|9|-
La suppression d'une partie du récit relatif à la sîrah des
Compagnons et sa falsification 210
|10|-
La fabrication des récits inventés pour remplacer les
hadîths authentiques 211
Les
autres textes prophétiques se rapportant au droit d'Ahlul-Bayt 213
Le
Ministre (l'assistant) du Prophète (SAW) 214
a)-
Dans le Saint Coran avec l'éclairage de la sunnah. 214
b)-
Quand le Messager (SAW) fit-il de 'Ali son assistant 214
Le
Calife, l'Adjoint du Prophète 215
i)- Le
récit de la plainte 216
- Une
deuxième plainte 218
- La
période de la plainte 218
La
cérémonie de l'institution de l'Imam 'Ali (s.a) Successeur du
Messager(SAW) et Tutélaire de l'Islam et des Musulmans 219
Le
Récit d'Al-Ghadîr 222
Al-Wilâyah
(la Souveraineté) et les détenteurs de l'autorité dans le
saint Coran 225
i) La
Wilâyah de 'Ali dans le Sait Coran 225
Critique
de la signification donnée au verset 226
ii)-
Les détenteurs de l'autorité: 'Ali et les Imams de sa descendance
(a. s.) 229
iii)-
La tradition de 'Arche: 230
La
fonction des Imams: 'Ali et ses onze descendants (a. s.): Transmettre et faire
connaître la Sunnah du Messager d'Allah 231
Histoire
de la transmission de la sourate «L'Immunité» 233
'Ali
était du Prophète (SAW) ce qu'était Hârûn de
Mûssâ (a. s.) 234
Le
porteur des connaissances prophétiques 235
Les traditions
relatives au statut des petits-fils du Messager d'Allah 237
Le
Prophète (SAW) annonce la bonne nouvelle de l'apparition
d'Al-Mahdî (a. s.) vers la fin des temps: Al-Mahdî (a. s.) porte le
même prénom que celui du Prophète 239
Al-Mahdî
(a. s.) est descendant de Fatima (a. s.) 240
Al-Mahdî
(a.s) est descendant d'Al-Hussayn (a. s.) 240
Des
traditions prophétiques relatives à l'Imamat d'Ahlul-Bayt (a. s.)
241
-
Hadîth Ath-Thaqalayn 241
- Le
nombre des Imams (a. s.) 242
- Leur
perplexité face à ce hadîth 245
- Les
Douze Dépositaires du Prophète 247
-
L'orientation du pouvoir politique durant treize siècles 248
3ème champ de
recherche:
Les Sources de la Législation islamique (la Shari'ah) dans les
deux Ecoles (249)
Chapitre
1
L'attitude des deux Ecoles à l'égard du Saint Coran 250
La
compilation du Sait Coran par le Messager (SAW) et ses Compagnons
revêtait pour eux une grande importance 251
Chapitre:
2
L'Attitude
des deux Ecoles à l'égard de la Sunnah du Messager 256
As-Sunnah et la Bid'ah
(la Tradition et l'Invocation) 256
1)-
As-Sunnah 256
2)-
Al-Bid'ah 256
A-
L'attitude des deux Ecoles à l'égard des narrateurs des
traditions prophétiques 257
B- La
position de chacune des deux Ecoles quant à la diffusion des Traditions
prophétiques durant le siècle 1 de l'hégire 259
C- Un
siècle de "censure" prohibitive de L'écriture de la
sunnah 261
1)- A
l'époque d'Abû Bakr 261
2)- A
l'époque de 'Umar 262
3)- A
l'époque de 'Uthmân 264
4)- A
l'époque de l'Imam 'Ali (a. s.) 266
5)- A
l'époque de Mu'âwiyah 266
L'ouverture
des affluents israélites 267
6)- A
l'époque de 'Umar b. Abdil-'Azîz 271
Les
autres compilations eurent le même sort 272
Pourquoi
deux hadîths contradictoires ont-ils pu être rapportés? 274
Chapitre:
3
L'Attitude des deux Ecoles à l'égard du Droit islamique (al-Fiqh)
et de l'Ijtihâd 280
1-
L'évolution sémantique du terme Al-Ijtihâd dans l'Ecole des
califes. 280
2- Al-Ijtihâd
- cette appellation 284
At-Ta'wîl: terminologie
linguistique et terminologie Shar'î 284
3- Les
Mujtahidîne de l'Ecole des califes au premier siècle de
l'Islam 286
1)- Le
Sceau des prophètes et le maître des Messagers 286
2)- Le
premier calife Abû Bakr (r. d.) 287
3)- Le
Compagnon Mujtahid Khâlid b. al-Walîd 288
4)- Le
deuxième calife 'Umar b. al-Khattâb 288
5)- Le
troisième calife 'Uthmân 289
6)-
Al-Mujtahidah, la mère des croyants 'Aïsha 291
7)-
Mu'âwiyah b. Abî Sufiân 292
8)-
Son Ministre Amru b. al-'As 292
9)-
Al-Mujtahid Abûl-Ghâdiyah, le meurtrier de 'Ammâr 293
10)-
Mujtahidîne dans l'ensemble 294
11)-
Le calife imam Yazîd b. Mu'âwiyah 295
4
L'objet de leur Ijtihâd (effort d'interprétation ou de
déduction) 296
1)-
L'Ijtihâd du Messager d'Allah 296
2)-
L'Ijtihâd d'Abû Bakr 296
3)-
L'Ijtihâd de 'Umar 301
5-
L'Ijtihâd des deux califes Abû Bakr et 'Umar dans le domaine du
quint (Al-Khums, le cinquième); Introduction sur la signification des
termes Zakât-Çadaqah-Fay', Çafîy, Anfâl,
Ghanîmah et Al- Khums 303
La
Zakât (Çadaqah) après le Messager (SAW) 307
Le
patrimoine du Messager (SAW) 307
Le
patrimoine du Prophète et la plainte de Fâtimah 308
1-
Elle leur demanda la restitution du don prophétique 308
2- La
controverse au sujet de l'héritage du Prophète 309
3- La
controverse relative à la part du Proche parent 311
L'usage
qu'ont fait les califes du Khums, du patrimoine du Messager et de Fadak, son
don à Fâtimah 316
A
l'époque d'Abû Bakr et de 'Umar 316
A
l'époque de 'Uthmân 318
A
l'époque de l'Imam 'Ali (a. s.) 319
A
l'époque de Mu'âwiyah 319
A
l'époque de 'Umar b. Abddil-'Azîz 319
Après
Ibn Abdil-'Azîz 319
6-
L'Ijtihâd du calife 'Umar dans la question des deux Mut'ah
(actes de jouissance) 320
A - Le pèlerinage de jouissance 321
La
tradition du Messager (SAW) en matière d'Al-'Umrah
322
Exemple
et enseignement 329
B- Le
mariage de jouissance 330
- Le
mariage de jouissance dans le Livre d'Allah 331
- Le
mariage de jouissance dans la sunnah 332
7-
L'Ijtihâd durant et après le deuxième siècle de
l'hégire; la déduction des lois à partir des actes des
Compagnons 335
-
Leurs arguments pour fonder l'Ijtihâd 336
a- Le
récit de Mu'âdh 336
b- Le
récit de 'Amru b. al-'As 336
c- La
lettre de 'Umar b. al-Khattâb, adressée à Abû
Mûsâ al-Ash'arî 337
Notre
discussion de leur propos sur l'Ijtihâd 339
La
déduction des règles juridiques à partir des actes des
Compagnons 340
L'imam
des Hanafites et le recours à l'opinion personnelle 341
Chapitre:
4
Le
Coran et la Sunnah sont les deux Sources de la Législation dans l'Ecole
d'Ahlul-Bayt 347
Les
Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) ne se basent pas sur l'opinion personnelle pour la
clarification des lois 347
Les
récits des Imams (a. s.) sont rapportés à partir d'Allah
et de Son Messager 348
Les
Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) héritent de leurs sciences 349
Les
Imams (a. s) rapportent les hadîths à partir du Messager, leur
grand-père (SAW) 349
Le
Prophète (SAW) ordonna à 'Ali (a. s.) d'écrire pour ses
associés les Imams (a. s.) 352
Le
Livre d'Al-Jafr et le Muçhaf de Fâtimah 354
Comment
les Imams s'étaient-il transmis la science? Les
Imams 'Ali, Hassan, Hussayn, As-Sajjâd, et Al-Bâqir (a. s) 356
L'Imam
'Ali b. al-Hussayn, en particulier 356
L'Imam
Mohamed Al-Bâqir (a.s.) en particulier 357
L'Imam
Ja'far As-Çâdiq (a. s.) 357
L'Imam
Mûsâ b. Ja'far (a. s.) 358
L'Imam
'Ali b. Mûsâ Ar-Ridâ (a. s) 359
Les
Plaintes de l'Imam 'Ali (a. s) à cause de l'altération de la
sunnah prophétique 359
4e champ de recherche:
Le Soulèvement de l'Imam Al-Hussayn (a. s.) contre la
Déviation entraînée par l'Ijtihâd et l'Opinion
personnelle loin de la Sunnah du Messager d'Allah(377)
Comment
les Musulmans ont-ils pris conscience? 380
Allah
et Son Messager ont préparé l'Imam Al- Hussayn (a. s.) à
opérer le changement voulu 380
La
condition musulmane à l'époque de l'Imam Al- Hussayn (a. s.) 384
Le but
de l'Imam Al-Hussayn (a. s.); Sa devise et sa voie 387
En
répondant à son appel, l'Imam oppose son argument à
l'encontre du peuple de Kûfah 391
L'Imam
(a. s.) était parti pour l'Irak afin que son argument soit le plus haut
et non à cause de l'insistance des fils de 'Aqîl 393
Le
côté de la sagesse dans l'insurrection de l'Imam 394
La
mise à mort des descendants du Prophète (SAW) :
Le premier martyr des descendants du Prophète (SAW) 402
Le
massacre des petits-fils d'Abî Tâlib 406
'Abdullah
b. Muslim b. Aqîl (tué à al-Kûfah), sa mère
fut Ruqayyah al-Kubrâ fille de l'Imam 'Ali 406
Ja'far
b. Aqîl b. Abî Tâlib (l'oncle du précédent) 406
'Abdur-Rahmân
b. 'Aqîl (le frère du précédent) 406
Mohamed
b. 'Abdillah b. Ja'far 407
'Awn
b. 'Abdillah b. Ja'far 407
Les
fils de l'Imam Al-Hassan (a. s.) 407
La
mise à la mort des frères de Hussayn (a. s.) 409
Abû
Bakr b. 'Ali (a. s) 409
'Umar b. 'Ali (a. s.) 410
'Uthmân
b. 'Ali (a. s.) 410
Ja'far
b. 'Ali (a. s.) 410
'Abdullah
b. 'Ali (a. s.) 410
Le
martyre d'Al-'Abbâs b. 'Ali (a. s.) 411
Le
massacre des enfants descendants du Prophète 413
Le
massacre d'un enfant à la mamelle 413
Le massacre
d'un autre enfant de Hussayn (a. s.) 414
Une
bataille sur le chemin de l'Euphrate 414
Le
massacre d'un enfant effrayé 415
Le massacre
d'un enfant de l'Imam Al-Hassan 415
Al-Hussayn
(a. s.) et ses dépouilles 416
Les
fantassins de l'armée califale chargent le campement des descendants du
Prophète 417
Le
dernier combat de Hussayn (a. s.) 417
Le cri
de Zaynab (a. s.) 418
L'assassinat
du petit-fils du Prophète 418
L'armée
califale dépouille les descendants du Prophète 419
Le
dernier martyr de Karbalâ'. 420
Le
meurtrier de Hussayn demande sa récompense 421
Les
guerriers faisaient écraser le corps de Hussayn (a. s.) par leurs
chevaux 421
L'état
de l'Ecole des califes après le martyre de Hussayn (a. s.) 425
1)-
Don et gratification 425
2)-
Les regrets de la clique califale 427
Les
insurrections dans les lieux saints de l'Islam après le Martyre de
l'Imam Al-Hussayn (a. s.) 427
Les
émissaires de Yazîd auprès d'Ibn Az-Zubayr 430
La
délégation médinoise chez Yazîd 432
La
révolte des Compagnons et des Tâbi'îne 433
L'insurrection
des Médinois et l'allégeance prêtée à
Abdullah b. Handhalah 433
As-Sajjâd
(a. s) donne la protection aux femmes de Banî Umayyah 434
Les
Banî Umayyah demandent des secours à Yazîd 434
Les
instructions du calife au chef de son armée 435
Le
calife des musulmans chante ses menaces 436
L'armée
califale en marche vers les lieux saints 436
L'armée
califale profane l'enceinte sacrée du Prophète 439
Les
Médinois survivants prêtèrent serment d'allégeance,
assorti de la clause selon laquelle ils étaient esclaves de Yazîd 440
L'envoi
des têtes au calife Yazîd 442
Au
service de l'obéissance au calife 444
- La marche
de l'armée califale vers Makkah et l'agonie de son chef 444
- Dans
la guerre qui l'opposait à Ibn Az-Zubayr, l'armée califale
brûla la Ka'bah et chanta son épopée 445
-
Al-Hajjâj catapulte la Ka'bah 446
- La
Ka'bah prit feu et la foudre frappa 447
- La
Maison brûlait et Al-Hajjâj chantait l'événement
. . 448
- La
fin d'Ibn Az-Zubayr et l'envoi des têtes à Damas 448
-
Al-Hajjâj scelle les coups des Compagnons du Prophète
449
Après
l'insurrection dans les lieux saints, les révoltes se
succédèrent 450
Les repentants
révoltés combattaient l'armée califale à 'Aïn
al-Wardah jusqu'au dernier martyr 450
Les
révoltes ont affaibli le califat et les Imams (a. s.) ont
restitué les lois de l'Islam 451
5ème champ de
recherche:
Après le Soulèvement de l'Imam Al-Hussayn (a. s.).
La restitution par les Imams (a. s.) de la Sunnah prophétique
à la Société musulmane (453)
La
méthode poursuivie dans les Etudes (de hadith) depuis l'Epoque
d'Al-Kulaynî 456
Les
Etudes après l'institution de la Hawzah (l'Université islamique)
d'An-Najaf Al-Ashraf 457
Appréciation
des livres de hadîth dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt 461
- Des
errata dans la transcription des livres du hadîth 461
- Les
hadîths 7 et 14 461
- Le
résultat de la recherche et de la comparaison. 462
Les
critères désignés par les Imams d'Ahlul-Bayt 462
- Pour
la connaissance du hadîth 462
- Les
Mujtahidûn au premier siècle de l'Islam 465
L'appréciation
des livres du hadîth; le point de vue de chacune des deux Ecoles 467
-
L'appréciation des livres de hadîth dans l'Ecole des califes 467
-
L'appréciation des livres du hadîth dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt 469
Les
savants d'Ahlul-Bayt (a. s.) n'imitent pas les Anciens ni dans le domaine de la
législation ni dans la science du hadîth 470
Le
puisement des jugements du Fiqh de la sunnah prophétique 471
Les
hadîths authentiques d'après les juristes de l'Ecole d'Ahlul-Bayt 471
La
diffusion des récits de l'Ecole des califes parmi les partisans de
l'Ecole d'Ahlul-Bayt 473
La probité scientifique des savants de
l'Ecole d'Ahlul-Bayt 474
*************************************
**********************************
- I -
Allah instaura
l'Islam et en fit pour l'homme un système de vie compatible avec sa Fitrah,
son innéité (sa conception originelle), IL le guida par
l'intermédiaire de Ses prophètes (a. s)(1). Quand l'un
parmi ceux-ci vint à mourir et que sa communauté altéra,
après lui, Sa Shari'a (loi divine), Allah envoya un nouveau
prophète afin de renouveler Sa religion. De par Sa sagesse, IL
décida de couronner Ses shara'î' successives par celle du
Sceau des prophètes et sauvegarder les fondements de l'Islam par la
conservation éternelle du Qur'ân(2) contre toute
altération par addition ou par soustraction. La clarification des lois
et leurs explications sont consignées dans la sunnah
(Tradition) du Messager d'Allah (SAW). Toutefois, celle-ci ne fut pas
conservée au même titre que le Coran; ses rapporteurs ne furent
pas exempts de l'inadvertance ou de l'oubli et les transcripteurs de livres de hadîths
(récits de la sunnah) n'échappèrent pas non plus
à l'erreur et à la faute. Durant quatorze siècles, les
récits de la sunnah du Prophète (SAW) étaient
transmis par les Musulmans qui, en matière de Sîrah
(biographie du Prophète) et de traditions diverses, rapportèrent
beaucoup de récits contradictoires. L'existence de l'implicite et de
l'explicite, du général et du spécifique dans les dits
récits, l'infiltration et la diffusion des traditions
judéo-chrétiennes dans les études islamiques par des
personnages tels Ka'bul-Ahbâr et Tamîm Ad-dârî, les
histoires et les récits apocryphes inventés par des hypocrites
tels Ibn Abîl'Aujâ' et Sayf b. 'Umar, contribuèrent à
susciter la discorde et l'opposition dans les commentaires des Mujtahidînes
ou Ulémas qui, en évaluant ces récits pour
en retenir les plus valables, exprimaient aussi leurs opinions
particulières dans les différents domaines des sciences
islamiques. Les uns et les autres s'agrippant à leurs opinions
respectives, des clans se formèrent, chacun ayant une vision
spécifique de l'Islam conformément à laquelle il
interprétait les versets "équivoques" (Mutashâbihât)
du saint Coran et y ramenait la signification des versets clairs et
confirmés (Muhkamât).
Avec
de tels contrastes et de telles oppositions, comment est-il possible d'unifier
la parole des Musulmans? Non. Le rapprochement entre eux ne se réalisera
jamais ainsi et tant qu'ils resteront, dans leur imitation non fondée,
cramponnés aux prises de positions du Salaf (musulmans des
premières générations).
Il est
nécessaire que tout rite musulman clarifie sa position en exposant ses
différentes vues de l'Islam, les procédés adoptés
pour l'interprétation du Sain Coran, du hadîth et des
avis religieux résultant des efforts déployés (ijtihâd)
par le salaf (les anciens) quand ces avis sont matière de
divergence et de polémiques. Toutefois, il faut que cette exposition se
fasse dans le cadre d'une recherche scientifique rigoureuse, dans le style
consacré de l'appel à la vérité et sans recours
aucun aux injures et aux diffamations en vue de faire triompher son point de
vue et son clan - qu'Allah nous en préserve -. Ensuite, la
vérité étant fille de la recherche, il faudra
écouter sans parti pris ce que les autres écoles ou clans veulent
aussi faire entendre et valoir.
Le
chemin le plus droit pour y arriver serait que les savants musulmans prennent
l'initiative, entament ces études (comparatives) avec
l'objectivité et un pur esprit scientifique. Ensuite les
résultats de leurs travaux seront exposés dans les
séminaires et les plus hautes sphères scientifiques et islamiques
telles l'Université d'Al-Azhar ash-Sharîf au Caire, celle de la
Sainte Médine, la Ligue Mondiale Islamique à la Sainte Makkah (la
Mecque) celles d'An-Najaf al-Ashraf, de Qum, de Khurassân,
d'Al-qayrawân et d'Az-Zaytûnah, afin d'être l'objet d'examen
et de critique. Par après, les gouvernements des pays musulmans
publieront les résultats de ces études universitaires et les
diffuseront parmi tous les Musulmans afin que ceux parmi eux qui veulent
comprendre le point de vue de l'autre le saisissent exempt de confusion et de
calomnie. Ainsi ce point de vue sera soit accepté volontiers et
partagé, soit son auteur sera, en tant que musulman, respecté et
excusé dans sa prise de position et ses opinions. Il sera ainsi
aisé pour les Musulmans de se comprendre les uns les autres, de se rapprocher
et d'unifier leurs efforts pour sauvegarder leurs intérêts.(3)
Pour
ce faire, il est nécessaire que les chercheurs commencent par scruter
les sources islamiques de la Shari'â et établir la manière
dont les Musulmans usèrent et quels chemins ils empruntèrent pour
aborder la sunnah prophétique.
C'est
pour atteindre ce but noble que j'entrepris la composition de ce livre en
implorant l'aide d'Allah-gloire à Lui.
- II -
De l'Impact de la Discorde au Sein
de la Communauté
Musulmane
(notes de voyages)
Dans
la description de l'état de division que connaissent les Musulmans
accusés les uns par les autres de mécréance ou
d'apostasie, je me suis appuyé sur leurs diverses argumentations que
j'exposerai plus tard, sur leurs publications et sur les observations que
j'avais notées lors de mes voyages effectués en terre d'Islam et
suite à mes rencontres avec les Ulémas et penseurs des
différentes Ecoles musulmanes (surtout lors de mes dix voyages de
pèlerinage aux lieux saints de l'Islam).
C'était
à l'époque du Roi Adbal'aziz al-Sa'ud. Quand le groupe des
pèlerins irakiens dont je faisais partie arriva à Rimah, une
ville saoudiene, nous y passâmes vingt quatre heures durant lesquelles
nous assistons tous aux prières faites en commun avec les habitants de
la ville dans leur mosquée. A l'heure du départ, certains d'entre
eux assistèrent à notre embarquement. Un orateur parmi eux prit
la parole nous montre du doigt et dit: «Ce sont des polythéistes.
Ceux-ci pleurent sur Hassan et Hussayn!». Ensuite, en me
montrant, il dit: «C'est leur guide! S'il vient à échoir
entre mes mains, je l'égorgerai et lécherai son sang!».
L'un de nos pèlerins lui dit: «Pourquoi sommes-nous polythéistes?
Nous avons fait le pèlerinage à la Maison d'Allah; nous avons
rendu visite au tombeau du Prophète!». Sur ce, l'orateur cria,
écuma et dit: «Tu as mécru! Si Abû Sa'ûd (le
roi saoudien à l'époque) venait en personne, il ne saurait te
protéger! Qui fut Muhammad? Muhammad était un homme comme moi! Il
est mort et s'en est fini de lui». Le pèlerin irakien trembla puis
demanda que dirai-je alors? Que dirai-je? L'autre répondit: «Dis
que seul Allah porte préjudice, seul Allah fait le bien!».
Le
pèlerin répétait l'apprentissage quand un autre
pèlerin irakien intervient en demandant: «Le Prophète (SAW)
fut-il un homme comme toi?». L'orateur confirme de nouveau ses propos. Le
pèlerin rétorqua alors: «Muhammad a reçu le Coran en
révélation, en reçois-tu, toi?». L'homme ne
répondit point et nous nous hâtâmes de monter en voiture et
de nous en aller.
Dans
notre groupe de pèlerins, il y avait un homme qui habitait l'Irak mais
avait un passeport saoudien. Quand nous arrivâmes aux frontières,
l'employé à la douane le gronda, se moqua de lui et dit: «Délaisses-tu
la terre de l'Islam pour aller habiter en terre du polythéisme!?».
Le pèlerin en question ne put que s'humilier devant lui et
quémanda humblement la remise de son passeport!
A
cette époque, le souci majeur des savants musulmans irakiens
était de réintroduire les lois islamiques dans la
société en sensibilisant les membres de la communauté
islamique dans leurs mosquées et lors des fêtes et des
festivités religieuses. Ils s'opposaient aussi au pouvoir en place qui
instaurait des lois en contradiction avec les principes islamiques. Tout ce qui
se rapportait aux mouvements des Musulmans dans ce chemin, là où
ils se trouvaient, était pour nous un sujet d'intérêt et
d'attention. Nous avons soutenu de toutes nos forces la révolution
algérienne contre la France et la révolution palestinienne. Celle
de l'Erythrée contre l'Ethiopie retenait notre attention
également. Nous estimions que la consciencisation des Musulmans, leur
solidarité, leur soutien mutuel et la mise en veilleuse de leurs
divergences cautionnaient le succès de leur combat en vue de
réhabiliter les lois islamiques dans leurs sociétés. Quand
éclata le combat islamique en Iran, entre le pouvoir du tyran (taghût)
et les Ulémas musulmans, à commencer par l'émeute de
l'école Faydiyyah à la grande Université islamique de Qum,
le 25 Shawwâl 1382 h, nous y vîmes un prélude de bien. Pour
y venir en aide, nous mobilisions toutes nos énergies et nous nous
mîmes à son service. Qu'Allah rétribue tous les
Ulémas d'Irak qui l'(le mouvement irakien) ont soutenu de toutes leurs
forces. Je fis partie de ceux qui organisèrent des
cérémonies funèbres dont l'une, celle de Bagdad, qui dura
trois nuits successives durant lesquelles des sermons visant à clarifier
toutes les dimensions de la lutte islamique qui se déroulait en Iran,
ses retombées et le sens qui s'en dégageait.
C'était
dans ces circonstances que je suis parti en pèlerinage emportant une
devise et une thèse. Ma devise était l'appel à
l'unité des Musulmans en vue de l'instauration dans leurs pays d'une vie
islamique authentique. Ma thèse consiste à promouvoir
l'éveil islamique dont les prémices virent le jour en Iran par le
fait des Ulémas musulmans. Je m'attelais alors à en expliquer les
motivations aux leaders et penseurs musulmans et à leur demander de lui
apporter leur appui. L'argument était que le combat des Musulmans dans
la voie de la réinstauration des lois islamiques est un; que s'il
aboutit dans un pays musulman, les retombées bénéfiques du
succès se répandront dans toute la Communauté Musulmane.
J'étais tout espoir de rencontrer des réactions positives
à mon appel relatif au drame que subirent les Musulmans d'Iran,
étant donné que la cause et le devenir des uns et des autres,
étaient communs à tous.
Lors
de ce voyage, je rencontrai les leaders des «frères
musulmans» de Syrie, Adam, le leader de la révolution
érytréenne à la station 'Arafât, une élite
palestinienne en Jordanie et à Baytul-Maqdis, des journalistes
musulmans, des orateurs, des savants et des leaders de mouvements islamiques
tels Abul-Hassan an-Nadawî, Abul-A'lâl- Mawdûdî et
d'autres.
A
Médine, je commençai mon travail par la participation à la
rédaction des publications destinées à la diffusion parmi
les pèlerins. J'y ai introduit quelques modifications. Nous avons
expliqué les dimensions du soulèvement musulman en Iran et
souligné l'injustice du pouvoir taghûtî en place et
sa complicité avec les Etats mécréants. J'avais
opté pour la distribution des publications la veille d'Al-'Aïd
(fête du sacrifice) à Muzdalifah (Al-Mash'arul-Harâm). Mais
le soir du septième jour du Dhul-Hijjah, je fus surpris à la
Mecque, par la nouvelle que le sheikh responsable de la diffusion des
publications avait été arrêté après en avoir
distribué quelques-unes dans l'enceinte de la Sainte Mosquée
mecquoise. Toutes les publications furent confisquées et le sheikh fut
incarcéré. Nous, savants d'Irak et d'Iran, rencontrâmes, le
jour de l'Aïd (la fête), le prince héritier Fayçal.
J'en pris alors acte et lui demandai la libération du sheikh
incarcéré et la restitution des publications en rappelant que son
gouvernement avait levé pour devise l'application des lois coraniques,
que cela impliquait le devoir d'aider les Musulmans qui combattent chez eux
dans cette voie à l'encontre de leurs gouvernements qui veulent
plutôt appliquer les lois de la mécréance et que la
Cité sacrée devait être, par conséquent, un refuge
pour les persécutés parmi les Musulmans qu'on devait aider
à expliquer leur cause à leurs frères pèlerins afin
que se réalisât effectivement ce verset: «Pour
témoigner des bienfaits qui leur ont été
accordés...»
Après,
j'ai invoqué le soulèvement des Ulémas musulmans à
la grande Université de Qum en Iran et me suis étendu sur
l'explication des tenants et aboutissants de cet événement et sur
le devoir des leaders musulmans, le gouvernement saoudien en particulier,
à son égard avant de conclure par la défense de la cause
du sheikh arrêté pour avoir distribué les dites
publications. Des discussions furent engagées à ce sujet, qui aboutirent à la libération de l'homme
incarcéré.
Après
l'accomplissement des rites du pèlerinage et notre retour à la
Mecque, nous apprîmes que des journaux avaient invité le public
à assister dans la mosquée indienne de la Mecque au discours du
professeur Al-Mawdûdî prononcé le vendredi après la
prière d'Al-'Ishâ' et comportant d'autres les huit questions
nécessaires (selon l'orateur) aux Musulmans en vue de la restitution de
la vie islamique à la société.
Après
lui, je me tins derrière le micro pour prendre la parole et commenter
son discours en disant: «pour leur éveil et redressement; les
Musulmans ont besoin aujourd'hui de trois choses:
»Premièrement:
Quatorze siècles après l'apostolat du Messager d'Allah
(SAW) et en raison des vicissitudes qu'ils ont traversées, les Musulmans
ressentent le besoin d'entreprendre une étude objective englobant la
manière dont les lois devraient être puisées des sources
islamiques et la science des hadiths (la sunnah) loin du mimétisme par lequel
on ne faisait qu'imiter les anciens et ruminer leurs traités en ces
matières.
»Deuxièmement:
Réaliser que les conquérants et colonisateurs
mécréants après avoir pris possession des terres de
l'Islam, purent diviser la parole des Musulmans et mater tout mouvement
islamique naissant là où il apparut. Là, j'ai dû
parler des révolutions, algérienne et erytréenne, et du
soulèvement des Ulémas iraniens contre le Tâghût
agent et pion des Etats nantis. Je me suis étendu sur ces
événements afin de sensibiliser les Musulmans et les inciter
à venir en aide à leurs frères.
»Troisièmement:
Avoir enfin une foi solide comme celle d'Abî Dahr, de
'Ammâr et de Sumayyah. J'ai expliqué alors comment ces compagnons
glorieux du Prophète avaient enduré dans la voie de l'Islam, la
persécution et la douleur, là à la Mecque où nous
étions».
A la
Sainte Médine, le Doyen de son Université islamique Sheikh
Abdul-'Aziz b. Bâz qui fut informé de mes rencontres avec les
délégations musulmanes voulut me faire visiter la nouvelle
Université islamique de Médine, croyant que j'étais
disciple de l'Ecole des califes. Il envoya des voitures de service pour nous
prendre ainsi que des ulémas de Bagdad et certains de ses dignitaires et
hommes de culture. Dans le préau de l'Université ses professeurs
étaient réunis et attendaient de nous recevoir. Des
étudiants se penchaient des fenêtres pour nous voir. Quand nous
avons pris place, je commençai après les louanges
consacrées adressées à Allah, par transmettre les
salutations des Ulémas de l'Irak et leurs félicitations
exprimées à l'occasion de l'institution à Sainte
Médine de l'Université islamique. Ensuite je dis:
«Quand
le Prophète (SAW) arriva en 1ère année de l'hégire
à Médine, il commença par établir le pacte de la
confraternisation parmi les Emigrés (Al-Muhâjirîne)
et les Alliés (Al-Ancâr). Sur cette base, la glorieuse
société islamique fût bâtie. Aujourd'hui, vous, qui
comptez parmi vous des étudiants appartenant à 45 Etats, pouvez
lui emboîter le pas et présenter d'immenses services à
l'Islam et aux Musulmans qui en ont besoin. Partout dans le monde, ils sont
éprouvés par l'invasion du colonisateur mécréant.
Parmi eux certains gémissent directement sous son joug, d'autres
subissent l'assujettissement de ses agents et complices. Les uns et les autres
mènent aujourd'hui le combat contre l'agression de l'envahisseur. Je
citai encore l'exemple de l'Algérie, de l'Erythrée et de l'Iran
où le but était de rétablir les lois islamiques dans un
pays musulman...»
J'avais
bien sûr introduit ce discours par le rappel des drames causés par
la division des rangs musulmans, en citant des exemples à l'appui...
Quand
vint le tour de mon hôte Sheikh Ben Bâz - c'était un homme
aveugle - qui apprit finalement que j'étais disciple de l'Ecole
d'Ahlul-Bayt, il toussota avant de dire textuellement: «Vous êtes
polythéistes! Embrassez d'abord l'Islam puis demandez aux Musulmans de
faire l'union avec vous».
Le
sang brûla dans mes veines et j'ai dû entrer avec lui dans une
longue discussion qu'il est inopportun de rapporter ici(4).
Lors
de mes voyages de pèlerin, j'eus l'occasion d'écouter les
orateurs des vendredis, à la Mecque et à Médine. J'entrais
en discussion avec certains d'entre eux à la Mosquée Al-Khayf
entre les deux dernières prières de la journée. J'ai
assisté à des réunions tenues à la Mecque par la
Ligue islamique mondiale. Je fis aussi connaissance avec des savants d'Egypte,
en particulier ceux de l'Université Al-Azhar, du Liban, du Golf, de
l'Inde, du Pakistan, de Kashmîr et d'autres contrées musulmanes.
Nous avons causé de tout. Parfois on me dit ce qu'il n'est pas commode
de rapporter aujourd'hui. A travers ces discussions avec les penseurs et
leaders musulmans, j'appris - mieux que l'informé ne saurait vous aviser
- que nul rapprochement ou entente ne pouvait se réaliser sans une
étude commune préalable des divergences qui les opposent, de
leurs origines et des démarches à suivre afin de les traiter et
de les dépasser. Nous en citons ici des exemples avant de conclure par
la proposition de l'acte à mener dans la voie du traitement
adéquate. Commençons par les divergences relatives à
certains attributs divins-gloire à Allah.
- III -
Certains Attributs
d'Allah
- Exaté soit-IL
-
et l'Origine de
la Divergence
les Concernants
Certains
Musulmans croient:
-
Qu'Allah créa Adam à son image.(5)
-
Qu'IL a des doigts(6), une jambe(7) et un pied.
- Que
le jour de la Résurrection, IL posera Son pied sur le feu de la
Géhenne qui dira alors «Qat», assez, assez.(8)
-
Qu'IL a un espace, qu'IL se déplace d'un lieu à un autre,
à cause de ce qui est rapporté que le Messager d'Allah(SAW) dit:
«Son trône est situé sur ces cieux comme cela (en montrant
avec ses doigts l'exemple d'un dôme) et qu'il (le trône)
fléchit sous Son poids comme le fait le bât ou le chargement sous
le cavalier».(9)
-
Qu'IL descend chaque fin de nuit au ciel de ce bas monde et dit: «Qui
M'appelle pour que Je l'exauce? Qui Me demande pour que Je lui
donne?...».(10)
- Que
le Prophète (SAW) dit: «Certes, vous verrez à vue d'il
votre Seigneur!»(11)et ceci: «Lorsque
les habitants du Paradis s'adonnent aux délices, soudain, une
lumière leur apparaît; quand ils lèvent leurs têtes,
leur Seigneur se penche d'en haut, sur eux et leur dit:
As-Salâmu-alaykom, Habitants du Paradis!, le Prophète ajouta:
c'est l'interprétation de la parole d'Allah (verset coranique):
«"Paix"
telle est la parole qui leur sera adressé de la part d'un Seigneur
Miséricordieux. (V. 58/XXXVI).
»Alors,
ajouta le Prophète: IL regardera vers eux et ils regarderont vers Lui,
sans pouvoir se détourner de Lui vers quelque délice que ce soit
tant qu'ils Le regardent et jusqu'à ce qu'IL se cache d'eux. Mais Sa
Lumière et Sa Bénédiction subsisteront».(12)
Contentons-nous
de ces exemples de hadiths - très nombreux en fait - qui parlent des
attributs divins, de la vision qu'auront les serviteurs de leur Seigneur, le
Jour de la Résurrection... Ne voulant pas recenser ces traditions,
analysons-en néanmoins l'interprétation donnée par les uns
et les autres.
L'opposition quant à l'interprétation
des hadiths précédents
Il y a
parmi les Musulmans ceux qui croient à la lettre de ces hadiths et
trouve que la foi qu'on y porte équivaut à la foi en Allah et en
Son Unicité - gloire à Lui -. Ceux-qui, pour éviter tout
anthropomorphisme, donnent une autre interprétation à ces
hadiths, sont taxés par les littéralistes de
«Négateurs des Attributs Divins».
Les
dits hadîths furent rapportés par Muslim dans le livre Al-'Imân
de son Sahih ainsi que par Al-Bukhârî dans le livre d'At-Tawhîd
du Sahîh.
Ibn
Khuzaymah composa en la matière un livre intitulé: At-Tawhîd
wa Ithbâtu-Sifâtur-Rabbi, (l'Unicité et la confirmation
des Attributs du Seigneur, exalté soit-IL, par lesquels IL s'est
décrit dans Sa Révélation et par l'intermédiaire de
Son Prophète), selon une transmission de récits authentiques de
justes en justes sans rupture dans la chaîne de transmission ni
flétrissure ni stigmatisation des rapporteurs équitables de ces
hadiths.(13)
Ad-Dhahabî
composa à son tour, le livre: Al-'uluwwul-'âl
lil'Aliyyil-Ghaffâr (14) (La Hauteur
suprême du Très Haut, le Pardonneur).
L'auteur
y cita les versets et les hadiths dont ils (les littéralistes)
comprennent que la suprématie d'Allah réside dans la hauteur
spatiale. Il y cita à l'appui de cette thèse les récits
des Compagnons, des Tâbi'îne (leurs disciples) et des
traditionnistes.
L'origine du désaccord relatif aux attributs
divins et à la visibilité d'Allah
Contrairement
à ceux parmi les Musulmans qui optaient, à ce sujet, pour le
premier point de vue cité ci-dessus, il y en a d'autres qui
évoquent aux antipodes de cette thèse, des versets coraniques
tels que:
«Les
regards ne sauraient L'atteindre alors qu'Il peut atteindre les regards...»
(V. 103/ VI)
Quant
au verset 22/LXXV: «Ce jour-là, il y aura des visages
brillants qui tourneront leurs regards vers leur Seigneur», le
regard sera tourné vers l'ordre du Seigneur dans l'expectative, à
l'instar du verset 82/XII «Interroge la cité où nous
étions», c'est-à-dire les gens de la cité.
Ainsi se fait l'interprétation des versets dont la lettre indique en
apparence qu'Allah, exalté soit-IL, est un corps. Pour cette
dernière Ecole, sont donc des mujassimah ou mushabbihah
(anthropomorphistes) ceux qui prêtent à leur Seigneur les
attributs de Ses créatures.
A
l'appui de cette thèse, on cite l'Imam 'Ali (a. s): «Allah ne
descend pas et n'a pas besoin de le faire. Parle ainsi celui qui Lui attribue
quelque manque ou ajout. Tout mouvant a besoin d'être mû par
quelqu'un ou par quelque chose. Prenez garde, au sujet de Ses Attributs, ne
parlez pas de limite, n'évoquez ni manque ni ajout, ni l'acte de mouvoir
ni l'état d'être mû, ni départ, ni descente, ni
redressement ni station assise».(15)
Le
narrateur dit à l'Imam 'Ali b. Mûssâr-Ridâ (a. s.):
«Nous rapportions qu'Allah - glorifié soit-IL - a fait un partage
au sujet de Sa parole et de Sa vision: à Mûssâ (Moïse)
(a. s.) la parole et à Muhammad (SAW) la
vision! Abûl-Hassan Ar-Ridâ (a. s.) rétorqua alors:
«Ne fut ce pas Muhammad (SAW) qui a transmis aux djinns et aux Humains,
ces versets?
«Les
regards ne sauraient L'atteindre alors qu'Il atteint les regards».
(V. 103/XX)
«Leur
science ne peut L'atteindre». (V. 110/XX)
«Rien
n'est semblable à Lui». (V. 11/XLII)
Il (le
narrateur) répondit: Si.
L'Imam
(a. s.) ajouta: «comment alors un homme vient-il à tous les
Humains pour leur annoncer qu'il est l'Envoyé d'Allah à Qui il
les appelle sur ordre d'Allah que Celui-ci dit: "les regards ne sauraient
L'atteindre ...", puis il (l'Envoyé) dit qu'il L'a vu avec ses
yeux, qu'il L'a cerné avec sa science et qu'IL est à l'image des
hommes?". N'avez-vous pas honte? Les mécréants ne purent lancer
un tel blasphème: transmettre les paroles d'Allah puis d'une autre
manière, proférer ce qui les contredit».
Le
narrateur répondit: mais IL dit: «Il L'a vu, en
vérité, une autre fois». (V. 13/LIII)
Abul-Hassan
(a. s) dit alors: la suite de ce verset indique ce qu'il a vu étant
donné qu'IL dit d'abord: «Le cur n'a pas menti en ce qu'il a
vu». (V. 11/LIII)
C'est
à dire que le cur de Muhammad (SAW) n'a pas démenti ce que ses
yeux avaient vu: «Il a vu les plus grands signes de son Seigneur».
(V. 18/LIII)
Les
signes d'Allah exalté soit-IL ne sont pas Allah qui dit: «Leur
science ne peut L'atteindre». (V. 110/XX)
Or, si
les regards venaient à L'atteindre, l'entendement L'atteindrait et Le
connaître (le cerner) serait effectif.
Abu
Qurrah demanda alors: «Nies-tu donc les récits?» Abul-Hassan
(a. s) répondit: «Si les récits sont en contradiction avec
le Qur'ân je les nie...».(16)
C'est
ainsi que les Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) expliquèrent les versets
coraniques et donnèrent la signification des termes tels que la jambe,
la main et le trône dans le Sait Coran.
- IV -
L'Origine du
Désaccord Relatif
aux
Qualités Spécifiques des Prophètes
Certains
Musulmans croient:
- Que
chercher les reliques des prophètes et prier auprès de leurs
tombes relèvent du polythéisme!
- Que
la construction de mausolées sur leurs tombes équivaut
également au polythéisme!
- Que
la célébration de leurs anniversaires et de ceux des hommes
justes et alliés d'Allah est un péché et une innovation
illicite.
- Que
l'imploration d'Allah par l'intermédiaire de quelqu'un d'autre que Lui
avoisine le polythéisme.
- Que
chercher l'intercession du Prophète (SAW) après sa mort est en
contradiction avec les lois islamiques.
Ceux
qui ne partagent pas ce point de vue avancent les arguments suivants:
1- La considération des reliques
bénies des prophètes (a. s.)
Les
adeptes de ce point de vue arguent de ce qui est amplement rapporté dans
les livres de hadiths (mutawâtir) que les Compagnons
considéraient avec vénération la personne du Prophète
(SAW) et ses effets personnels de son vivant et après sa mort (ses
reliques).
L'effet
bénéfique de la salive du Prophète (SAW)
Sahl.
B. Sa'd rapporte dans le sahîh de Bukhârî que le
Messager d'Allah (SAW) dit le Jour de Khaybar: «Demain je remettrai ce
drapeau à l'homme par lequel Allah nous accordera la victoire, un homme
qui aime Allah et Son Messager et qui l'aiment également».
Les
gens passaient leur nuit à se chamailler et à se demander qui en
aurait le privilège. Le matin, une fois auprès du Messager
d'Allah (SAW), tous espéraient se faire accorder le drapeau. Le
Prophète (SAW) demanda: «Où est 'Ali?». «Il a
mal aux yeux, ô! Messager d'Allah», répondit-on. Le
Prophète demanda qu'on l'amenât.
Dans
une autre version au sein du même livre, le Prophète cracha sur
ses yeux (de 'Ali a. s.), ce qui les guérit sur-le-champ comme s'il
n'avait jamais été malade.(17)
Dans
le récit rapporté par Salamah b. Al-Akwa' (dans la Shîh de
Muslim), le Compagnon dit: «Je conduisis 'Alî chassieux jusque
devant le Messager d'Allah (SAW). Il cracha alors sur ses yeux. 'Alî
guérit et reçut le drapeau».(18)
La
recherche de la bénédiction dans l'eau ayant servi aux ablutions
du Prophète (SAW).
Anas
b. Mâlik rapporte (dans le Sahîh de Bukhârî): «Le
moment de la prière du 'Asr (la 3e prière) fut venu, les hommes
cherchaient de l'eau pour faire les ablutions mais ils n'ont trouvé
qu'un vase contenant un peu d'eau, qu'on apporta devant l'Envoyé d'Allah
(SAW). Il y plongea sa main et ordonna aux hommes de faire leurs ablutions. Je
vis à ce moment l'eau jaillir du dissous de ses doigts et les hommes
faire leurs ablutions du premier au dernier».(19)
Dans
le même recueil, à l'occasion du traité d'Al-Hudaybiyyah,
'Urwah b Mas'ûd rapporte ceci: «Par Allah, le Messager (SAW)
n'eût rejeté quelque crachat sans qu'une main de Compagnon ne le
prît pour en frotter le visage et la peau. De même quand il finit
de faire ses ablutions, ils (les Compagnons) allaient s'entre-tuer pour
s'emparer de l'excédent de ses ablutions».(20)
La
recherche de la bénédiction dans les cheveux du Prophète
(SAW)
Muslim
rapporte dans son Sahîh que le Messager d'Allah (SAW) se rendit à
Mîna, se fit couper les cheveux (rite du pèlerinage) après
avoir lapidé et immolé. Ensuite, il en donnait aux gens. Dans une
autre version, il appela le coiffeur et quand il s'est fait couper les cheveux,
il les donna à Abî Talhah pour les partager entre les gens.(21)
La
recherche de la bénédiction dans l'endroit touché par la
main du Prophète (SAW)
A
propos de la biographie de Handhalah tant dans Al-Içâbah
(Ibn Hajar) que dans Al-Musnad (Ibn Hanbal) le dit: Compagnon raconte:
«Mon grand-père m'amena devant le Prophète (SAW) et dit:
j'ai des fils dont certains possèdent des barbes, d'autres sont mois
âgés. En voici le plus jeune. Je te prie de demander à
Allah pour son bien (bénis-le). Alors le Prophète (SAW) passa sa
main sur sa tête en disant: Qu'Allah te bénisse. Le narrateur
commente: par après, j'ai vu qu'on amenait à Handhalah une
personne souffrant d'une enflure au visage ou une bête atteinte
d'dème, qu'il dit Bismillah, soufflant sur sa main qu'il posa
sur sa tête là où le Prophète (SAW) avait
posé la sienne puis la passa sur l'organe soufflant. Le narrateur
ajoute: et l'dème disparaît».(22)
Un
récit similaire est rapporté par l'auteur d'Al-
Içâbah (Ibn Hajar Al-'Asqalânî).
Enfant
ou âgé, en voyage ou en résidence, de nuit ou de jour,
bébé dans la tente de Halimas-Sa'diyyah ou en mission commerciale
en Syrie, émigré chez ummi Ma'bad ou chef d'Etat à
Médine, la bénédiction se répandait immanquablement
de la personne du Prophète (SAW) à la manière de la
lumière qui se dégageait du soleil et du parfum qu'exhalait la
fleur. Ce n'est qu'à titre d'exemple que les récits ci-dessus
sont proposés au lecteur. En faire un recensement exhaustif serait ici
hors de propos; ce qui vient d'en être dit est suffisant pour «qui
a un cur, prête l'oreille et est témoin».(23)
Ci-après,
nous étudions la question de l'intercession du Messager d'Allah (SAW)
implorée par le croyant ainsi que les autres spécificités
qui distinguent le Messager des autres Humains.
2- La demande de l'intercession au Messager d'Allah
(SAW)
Ceux
qui croient en la légitimité de cette demande (adressée en
tout temps par le croyant au Seigneur) avancent le fait que cela fut un
agrément pour Allah avant la création de la personne du
Prophète (SAW), durant sa vie sur terre, après sa mort et au Jour
de la Résurrection. En voici les arguments:
Premièrement:
chercher accès auprès d'Allah par l'intermédiaire du
Prophète (SAW) avant sa création (physique)
Ceci
est rapporté par nombre de traditionnistes dont Al-Hâkim (dans son
Mustadrak citant b. Al-Khattâb) qui dit: «Quand Adam
commit sa contravention il dit: Oh! Seigneur, par Muhammad, je T'implore de me
pardonner. Allah dit: Adam! Comment as-tu connu Muhammad que je n'ai pas encore
créé? Adam répondit: Oh Seigneur! Parce que quand Tu m'as
créé, insufflé en moi de Ton Esprit, j'ai levé la
tête et aperçu cet écrit sur les colonnes du Trône:
«Il n'y a d'autre divinité qu'Allah; Muhammad est-Son
Messager», j'ai alors compris que Tu n'as joint à Ton Nom que
celui de l'être le plus aimé par Toi. Allah dit: tu dis vrai,
Adam, c'est lui le bien-aimé de Mes créatures, implore Moi par
son nom, je t'ai pardonné et (sache que) n'eût été
Muhammad, je ne t'ai pas créé».
At-Tabarânî
rapporta le même récit avec cette addition: «Et c'est le
dernier prophète de ta postérité».(24)
Deuxièmement:
Durant sa vie
Ahmad.
B. Hanbal, Tirmidhî, Ibn Mâjah et Al- Bayhaqî rapportent
à partir de 'Uthmân b. Hunayf qu'un homme aveugle vint
auprès du Prophète (SAW) et dit: «Demande à Allah de
me guérir! Le Prophète lui dit: je le ferai si tu veux mais si tu
supportes (ton mal) en patience, ce sera mieux pour toi! L'aveugle
réitère: implore (pour moi)! Le Prophète (SAW) lui ordonna
alors de bien faire ses ablutions, et de faire cette invocation: Seigneur (Allahumma)!
je T'implore en ayant recours à Ton
Prophète Muhammad, le Prophète de la Miséricorde, ô
Muhammad! j'ai recours à Toi pour demander au
Seigneur d'exaucer mon vu «Allahumma», permets-lui
d'intercéder en ma faveur». Al-Bayhaqî et At-Tirmidhî
disent que(25)ce hadith est
authentique.
Troisièmement:
Après sa mort
At-Tabarânî
rapporte dans son grand Mu'jam, à partir de 'Uthmân b.
Hunayf qu'un homme se rendait pour une affaire à la porte du Calife
'Uthman b. 'Affân (r.d). Mais ce dernier ne faisait pas attention
à lui et ne se pencha point sur son affaire. L'homme s'en est plaint
auprès de 'Uthmân b. Hunayf (le Compagnon) qui le conseilla ainsi:
«fais tes ablutions, ensuite va à la Mosquée et quand tu
auras fait une prière de deux inclinations, tu diras ceci avant
d'évoquer ton besoin: Allahumma (Seigneur), je T'implore en
ayant recours à Ton Prophète Muhammad (SAW), le Prophète
de la Miséricorde. Ô Muhammad, j'ai recours à toi pour
demander à mon Maître d'exaucer mon vu! De me donner
satisfaction». L'homme dit alors ce qu'on lui a conseillé de faire
puis se rendit à la porte du Calife. Le concierge vint à lui, lui
prit la main et l'introduisit chez 'Uthmân qui le fit s'asseoir avec lui
sur le tapis avant de lui demander: «C'est quoi ton affaire?» Le
Calife donna alors satisfaction à l'homme en disant: «chaque fois
que tu as besoin de quelque chose, viens me le dire!»
En
principe, avec l'existence de ces hadiths clairs dans la Sunnah du Messager
(SAW), aucune divergence n'aurait dû être envisagée quant
aux hautes qualités des prophètes en particulier celles du Sceau
des prophètes (SAW).
Nous abordons à présent l'origine de
ces divergences et de la négation des traits distinctifs du Messager
d'Allah (SAW)
En
fait, le problème vient de la diffusion de plusieurs récits
relatifs au dénigrement des prophètes (a.s) dans les livres de
hadith. De tels récits placent les prophètes au-dessous du niveau
commun des gens. Ces récits qui sont diamétralement
opposés à ceux que nous avons cités ci-haut forment chez
celui qui y croit une vision particulière du statut d'un
prophète. Pour quiconque veut y prêter attention, voici des exemples
de récits concernant le sceau des prophètes et le meilleur des
messagers (SAW):
1)-
Al-Bukhârî rapporte dans son Sahîh: «Avant la
révélation, le Messager d'Allah (SAW) présenta un jour un
plat contenant de la viande à Zayd b. 'Amru b. Nufayl qui refuse d'en
manger en disant: je ne mange que de ce sur quoi le nom d'Allah a
été invoqué».(26)
Ce
Zayd donc était à l'époque anté-islamique (la Jâhilliyyah),
meilleur que le Messager d'Allah puisqu'il évitait les turpitudes de
cette époque plus que ne le faisait le Messager d'Allah (SAW).
2)-
Al-Bukhârî et Muslim rapportent que: lorsque Jibril
(Gabriel) (a. s.) révéla au Messager d'Allah (SAW) ces versets du
Coran. «Prêche au Nom de ton Seigneur Qui créa par le
calame» (XCVI), le Prophète (SAW) revint
chez lui plein de frisson et dit à Khadijâ (son épouse): Je
crains pour moi-même. Elle lui rétorqua: Mais non, sois heureux de
la bonne nouvelle. Je jure par Allah qu'IL ne t'humiliera jamais. Ensuite, elle
l'emmena chez Waraqah b. Nawfal qui était devenu chrétien
auparavant. Le Messager l'informa de ce qu'il avait vu. Waraqah lui dit alors:
il s'agit de la loi divine qui descendit sur Moïse ...».(27)
Donc
ce Waraqah le chrétien en savait plus sur la Révélation et
sur Gabriel que le Messager d'Allah (SAW) qui en fut pourtant l'interlocuteur.
C'était donc la parole de ce Waraqah qui apaisa le Prophète (SAW)
sur son devenir, sinon il voulait - comme le rapporte Ibn Sa'd dans At-Tabaqât
- se jeter d'une crête de montagne. At-Tabarî rapporte aussi que le
Messager d'Allah (SAW) dit à ce propos: «celui-là
(c'est-à-dire lui-même) s'avère un poète ou un fou!
Non! Quraych ne parlera jamais de la sorte sur moi».(28)
3)-
Al-Bukhârî et Muslim rapportent ceci: «Le Messager
d'Allah (SAW) se fâchait, maudissait, insultait ainsi ceux qui ne le
méritaient pas. Mais il demanda à Allah qu'il en fît un
bien et une purification pour la personne concernée».(29)
4)-
Ils rapportent aussi ce récit: «Quelque juif
ensorcela le Messager d'Allah (SAW) jusqu'à ce qu'IL lui arrivât
d'imaginer qu'il faisait la chose alors qu'il n'en était rien».(30)
5)-
Muslim rapporte ceci: «Le Messager d'Allah (SAW) passa près
d'un groupe de personnes qui étaient en train de ''féconder'' des
dattiers et leur dit: si vous ne le faites pas, ce sera mieux. Ces gens mirent
fin alors à cette opération de fécondation. Quand la
récolte en dattes s'est avérée bien médiocre, le
Prophète se contenta de dire: Vous êtes plus à même
de savoir ce qui arrange les affaires de votre vie (d'ici-bas)».(31)
6)-
Al-Bukhârî et Muslim rapportent aussi ceci: «Le
Messager d'Allah (SAW) écoutait des filles d'Al- Ançâr qui
chantaient jusqu'à ce qu'Abû Bakr les
éloignât».(32)
7)-
Muslim rapporte ceci: «Le Messager d'Allah (SAW) porta un jour
Aïsha sur son épaule afin qu'elle puisse regarder les Abyssins qui
jouaient dans la Mosquée, jusqu'à ce que 'Umar les
grondât».(33)
Dans
la version d'At-Tirmidhî: «Soudain il ('Umar) surgit; les gens
alors se dispersèrent ce qui fit dire au Messager d'Allah (SAW): j'ai vu
des démons tant parmi les djinns que parmi les Humains s'enfuir devant
'Umar».(34)
Dans
une autre version: «Au retour d'une de ses batailles, une esclave noire
joua du tambour et chanta devant le Messager (SAW). Quand 'Umar fut
entré, elle mit le tambour sous son séant et s'assit dessus. Le
Messager d'Allah dit alors: Certes, Satan te craint, ô 'Umar!».(35)
8)-
Al-Bukhârî et Muslim rapportent à partir de Aïsha que: «Lorsque
le Prophète (SAW) entendit une fois un homme réciter du Coran
dans la Mosquée, il dit: Qu'Allah lui accorde Sa grâce, il vient
de me rappeler le verset "tel" que j'avais amputé de la
sourate "telle"».(36)
Ces
hadiths (et un tas d'autres similaires) affirment que le Messager d'Allah (SAW)
était, avant l'Islam, inférieur à Zayd, que par
après, Waraqah le chrétien savait plus que lui au sujet de la
Révélation et de Gabriel, qu'Abû Bakr et 'Umar
évitaient le divertissement et les futilités mieux que ne le
faisait le Messager d'Allah (SAW), que le Compagnon qui, par sa
récitation, rappela ce que le Messager avait amputé du Coran
avait une mémoire plus fidèle que celle du Prophète, et
que celui-ci était comme le commun des mortels, faillible et sujet aux
moqueries des juifs et à leur sorcelleries et qu'il s'emportait et
insultait celui qui ne le méritait pas.(37)
Ainsi
quiconque croit en l'authenticité de ces hadiths ne peut qu'avoir une
conception diamétralement opposée au contenu des hadîths
que nous avons signalés auparavant, c'est à dire ceux
d'après lesquels Allah dota exclusivement le sceau de Ses
Prophètes de vertus nombreuses. Autrement dit, c'était cette
conception dénigrante qui fit dire à l'homme (de science)
saoudien que «Muhammad était un homme comme moi, qu'il est
mort».
Outre
ces hadiths dégradants cités ci-dessus, il y a, dans la
mémoire des gens, l'acte perpétré par le calife 'Umar b.
Al-Khattâb, qui, selon une interprétation personnelle, ordonna de
couper l'arbre sous lequel le Messager d'Allah (SAW) reçut
l'allégeance des Musulmans (voir les détails de ce récit
dans le commentaire de Nahj Al-Balâghah
d'Ibn Abîl-Hadîd 1/59).
Nous
soulignerons plus loin lors de l'étude consacrée aux sources de
la Shari'ah islamique, les diverses tentatives du pouvoir dans les
Etats Musulmans pour hausser aux yeux des Musulmans le statut du calife
au-dessus de la prophétie. Contentons-nous ici de citer un seul exemple,
celui d'Al-Hajjâj b. Yûssuf Ath-Thaqafî, gouverneur sur
l'Irak du calife 'Abdel-Malik b. Marwân, à savoir Al-Hajjâj
b. Yûssuf, lors d'un sermon à Kûfah, critiqua les
pèlerins qui se recueillaient à Médine auprès du
Tombeau du Messager (SAW): «Malheur à eux, ils tournent autour de
lattes et de vieux ossements! Qu'ils tournent autour du palais du Commandant
des Croyants Abdel-Malik! Ne Savent-ils pas que le représentant d'un
homme a plus de valeur que son envoyé?».(38)
De nos
jours, l'esprit de dénigrement qu'on rencontre chez certains musulmans
au sujet du Prophète (SAW) n'est que le résultat de ces tentatives
malveillantes perpétrées au cours des siècles tant au
niveau des récits dégradants qu'ils ont rapportés
qu'à celui de l'exégèse et de l'interprétation
qu'ils inculquaient aux Musulmans afin de les orienter là où ils
voulaient. En fait partie leur opinion au sujet de la célébration
de l'anniversaire (Al-Mawlid) du Messager (SAW).
- V -
Les Divergences
Relatives
à la
Commémoration:
des
Prophètes (a. s) et
des Saints
Serviteurs d'Allah
Dans
l'exposition de l'opinion opposée à cette commémoration,
il suffit de citer la fatwa (l'avis religieux) du sheikh 'Abdel'Aziz
b. Bâz, le président général des directions des
études scientifiques, de l'émission d'avis religieux, de la Da'wah
et de l'instruction islamique, en Arabie saoûdite. A ce propos, il dit:
«il n'est pas permis de fêter ou célébrer
l'anniversaire du Messager (SAW) ou de quelqu'un d'autre, car cela fait partie
des innovations...».(39)
Quant
à ceux qui recommandent par contre cette commémoration en Islam,
ils justifient cette recommandation par le fait que la plupart des rites du
pèlerinage sont en fait des formes de commémoration des
prophètes et alliés d'Allah (saints), comme le montrent les
exemples suivants:
1- Maqâmu - 'Ibrâhîm (la station
d'Abraham)
Allah
- exalté soit-il - dit:
«...Prenez
la station d'Abraham comme lieu de prière...». (V. 125/II)
Ainsi,
comme il est clair, Allah - glorifié soit-IL, ordonna aux gens de
chercher bénédiction là où se tenait
Ibrâhîm (a. s.) dans la demeure sacrée et d'en faire un lieu
de prière, en guise de commémoration de ce Prophète et
pour la perpétuation de ce nom. Cela n'est donc en rien entaché
de polythéisme.
Allah
exalté soit-IL dit:
«Al-çafâ
et Al-Marwah comptent vraiment parmi les choses sacrées d'Allah. Celui
qui fait le grand pèlerinage à la Maison ou bien le petit
pèlerinage, ne commet pas de péché s'il accomplit les
circuits rituels ici et là». (V. 128/II)
Ainsi
Allah institua la course rituelle entre Al-Çafâ et d'Al-Marwah
comme étant un rite à accomplir lors du pèlerinage en
commémoration de Hâjar, la mère d'Ismâ'îl (a.
s.), qui allait (à la recherche de l'eau) entre Al-Çafâ et
Al-Marwah. Il est recommandé, lors de l'accomplissement de ce rite,
d'aller plus vite (accélérer le pas) au lieu indiqué de la
vallée entre Al-Çafâ et Al-Marwah tel un être humain
essoufflé en souvenir de Hâjar (a. s.) et de sa course à
cet endroit.
3- La lapidation (le jet rituel des cailloux)
Ahmed
et At-Tayâlissî rapportent dans leurs musnads respectifs
que le Messager d'Allah (SAW) dit: «Gabriel emmena Ibrâhîm
(a. s.) jusqu'à Jamratul-'Aqabah et quand Satan
lui apparut, il le lapida avec sept cailloux; alors Satan s'enfonça dans
la terre. Quand il arriva à la Jamrah médiane, Satan lui apparut
de nouveau. Ibrâhîm le lapida avec sept cailloux. Alors, Satan
s'enfonça. Enfin, à la dernière Jamrah, ce dernier se
manifesta encore et Ibrâhîm (a. s.) lui jeta sept autres cailloux.
Satan s'enfonça...».(40)
Ainsi
font partie des rites du pèlerinage la commémoration de la
lapidation de Satan par Ibrâhîm et la célébration du
nom de ce dernier.
Allah
- exalté soit-IL - dit au sujet de l'histoire d'Ibrâhîm et
d'Ismâ'îl (a. s.):
«Nous
lui avons alors annoncé une bonne nouvelle: la naissance d'un
garçon longanime. Quand celui-ci fut en âge d'accompagner son
père, celui-ci dit: Ô mon fils! Je me suis vu moi-même en
songe en train de t'immoler. Considère ce que tu en penses! Il dit:
Ô mon père! Fais ce qui t'est ordonné. Tu me trouveras
patient, si Allah le veut. Après que tous deux se furent soumis et
qu'Abrâhâm eut jeté son fils, le front à terre, Nous
lui criâmes: Ô Abrâhâm! Tu as cru en cette vision et tu
l'as réalisée; c'est ainsi que Nous récompensons ceux qui
font le bien. Voilà l'épreuve concluante. Nous le
libérâmes contre un sacrifice solennel. Nous avons
perpétué son souvenir dans la postérité. Paix sur
Abraham...». (Vs. 100 - 109/ XXXVII)
Ainsi
fait partie des rites du pèlerinage la perpétuation du souvenir
du sacrifice d'Ismâ'îl (a. s.) par son père
Ibrâhîm (a. s.) qui reçut en rachat de son fils un
bélier envoyé par Allah. Les pèlerins, en
commémoration d'Ibrâhîm et de son obéissance à
Allah, se rendent à Minan et offrent des sacrifices.
5- La bénédiction s'étend
d'Adam (a. s.) - Sa commémoration
Certains
récits rapportent qu'Allah - glorifié soi-IL - pardonna à
Adam (a. s.) au crépuscule du neuvième jour du mois Dhul-Hijjah
à 'Arafat. Ensuite Gabriel (en guise de déferlement de 'Arafat
à Muzdalifah) emmena Adam (a. s.) au coucher du soleil au lieu
sacré: Al-Mash'arul-Harâm où il passa la nuit (la veille du
10e jour et de la fête du sacrifice) à invoquer Allah et à
Le louer et Le remercier d'avoir accepté son repentir. De là il
l'emmena le matin à Minan où il coupa ses cheveux, cet acte
concrétisant l'agrément d'Adam et sa libération de ses
péchés. Ce jour (le 10e du mois Dhul-Hijjah) sera
commémoré en fête ('îd) par Adam et sa
descendance. Les actes rituels d'Adam pendant ces jours sont ainsi
perpétués dans le temps et dans les lieux du pèlerinage
pour la postérité qui reçoit le pardon d'Allah le soir du
9e jour à 'Arafat, se rend à Al-Mash'arul-Harâm pour y passer
la nuit dans l'invocation avant d'aller à Minan pour s'y faire couper
les cheveux le 10e jour du même mois. A ces rites perpétués
en souvenir d'Adam (a. s.) furent ajoutés ceux vécus par
Ibrâhîm, Ismâ'îl et Hâjar (a. s.).
Tous
les actes du pèlerinage cristallisent donc la recherche de la
bénédiction par le souvenir de ces temps et dans ces lieux
sacrés où passèrent de saints serviteurs d'Allah. Leur
commémoration sera donc perpétuelle et consistera, pour nous,
dans la lecture par exemple de la biographie authentique du Messager d'Allah
(SAW), la veille de son anniversaire, le don de la nourriture dans la voie
d'Allah dont la rétribution sera dédiée au Prophète
(SAW)... et non dans la pratique de certains actes d'innovation, forgés
à l'occasion par certains sûfis.
- VI -
La Divergence relative
à la Construction
des Tombeaux et
des Mausolées élevés
sur les Tombes des
Prophètes (a. s.) et
à la
Validité de la Prière faite en ces Lieux
Ceux
parmi les Musulmans qui interdisent ce genre de constructions se basent sur un
ensemble de récits dont celui rapporté par Ahmed b. Hanbal
à partir de 'Ali (a. s.) qui aurait dit: «Le Messager d'Allah
(SAW) assistait à des funérailles quand il dit à ses
Compagnons: Qui parmi vous ira à Médine pour y casser toutes les
idoles, aplatir toutes les tombes et salir toutes les images? Un homme dit:
Moi, ô Messager d'Allah! Une fois, arrivé à Médine,
cet homme craignit ses habitants et revint (sans avoir exécuté
l'ordre), 'Ali dit alors: Moi, j'irai le faire, ô Messager d'Allah! -
Oui, vas-y dit-il. Quand 'Ali retourna auprès de lui, il dit: Ô
Messager d'Allah! C'est fait (j'ai cassé toute idole, aplati toute tombe
et sali toute image)».
Ce
récit est rapporté dans plusieurs livres de hadith dont Al-Musnad
où il est sous sa forme, la plus complète .(41)
Premièrement: Nous verrons
que le Messager (SAW) se rendit à la tombe de sa mère, pleura et
fit pleurer ceux qui étaient autour de lui. Sa mère était
morte à Médine quand il avait six ans. C'était donc après
plus de quarante ans que le Messager, après avoir immigré
à Médine, s'est recueilli sur la tombe de sa mère, dont la
trace était encore manifeste à cette époque (sinon il ne
l'aurait pas reconnue). Si alors la position de l'Islam était d'aplanir
les tombes pourquoi le Prophète (SAW) n'a-t-il pas ordonné en ce
moment de démolir celle de sa mère?
Deuxièmement:
Quand certains Médinois eurent embrassé l'Islam, le
Messager d'Allah (SAW) envoya d'abord Muç'ab b. 'Umayr afin qu'il leur
apprît les enseignements de l'Islam. Ensuite, quand ils se rendirent en
pèlerins à la Mecque, ils prêtèrent serment
d'allégeance en cachette au Prophète (SAW) à Al- 'Aqabah,
ce qui veut dire que l'Islam ne s'est vraiment propagé parmi les
Médinois qu'après l'émigration du Messager (SAW) suivi,
après quelques jours, par l'Imam 'Ali (a. s.). Après la
conclusion des pactes avec les tribus juives (Quraydha-Banûn-Nadir et
Banû Qaynûqâ') le pouvoir du Messager (SAW) gagna,
progressivement, Médine. A quel moment donc, l'Imam 'Ali (a. s.) fut-il
envoyé, lors de quelques funérailles, par le Prophète
(SAW) afin qu'à Médine il démolît les idoles,
aplanît les tombes et barbouillât les images en
délégué de gouvernement totalement maître de la
situation??
En
plus, selon le récit, un premier homme fut envoyé à cet
effet lors de ces funérailles mais il revint de Médine sans y
avoir exécuté l'ordre du Prophète. Celui-ci, alors, envoya
l'Imam 'Ali (a. s.), toujours pendant ces mêmes funérailles, pour
accomplir à Médine ce que son prédécesseur ne put
faire. Comment fut-ce possible?
Troisièmement: Dans la suite
du hadith en question, il est stipulé que l'Imam 'Ali (a. s.) dit
à Abil-Hayaj Al-Assadî: Je t'envoie comme le Messager d'Allah
(SAW) m'avait envoyé en vue de faire disparaître toutes les
idoles.(42)
Or,
l'Imam ne pouvait envoyer cet homme en mission qu'à l'époque de
son califat; mais quand était-ce? Après les conquêtes
islamiques? A l'époque des trois califes ou avant? Où l'a-t-il
envoyé? Pour détruire les tombeaux et faire disparaître les
idoles?
Enfin,
dans les deux récits, s'ils sont authentiques, tant l'ordre du Messager
(SAW) que celui de l'Imam 'Ali (a. s.) visaient la destruction des tombeaux des
polythéistes en terre polythéiste; comment cela peut-il signifier
l'étendue du décret pour qu'il englobe les tombeaux musulmans et
l'obligation de les détruire? On rapporte ainsi que le Prophète
(SAW) dit: «Ô Seigneur, ne permets pas que ma tombe soit une idole!
Qu'Allah punisse ceux qui prennent pour lieux de prosternation (masâjid)
les tombes de leurs prophètes».(43)
Dans
une autre version, le récit spécifie le peuple dont il s'agit:
«Allah maudit les juifs! Ils prirent les tombes de leurs prophètes
comme lieux de prière (masâjid)».(44)
Après
être sortis de l'Egypte, les Juifs traversèrent la mer et,
après avoir erré (dans le pays) ils arrivèrent en
Palestine où ils eurent un temple, celui de Jérusalem à
l'exclusion de tout autre lieu de prière. Après, il y eut le
temple de Salomon. Où étaient donc ces tombes de prophètes
dont ils firent des lieux de prière, le temple de Jérusalem et
tout le pays ayant été connus des Musulmans et des Arabes avant
l'avènement de l'Islam? Quant aux tombes des autres prophètes
telle celle d'Al-Khalîl et celle de Mûssâ, nous n'avons ni vu
ni entendu que les Juifs dont aucun d'eux n'avait écrit une chose
semblable en firent un objet d'idolâtrie. Si, quand bien même ils
le faisaient, cela ne correspondrait nullement à la position islamique:
respecter la tombe et lui rendre visite. En faire une idole serait s'orienter
vers elle, la considérer comme «qiblah», telle la Ka'bah -
dans nos prières. Les deux attitudes sont-elles identiques?
Ce ne
sont pas les hadiths du Messager d'Allah (SAW) qui sont (ou qui seront) l'objet
de doute loin s'en faut, mais plutôt la parole des rapporteurs de
récits qui ne sont pas infaillibles et sont donc sujets à
l'erreur, à l'inadvertance et à l'oubli.
Voici,
à présent, les arguments de ceux qui considèrent que la
construction des tombeaux est, par contre, en concordance avec la Shari'ah
islamique.
Arguments en faveur de la prise des
Mausolées des prophètes pour des lieux de
prière
Il est
unanimement admis par les Ulémas de la Communauté islamique que
le rite de la circumambulation (autour de la Ka'bah) se fait aussi autour du
Hijr d'Ismâ'îl (a. s.) contre le mur duquel se frottent les
pèlerins et qui abrite aussi les deux tombes d'Ismâ'îl et de
Hâjar, sa mère.
Il est
utile, à ce propos, de se rapporter aux livres suivants.
Ceux
de l'Ecole des califes
La
Sîrah (biographie) d'Ibn Hichâm (mort en 218h), L'Histoire
d'At-Tabarî (mort en 310h), Ibnul-Athîr (m. 630h), Ibn Kathîr
(m. 774).
Selon
Ibn Hichâm: Ismâ'îl fut enterré dans l'enceinte du
Hijr avec sa mère Hâjar. Quant à Ibn Kathîr, il dit:
Ismâ'îl recommanda en testament qu'on l'enterrât
auprès de la tombe de sa mère dans Al-Hijr.(45)
D'après
les livres de l'Ecole d'Ahlul-Bayt
Dans Al-Kafî
d'Al-Kulaynî (mort en 329 h.), dans Man Lâ
yahduruhul-Faqîf et 'Ilalish-Sharâ'i'
d'As-çadûq (m. 381 h.), Al-Wâfî d'Al Fayd (m.
1089 h.) et Al-Bihâr d'Al Majlissî (m. 1111 h.):
«C'est dans Al- Hijr que se trouvent la tombe de Hâjar et celle
d'Ismâ'îl (a. s.)».(46)
On
avance aussi, à ce propos, le verset suivant:
«Prenez
donc la station d'Ibrâhîm comme lieu de prière...».
(V. 125/II)
Et cet
autre verset relatif aux "Gens de la Caverne":
«Ceux
dont l'avis prévalut dirent: Elevons un sanctuaire au-dessus d'eux».
(V. 21/XVIII)
Les
Wahhabites qui taxent de qubûriyyîne les Musulmans qui
rendent visite aux tombeaux des prophètes, des Compagnons et des Imams
devraient donc dire la même chose du Sceau des prophètes (SAW), de
ses compagnons et des prophètes qui pratiquaient la circumambulation
autour d'Al-Hijr où furent enterrés Hâjar,
Ismâ'îl (a. s.) et certains de ses descendants!!
C'était
donc un aperçu sur les divergences relatives aux hadiths concernant la
construction des tombeaux et au sens qu'on devait lui attribuer.
Ci-après
un aperçu sur la divergence relative aux pleurs et aux lamentations sur les mort.
-VII -
L'Origine de la
Divergence relative
aux Pleurs
versés sur le Mort
Pleurer un mort surtout s'il s'agit d'un martyr
relevait de la sunnah du Messager d'Allah (SAW) comme le rapporte
Al-Bukhârî dans son Sahîh: «Le Prophète
(SAW) annonça aux gens la mort de Zayd, de Ja'far et d'Ibn Rawâhah
bien avant que ne parvînt la nouvelle par les voies normales. Il dit
alors: Zayd, Ja'far et Ibn Rawâhah prirent tour à tour
l'étendard puis furent atteints l'un après l'autre. Ses yeux (du
Prophète) se fondirent en larmes.... Asmâ', l'épouse de
Ja'far lui demanda alors: Par mon père et ma mère, qu'est-ce qui
te fait pleurer? As-tu appris quelque chose sur Ja'far et ses compagnons? -
Oui, répondit-il, ils sont atteints aujourd'hui. Je me suis levée
en criant, raconta Asmâ', et je suis allée réunir les
femmes. Fatima Az-Zahrâ' entra en pleurs et répétait: wâ
'Ammâh (ô cher oncle!). Le Messager d'Allah (SAW) ajouta:
c'est sur quelqu'un comme Ja'far que doivent pleurer les pleureuses!».(47)
Le Messager (SAW)
pleure son fils Ibrâhîm
Dans le recueil de Bukhârî, Anas (r.
d.) rapporte ce récit: «Nous entrâmes avec le Messager
d'Allah (SAW)... alors qu'Ibrâhîm rendait les derniers soupirs. Les
yeux de l'Envoyé d'Allah (SAW) fondirent en larmes. Abdar-Rahmân
b. 'Awf lui dit alors: Toi aussi, ô Messager d'Allah! Il répondit:
Ô! Ibn 'Awf c'est une miséricorde; puis il ajouta: l'il pleure, le
cur se chagrine mais nous ne disons que ce qu'il plaît à Allah.
Nous sommes, en effet, très affligés par ton départ,
ô Ibrâhîm!».
Dans les Sunan d'Ibn Mâjah; «Il (le
Prophète SAW) s'est penché sur lui et pleurait».(48)
Le Prophète
(SAW) pleurait sur la tombe de sa mère jusqu'à faire pleurer ceux
qui étaient avec lui.(49)
Le Prophète (SAW) désigne les
jours de deuil à la mort de quelqu'un
Il est très répandu que le
Prophète (SAW) avait permis à la femme de porter le deuil pendant
trois jours si le parent décédé était quelqu'un
d'autre que son mari. Si c'était lui la durée du deuil est celle
précisée par le verset 234/II: quatre mois et dix jours.(50)
L'origine de la divergence relative à
cette question
Nous avons vu que pleurer un mort, porter le
deuil et donner de la nourriture à sa famille relèvent de la
sunnah du Messager (SAW). Mais d'où viennent alors la divergence et
l'interdiction de pleurer les morts? La réponse se trouve dans les deux
recueils d'Al-Bukhârî et de Muslim où l'interdiction est
attribuée au calife 'Umar (r. d.).
Ils y rapportent ce récit à partir
d'Ibn 'Abbâs: «Quand 'Umar fut atteint (assassiné), Suhayb
entra chez lui en pleurant et répétait: Ô frère,
Ô compagnon! 'Umar lui dit alors: Suhayb! Pleures-tu sur moi alors que le
Messager d'Allah (SAW) a dit que le mort se tourmente à cause des pleurs
des siens? Quand 'Umar fut mort, dit Ibn 'Abbâs, j'ai rapporté ses
dires à Aïsha qui dit: Qu'Allah accorde Sa grâce à
'Umar! Par Allah! Le Messager n'a pas dit qu'Allah tourmente le mort croyant
à cause des pleurs des siens. Mais Allah augmente le châtiment du
mécréant à cause des pleurs des siens. Elle ajouta aussi:
Le Coran vous suffit: «Aucune âme pécheresse ne portera
le faix d'une autre». (V. 18/XXXV)
»Ibn 'Abbâs ajouta alors: «C'est
Lui Qui fait rire et pleurer». (V. 43/LIII).(51)
De même, dans le recueil de Muslim, il est
rapporté qu'on a évoqué, chez Aïsha, le récit
d'Ibn 'Umar d'après lequel le Prophète (SAW) aurait dit:
«Le mort se fait châtier à cause des pleurs des siens.
Aïsha dit alors: Erreur, voici ce que dit le Messager d'Allah (SAW): Il
(le mort) se fait châtier à cause de ses péchés
alors que les siens sont en train de le pleurer!»
Dans une autre version, Aïsha dit:
«Qu'Allah accorde Sa grâce d'Abî-Adar-Rahmân (Ibn
'Umar): il a entendu le récit mais il ne l'a pas retenu; il ne
s'agissait que d'un cortège funèbre juif qui passe avec des
pleurs près du Messager (SAW) qui remarqua: Vous le pleurez et lui se
fait châtier maintenant».
Il paraît donc - comme le montre le hadith
ci-dessous - que l'origine de la divergence réside dans le point de vue
du calife 'Umar qui interdisait les pleurs sur les morts en opposition avec la
tradition du Messager (SAW): «Lorsqu'un membre de la famille du
Prophète (SAW) mourut, les femmes se réunirent pour le pleurer.
'Umar se mit alors, une fois, à les réprimander et à les
disperser. Le Messager d'Allah (SAW) intervint alors et dit: Laisse les, 'Umar!
Les yeux pleurent, le cur s'afflige et le leur vient à peine de les
quitter».(52)
Al-Bukhârî rapporte aussi que 'Umar
(r. d.) frappait de sa canne, lançait des cailloux ou du sable à
celui ou celle qui pleure un mort.(53)
- VIII -
Versets
Coraniques dont
l'Interprétation est l'Objet de Divergence
A- L'invocation de
quelqu'un d'autre qu'Allah
Sheikh Muhammed b. Abdel-Wahhâb, fondateur
de l'Ecole wahhabite dit dans son livre Les trois fondements et leurs
arguments, p. 4:
«Sache qu'Allah t'accorde Sa grâce,
que tout Musulman et toute Musulmane doivent apprendre ces trois questions et
les pratiquer.(54)
1)- Allah nous créa
2)- Allah n'aime pas en matière de culte
qu'on Lui associe quelqu'un d'autre, que ce soit un ange très proche ou
un prophète envoyé (aux humains). Le prouve ce verset coranique:
«Les Moquées appartiennent à Allah, n'invoquez donc
personne à côté d'Allah». (V. 18/LXXII)
Ils (les wahhabites) entendent par l'invocation
de quelqu'un d'autre qu'Allah le fait que le Musulman dise par exemple:
(Ô Messager d'Allah! (ou un autre allié d'Allah), en vue de le
faire intercéder en sa faveur. Tous leurs arguments reposent sur les
versets susmentionnés.
B- Le jugement de
quelqu'un d'autre qu'Allah
Selon eux, il est aussi condamnable que
l'invocation de quelqu'un d'autre qu'Allah. Leurs antagonistes
s'étonnent de voir cette ressemblance frappante entre l'argumentation
wahhabite et celle des Khawârij (les dissidents à l'époque
de l'Imam 'Ali (a. s.) qui taxèrent de renégats ceux qui avaient
accepté l'arbitrage à Siffine. En effet, les deux camps
s'appuient sur des versets tels:
«... Le jugement n'appartient
qu'à Allah. Je me confie en Lui. Qu'en Lui se confient ceux qui s'en
remettent entièrement à Lui». (V. 67/XLL)
«Chercherai-je un autre qu'Allah comme
arbitre alors que c'est Lui Qui a fait descendre vers vous l'Ecriture?
...»
En réponse aux arguments wahhabites,
leurs adversaires disent que les versets du Coran se clarifient les uns les
autres. Ainsi, si l'on trouve dans le Coran: «Le jugement
n'appartient qu'à Allah», on trouve aussi ce verset:
« ... Juge entre eux ou bien
détourne-toi d'eux, s'ils viennent à toi. Si tu te
détournes d'eux, ils ne te nuiront en rien. Si tu les juges, juge-les
avec équité ...». (V. 42/V)
Par ce verset, Allah permet à Son
Messager de juger, d'arbitrer entre les Gens du Livre (Juifs). Dans un autre
verset, il s'agit même de chercher l'arbitrage d'un particulier:
«Si vous craignez la séparation
entre des conjoints, suscitez un arbitre de la famille de l'époux et un
arbitre de la famille de l'épouse. Allah rétablira la concorde
entre eux deux, s'ils veulent se réconcilier». (V. 35/IV)
Nulle contradiction donc entre ces versets.
Celui qui stipule que le jugement appartient à Allah n'enseigne pas que
ce jugement est similaire à celui des juges humains dans leurs
tribunaux. Celui-ci est circonscrit, en conformité avec les lois en
vigueur et limité aux personnes intéressées. Ces juges ne
sont pas habilités à désigner des juges en leur nom, ce
pouvoir étant celui d'une autorité supérieure. Autrement
dit, les juges humains ne disposent pas du jugement absolu mais seulement de
celui (relatif) de juger entre leurs semblables. Quant à Allah, IL juge
selon Sa Science et Son Pouvoir, permet à qui IL veut de juger dans Sa
Royauté et dans les limites qu'il veut car c'est à Lui
qu'appartient le jugement absolu. Ainsi quand les prophètes jugent, ils
le font en dépendance avec le Jugement d'Allah. Ceux qui cherchent en
arbitres à trancher le différend de deux conjoints, quand ils le
font conformément aux bois d'Allah, n'appliquent pas le jugement de
quelqu'un d'autre qu'Allah, ne le font pas non plus
à l'exclusion d'Allah ou contre Sa volonté ou en concomitance
avec Lui. Ils jugent selon Son ordre et après Son autorisation. Comme
pour le jugement d'Allah, Ses autres attributs, dont des exemples vont suivre,
ne souffrent d'aucune limite puisqu'ils sont absolus.
La Royauté appartient à Allah
Entre ce verset: «La Royauté
des cieux et de la terre et de ce qui est entre les deux appartient à
Allah. Le retour final se fera vers Lui» (V. 18/V),
et celui-ci:
«... Et ce que détiennent vos
mains», (Vs. 3, 24, 25, 36/IV),
il n'y a pas de contradiction puisque Allah -
glorifié soit-IL - dit:
«Ô Allah, Souverain du Royaume!
Tu donnes la royauté à qui Tu veux et Tu enlèves la
royauté à qui Tu veux. Tu honores qui Tu veux et Tu abaisses qui
Tu veux. Le bonheur est dans Ta main. Tu es, en vérité, Puissant
sur toute chose». (V. 26/III).
Le Créateur, Celui Qui ressuscite les
morts
Ainsi «Allah est Créateur de
toute chose» (V. 102/VI) et «C'est Lui
Qui fait vivre et Qui fait mourir». (V. 80/XXIII)
Ces deux versets ne sont pas contredits par
celui selon lequel Allah permit à Jésus (a. s.) de créer
et de faire vivre:
«Je suis venu à vous avec un
signe de votre Seigneur: je vais, pour vous, créer d'argile comme une
forme d'oiseau. Je souffle en lui et il est "oiseau" - avec la
permission d'Allah. Je guéris l'aveugle, le muet et le lépreux;
je ressuscite les morts avec la permission d'Allah». (V. 49/III)
L'Intercesseur, Le Maître
Quand on lit ce verset: «Prendront-ils
des intercesseurs en dehors d'Allah? Dis: Et s'ils ne possèdent rien,
s'ils ne comprennent pas? Dis: l'intercession appartient à Allah. A Lui
la Royauté des cieux et de la terre! Vous retournerez vers Lui».
(Vs. 42-43/XXXLX)
Et cet autre verset :
«... Il n'y a d'intercesseur qu'avec
Sa permission ...» (V. 3/X)
Nous comprenons que l'intercession appartient
à Allah, qu'IL permet à Ses saints serviteurs d'intercéder
et qu'ils ne le font pas en dehors de Lui.
Ce verset qui dit:
«La Royauté des cieux et de la
terre appartient à Allah. IL fait vivre et IL fait mourir. Vous n'avez,
en dehors d'Allah, ni maître, ni défenseur» (V.
116/IX), n'est nullement en contradiction avec cet autre verset:
«Vous n'avez pas de Maître en
dehors d'Allah, de Son Messager et de ceux qui croient: ceux qui s'acquittent
de la prière, qui font l'aumône tout en s'inclinant humblement».
(V. 55/V)
Par conséquent, si nous disons qu'Allah
est notre Maître ainsi que Son Messager et celui qui fait l'aumône
en état de génuflexion parmi les croyants, cela ne relève
en rien du polythéisme parce que la souveraineté
(Autorité) appartient exclusivement à Allah Qui l'accorde
à Son Prophète et à Ses alliés, à l'instar
de l'autorité que détient le père sur son enfant.
L'invocation du Messager (SAW) par Laquelle on
cherche accès auprès d'Allah
Comme nous avons vu qu'un juge, un
propriétaire, un intercesseur, un créateur, un maître ou
quelqu'un qui fait vivre ou fait mourir, ne jouit de son statut que par la
permission d'Allah et non, en dehors de Lui ou avec Lui, de même
l'invocation du Prophète (SAW) par laquelle on cherche accès
auprès d'Allah ne signifie en aucun cas l'invocation en dehors de Lui ou
avec Lui, de personne d'autre que Lui. C'est à dire que l'invocation du
Prophète (SAW) n'est pas une application de ce verset:
«N'invoquez donc personne à
côté d'Allah». (V. 18/LXXII)
Rappelons, à ce propos, le hadith
authentifié par les traditionnistes, rapporté par Ahmed,
At-Tirmidhî, Ibn Mâjah et Al-Bayhaqî, selon lequel le
Messager d'Allah (SAW) enseigna à un Compagnon aveugle une invocation
qu'il devait faire après la prière: «Ô Allah, je Te
demande en m'appuyant sur Ton Prophète Muhammad! Le Prophète de
la miséricorde, ô Muhammad par Ta personne, je t'implore Allah
pour qu'IL me satisfasse. Ô Allah accepte son intercession en ma faveur!»
Après l'intercession du Messager et
l'invocation de cet homme, Allah exauça son vu et le guérit.
Cette forme d'invocation par le Prophète (SAW) est une application de
ces deux versets:
«Ô vous, qui croyez! Craignez
Allah et recherchez les moyens d'aller à Lui ...» (V. 35/V)
«Ceux-là mêmes qu'ils
invoquent recherchent le moyen de se rapprocher de leur Seigneur ...»
(V. 57/XVII)
Après avoir passé en revue ces
exemples de divergence et leur origine apparente, il s'agit d'en étudier
le véritable mobile sous-jacent, à savoir deux raisons
principales:
* * * * *
L'ORGUEIL ÉTERNEL DES ÊTRES HUMAINS
Le besoin ressenti par le pouvoir exercé
au sein de la communauté musulmane de justifier la conduite luxurieuse
et dissolue "des gouverneurs" par la présentation des vies des
prophètes qui servent de modèles à l'humanité,
comme étant conformes à la leur.
1- Le premier mobile
à l'origine des divergences susmentionnées
a)- Au début de la Création, Allah - exalté soit-IL - raconta dans le
Coran ce qui s'était passé entre Adam (a. s.) et Satan:
«Allah dit: Ô Iblîs,
qu'est ce qui t'a empêché de te prosterner devant celui que j'ai
crée de Mes mains? Est-ce l'orgueil ou bien fais-tu partie des
êtres les plus élevés? Il dit: je suis meilleur que lui: Tu
m'as créé de feu et Tu l'as créé d'argile».
(Vs. 75-76/XXXVIII)
Dans un autre verset, il (Satan) dit: «je
n'ai pas à me prosterner devant un mortel que Tu as créé
d'une argile extraite d'une boue malléable». (V. 33/XV)
Iblîs (Satan) avait ainsi adoré
Allah durant une vie d'ange puis se rebiffa un jour, refusa de se prosterner
devant l'élu d'Allah et se moqua de lui. La conséquence de son
acte fut ce qu'on sait.
Quant aux humains qui s'enorgueillirent et se
moquèrent des envoyés d'Allah et de Ses élus, le Coran relate
leur histoire comme dans les exemples suivants:
b)- Dans les communautés anciennes:
«Le peuple de Nûh (Noé)
(a. s.) lui dit: Nous ne voyons en toi qu'un mortel
semblable à nous. Nous ne te voyons, à première vue, suivi
que par les plus misérables d'entre nous ...». (V. 27/XI)
«Ceux qui, parmi les chefs de son
peuple étaient incrédules dirent: qui donc est celui-ci sinon un
mortel comme vous? Il veut s'élever au-dessus de vous ...»
(V. 24/XXIII)
«Qui est donc celui-ci sinon un mortel
comme vous? Il mange ce que vous mangez, il boit ce que vous buvez ...»
(V. 33/XXIII)
Comme le peuple de Nûh, 'Âd et
Thamûd dirent à leurs prophètes: «vous
n'êtes que des mortels comme nous!» (V. 10/XIV)
La réponse des prophètes fut celle
que relate le Coran dans ce verset:
«Leurs prophètes leurs dirent:
Nous ne sommes que des mortels comme vous mais Allah accorde Sa grâce
à qui IL veut parmi Ses serviteurs» (V. 11/XIV)
c)- A
l'époque du Sceau des prophètes (SAW): Dans son livre Al-'Içâbah,
consacré aux biographies des Compagnons du Prophète, Ibn Hajar
cite Dhul-Khuwayçirah, le chef des Kharijites (dissidents) et
rapporte ce hadith à partir de 'Anas:
«Il y avait, à l'époque du
Messager d'Allah (SAW), un homme dont on admirait la dévotion et la
constance dans la pratique du culte. Quand bien même nous avons
signalé son nom et sa description au Prophète (SAW), celui-ci ne
le reconnut point. Soudain, il apparut. Nous dîmes alors: c'est de cet
homme qu'il s'agit. Le Prophète dit alors: vous me parlez, en
vérité, d'un homme portant au visage la marque de Satan. Quand
l'homme arriva, il resta debout et ne salua pas. Le Prophète lui demanda
alors: par Allah, dis-moi la vérité, quand tu t'es mis debout
près de ce groupe de personnes, t'es-tu dit "parmi eux il n'y a pas
un meilleur que moi?". L'homme répondit alors: par Allah, oui!
Ensuite, quand il fut entré pour faire ses prières, le
Prophète demanda: qui peut tuer cet homme? Qui peut tuer cet homme? ...
S'il avait été tué aucune divergence (en ma religion)
n'aurait pu être suscitée entre deux hommes de ma
Communauté! ...».(55)
d) A notre époque: Cela se manifeste dans des actes et des propos
tels que celui du pédant saoudien déjà cité:
«Muhammad? Un homme comme moi. Et il est mort», (nous disait-il).
C'est l'orgueil qui se trouve à l'origine de cette attitude.
2- Le deuxième
mobile à l'origine des divergences
Il s'agit du besoin ressenti à travers
les siècles par les autorités qui exerçaient le pouvoir
dans la Communauté musulmane de justifier leur mode de vie luxurieuse en
le présentant comme étant conforme à celui des
prophètes et des élus d'Allah.
Ces factures ont tellement joué dans
l'histoire musulmane qu'on en est venu à l'interprétation de
nobles versets coraniques de la manière qui permettrait l'attribution
des péchés aux prophètes et aux élus d'Allah. Des
récits furent aussi inventés pour montrer ces derniers dans les
jeux et la volupté. Souvent les fabriquants de récits puisaient
leur matière dans la littérature israélite telle l'anecdote
rapportée au sujet de Dâûd (a. s.) (David) et de la femme
d'Urie(56) et un tas d'autres
fabulations racontées sur le compte des prophètes (a. s.) y
compris celles collées à la biographie du Sceau des
prophètes (SAW), le but étant de rendre égaux les communs
des mortels et les élus d'Allah qui seraient alors dépourvus de
toute spécificité les distinguant de leurs semblables. Ainsi, les
versets coraniques parlant des miracles des prophètes comme celui de
Jésus (a. s.) qui, par la permission d'Allah, créa à
partir de l'argile un oiseau vivant, furent interprétés en
concordance avec des récits fabriqués en vue de confirmer
l'hypothèse selon laquelle les élus d'Allah ne jouissent point de
qualités distinctes.
A l'opposé de cette tendance
expliquée par les mobiles mentionnés ci-dessus, nous trouvons
dans l'exégèse et les livres des hadiths et de la biographie
plusieurs traditions qui confirment l'existence de ces qualités
exceptionnelles accordées par Allah à Ses élus. Un autre
groupe de Musulmans y croit fermement et interprète les versets
coraniques conformément à ces hadiths. Ceci eut pour conscience
l'apparition d'une vision spéciale opposée à la
première tendance et permettant une approche différente des
Attributs divins, des qualités prophétiques, du trône, de
l'Escabeau et des autres vérités islamiques. Chacun des groupes
s'accrocha donc à travers les siècles à ce qu'il croyait
en cette matière et jeta l'anathème contre le point de vue
opposé. D'où la division qui sévit parmi les Musulmans.
page blanc
II ème
Partie
Les Sources de
la Shari'ah
islamique
selon les Recherches
respectives
des Deux Ecoles
Préliminaires
Dans l'histoire de la pensée musulmane,
après la mort du Prophète (SAW), on constate une division nette
entre deux Ecoles opposées: celle du pouvoir en exercice détenu
par les califes (jusqu'au dernier calife ottoman) et celle des Imams
d'Ahlul-Bayt (a. s.) (jusqu'au douzième Imam)(57). Cette discordance est toujours en vigueur entre
ces deux Ecoles et leurs adeptes parmi les Musulmans.
Ci après nous évoquons l'origine
du schisme et donnons quelques exemples de ses aspects.
Les deux Ecoles s'accordent sur la
prééminence du Saint Coran et s'imposent de respecter ses
stipulations sur le licite, l'illicite, l'obligatoire et le recommandable mais
divergent quant à l'interprétation de ses versets en particulier
ceux qui paraissent équivoques (mutashâbihât). Les
deux Ecoles s'opposent aussi au sujet:
1- Des Compagnons
2- De l'Imamat et du Califat en tant que moyen
d'atteindre les sources de la Shari'ah
3- Des sources de la législation
islamique qui viennent après le Coran.
Après une étude
préliminaire de la terminologie consacrée, nous entamerons
progressivement l'étude de ces sources.
La langue arabe - la
terminologie islamique
1- Nous définissons ces trois termes:
a)- La langue arabe,
b)- La terminologie juridique (Shar'î)
ou islamique et
c)- L'appellation islamique.
4)- est consacré à la question du
sens propre et du sens figuré.
A La langue des Arabes:
Nous en parlons en particulier parce qu'elle est
la langue coranique.
La plupart des mots arabes usités
actuellement avaient les mêmes sens avant et après l'Islam;
exemple: manger, dormir, le jour, la nuit ...
Dans cette langue, on trouve aussi des
homophones. Le mot Ghunm par exemple signifiait d'abord l'acquisition
du Ghanam (têtes de troupeau) puis il fut utilisé dans le
sens de gain remporté sans grand effort; ensuite, dans l'Islam, il finit
par signifier le gain tout court c'est à dire obtenu avec ou sans
effort.
Parfois une tribu arabe donne un certain sens
à un mot qui signifie autre chose dans une autre tribu. Ainsi
"Al-Athlab" signifie au Hijâz de la prière et à
Tamîm de la terre.(58) A notre
époque, le mot "mabsût" signifie en Iraq
"battu", frappé et en Syrie, au Liban "gai", joyeux.
Dans ce cas, il faudra alors déterminer d'avance le sens du terme
employé.
B La terminologie Shar'î ou islamique:
Avec l'apostolat du Sceau des prophètes
Muhammad (SAW), celui-ci dut employer des mots arabes ayant d'autres sens que
ceux usités par les Arabes de cette époque. Açalât
(la prière), par exemple, qui signifiait la simple évocation est
employée par le Messager d'Allah (SAW) dans le sens d'un acte religieux
spécifique comportant de paroles particulières
accompagnées de stations physiques différentes telles
l'inclination et la prosternation, ce que les Arabes ne connaissaient pas
auparavant! C'est ce qu'on entend par terminologie Shar'î ou
islamique, que le sens du mot usité soit une modification du sens
initial comme Açalât (prière) ou tout à
fait nouveau comme "Ar-Rahmân", un nom divin
employé par le Législateur islamique. On peut donc définir
le terme islamique comme étant le mot employé par le Saint Coran
ou par le hadîth prophétique. Sans cet emploi, le mot ne saurait
faire partie de la terminologie islamique.
C- La terminologie musulmane usuelle:
On trouve chez les Musulmans des mots
utilisés dans des sens particuliers tels "Lijtihâd"
et "Al- Mujtahid" relatifs respectivement à la
jurisprudence islamique et au faqih musulman (le jurisconsulte, le
docte). Initialement; dans la langue arabe, les deux mots (le substantif et le
participe présent) signifiaient simplement le déploiement
d'efforts (lijtihâd) en vue d'atteindre un but - al-Mujtahid
(le studieux) -. C'est ce dernier sens qu'on trouve dans un certain nombre de
hadîths. Ainsi, le Messager (SAW) dit: «De cent degrés,
l'homme savant dépasse en mérites l'homme studieux».(59)
Dans la biographie du Prophète (SAW), il
est dit: «pendant les dix dernières nuits (du Ramadan), le
Messager d'Allah (SAW) fournissait plus d'efforts (yajtahidu) plus
qu'il ne faisait pendant les autres jours».(60)
Dans le sens de jurisprudence et de
jurisconsulte, les deux mots Ijtihâd et mujtahid ne
figurent ni dans le Sait Coran ni dans le noble hadîth du
Prophète. L'appellation est venue plus tard, c'est à dire qu'elle
est une terminologie musulmane (et non islamique).
Quand la terminologie est répandue en
particulier dans une contrée musulmane telle cette expression: le
jeûne de Zakaria(61), il ne convient
pas de la qualifier de "musulmane" mais il faut spécifier son
lieu d'origine ou l'usage courant en disant par exemple que l'expression
signifie ceci à Bagdad ou au Caire sans pouvoir l'étendre ou la
généraliser.
De même, quand la terminologie est
spécifique à l'un des rites ou des groupes musulmans, il faudra
en préciser l'origine en disant qu'il s'agit par exemple d'une
expression Kharijite ou usitée dans l'Ecole des califes ou dans celle
d'Ahlul-Bayt
Ainsi le mot 'Ashshârî
signifie d'après les Kharijites seulement "Al-Mujâhid"
celui qui fait du jihâd. Mais "Al-Mushrik" (le
polythéiste) signifie tout musulman qui ne partage pas leur opinion et
ne fait pas partie de leur rite.
"Arrâfidî" (le
réfractaire) signifie, d'après l'Ecole des califes, tout adepte
de l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s).
"An-naçibî" (le
rebelle) signifie, d'après cette dernière, celui qui prend les
Imams d'Ahlul-Bayt en aversion.
Si l'on rencontre donc de telles appellations en
dehors des Ecoles où elles sont nées, il ne faudra pas les charger
des significations précédentes.
D- Le sens propre et le sens figuré:
Quand un mot est usité dans un sens
déterminé de telle sorte que seul ce sens est donné au mot
par la personne qui l'entend, tel le mot "lion" qui signifie l'animal
féroce qu'on connaît ou "la prière" qui est pour
tous les Musulmans l'ensemble des actes particuliers accomplis en conjugaison
avec des invocations particulières.
Dans cas on dit que le mot "lion" est
au sens propre dans la terminologie linguistique tandis que le mot
"prière" est au sens propre dans la terminologie Sha'î
(scientifique).
Quand le mot "lion" signifie dans une
phrase "l'homme courageux", il est alors utilisé au sens
figuré mais il est nécessaire alors de trouver dans la phrase ou
dans le contexte un indice susceptible d'orienter l'esprit vers le sens
figuré du terme. Ainsi dans cette phrase: "le lion parlait dans la
mosquée", étant donné que le "lion" (le
fauve) ne parle pas, l'on sait que c'est de l'homme courageux qu'il s'agit et
non de l'animal féroce.
2- La compilation des recueils de langue arabe
Dans les 2è et 3è siècles
de l'hégire, les linguistes qui procédaient à la
compilation de la sémantique arabe notaient pour chacun des termes
étudiés le sens et son évolution depuis l'époque
antéislamique jusqu'au temps où ils vivaient.
Après les sémanticiens, les
jurisconsultes musulmans déployèrent de louables efforts pour
définir la terminologie juridique et en préciser les
données, telles la prière, le jeûne, le pèlerinage
et d'autres. Aussi ces termes sont-ils devenus clairement entendus par tous les
Musulmans. Par contre comme les termes qui ne s'apparentaient pas à la
langue juridique n'avaient pas bénéficié des mêmes
efforts dans leur étude, certains d'entre eux sont encore
méconnus des Musulmans qui, ne sachant pas en définir l'origine
linguistique ou juridique, se trouvent, à cause de
l'ambiguïté des sens, dans l'incapacité se saisir les
concepts islamiques et de connaître les jugements y afférents. A
titre d'exemple, on peut citer, à ce propos, les deux termes de
compagnie et de Compagnons (du Prophète SAW).
Le Premier
Champ de Recherche
Les approches
respectives
des
deux Ecoles
Quant aux termes de compagnie et de Compagnons:
1- La définition du "Compagnon"
donnée par chacune des deux Ecoles
2- L'équité des Compagnons dans
les deux Ecoles
A- La définition
du ''Compagnon'' dans les deux Ecoles
1- Dans l'Ecole des califes
Ibn Hajar dit dans l'introduction de son Içâbah,
chap. 1 (la définition du terme Compagnon): c'est celui qui rencontra le
Prophète (SAW) en croyant en lui puis mourut en musulman. Cela englobe
ainsi ceux dont la compagnie était de longue durée ou courte, qui
avaient ou non rapporté ses hadiths, qui avaient ou non combattu avec
lui, qui l'avaient simplement vu sans pouvoir l'aborder et ceux qui n'ont pu le
voir à cause d'un empêchement quelconque comme la
cécité.(62)
Le même auteur ajoute les
précisions suivantes: Lors des conquêtes
musulmanes seuls des Compagnons étaient chefs
d'expéditions.
En l'an 10 (dix) de l'hégire, tout homme
originaire de la Mecque ou de Tâ'if embrasse l'Islam et participe au
pèlerinage de l'Adieu, effectué par le Prophète (SAW).
A la fin de l'apostolat du Prophète, tous
les membres d'Al-Aws et d'Al-Khazraj (les deux tribus d'Al-Ançars)
étaient devenus musulmans de telle sorte qu'à la mort du
Prophète aucun d'eux ne manifestait d'incrédulité.(63)
Par ailleurs, dans notre livre (150 Compagnons
inventés), le chercheur pourra voir les méfaits de cette
indulgence sur les hadiths prophétiques.
2- La définition du "Compagnon"
dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.)
Selon cette Ecole, le sens du Compagnon est
celui qu'on trouve dans les dictionnaires de langue arabe: As-çâhib,
plur : çahb, Açhâb, çihâb
et çahâbah, celui qui vit avec, qui tient compagnie pour
une durée assez importante.(64)
Comme toute compagnie implique l'existence de
deux personnes au moins, il est évident que le terme compagnon doit
être suivi du complément de nom comme cela est utilisé dans
le Sait Coran: «Ô mes compagnons de prison!», «Les
compagnons de Mûssâ (Moïse)» et dans la Sîrah et
les hadîths: «compagnon du Prophète, les Compagnons (Açhâbu)
du Messager d'Allah», «les Compagnons de l'allégeance
prêtée sous l'Arbre», «les compagnons
d'As-çuffah». Le qualificatif "compagnon" n'était
pas, à l'époque du Prophète (SAW), utilisé comme
nom comme il le sera plus tard chez les adeptes de l'Ecole des califes. Le
terme compagnon devient alors porteur d'une terminologie propre venant
s'ajouter à son sens primitif.
3- Leur critère quant à la
détermination du "Compagnon".
Ibn Hajar rapporte la position des adeptes de
l'Ecole des califes et donne dans son livre Al-Içâbah le
critère choisi pour distinguer ce qui fut compagnon de ce qui ne le fut
point:
«D'après les dires des imams
(ulémas), le qualificatif par lequel on reconnaît le Compagnon du
Prophète est celui rapporté par Ibn Abî Shaybah dans son Muçannaf,
d'après une chaîne de récits valables, à savoir que
lors des premières conquêtes (futûh), seul un
Compagnon (du Prophète) était désigné pour
être à la fête d'une expédition».(65)
Le récit dont il s'agit, qu'Ibn Hajar
qualifie de valable, est celui rapporté par At-Tabarî et Ibn
'Assâkir à partir de Sayf, Abî 'Uthmân, Khâlid
et 'Ubâdah. Le même At-Tabarî rapporte, à partir du
même Sayf que le calife 'Umar ne désignait comme chefs (commandants,
gouverneurs) que des Compagnons tant qu'il en trouvait(66), sinon, il nommait, à cet effet, des Tâbi'îne
(disciples des Compagnons). Ceux qui ont connu la rébellion de
l'apostolat (après la mort du Prophète) ne pouvaient
accéder à ce genre de postes...(67)
Critique:
L'origine des deux récits
précédents est Sayf accusé d'hérésie et
d'invention de hadiths.(68)
Par ailleurs, Abû 'Uthmân
cité par Sayf est une pure imagination de ce dernier. Il s'agit de
Yazîd b. Ussayd Al-Ghassânî qui était une fabrication
de Sayf.(69)
Quoi qu'il en soit, la réalité
historique rapporte à ce sujet des informations contraires. Ainsi, dans Al-
'Aghânî, l'auteur rapporte ceci: «le nommé
Mru'ul-Qays embrassa l'Islam devant 'Umar (le 2e calife) qui le nomma aux
commandes avant qu'il ne fît une rak'ah - (une prière).
Quand il accepta d'adopter l'Islam que 'Umar lui eut proposé, il lui
donna l'autorité sur les Musulmans originaires de Qudâ'ah en
Syrie. L'homme repartit alors avec l'étendard (du chef) qui flottait
au-dessus de sa tête».(70)
De même, 'Alqamah b. 'Ilâthah
al-Kalbî qui, après avoir renié l'Islam et regagné
Bizance, revint à l'époque de 'Umar le calife, réembrassa
l'Islam devant lui et se vit attribuer l'autorité sur la province de
Hurân, une région de Damas (en Syrie).
C'est la réalité que nous enseigne
l'histoire, mais les 'Ulémas de l'Ecole des califes s'appuyèrent
sur des récits tels que ceux rapportés par Sayf et consorts
(étudiés dans notre livre: 150 compagnons inventés) et en
puisèrent leur critère relatif à la reconnaissance des
compagnons.
B-
L'équité des Compagnons dans les deux Ecoles
1- Selon l'Ecole des califes, tous:
Les Compagnons du Prophète sont justes et
équitables. Cet a priori lui permet de puiser
ses convictions auprès des Compagnons considérés tous
comme des références valables.
Ibn Abî Hâtim Ar-Râzî
(imam "sunnite": de la critique des rapporteurs) dit dans
l'introduction de son livre(71): «quant aux
Compagnons du Prophète (SAW), ce sont eux qui ont été
témoins de la Révélation, qui ont pris connaissance de son
interprétation et qu'Allah avait choisis pour la compagnie de Son
Prophète, pour son soutien pour l'établissement de Sa religion et
la manifestation de Sa Vérité. Il les a agréés
comme compagnons de Son Prophète et érigés pour nous comme
exemples à suivre...
Allah - glorifié soit-iL - nous appelle
à nous en tenir à leur guidance et à leur emboîter
le pas :
«Quiconque se sépare du
Messager... quiconque suit un autre chemin que celui des croyants sera
chargé par Nous de ce dont il se sera chargé ...». (V.
115/IV)(72)
On rapporte, à ce propos, qu'Abû
Zar'ah dit: «Si tu entends qn diminuer un Compagnon du Prophète (SAW),
sache alors qu'il s'agit d'un zindîq (un
hérétique). La raison en est que la prophétie est vraie,
que le Coran est vrai, que le Message qui vous est parvenu est vrai et que
c'étaient les Compagnons qui l'ont transmis. Attaquer nos témoins
c'est vouloir annuler le livre et la Sunnah. La critique ne concerne en fait
que ces hérétiques là».(73)
2- L'opposition de l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.)
au sujet de l'équité des Compagnons.
A l'instar du Sait Coran, cette Ecole
considère que parmi les Compagnons il y eut des croyants qu'Allah a
loués, disant à propos de l'allégeance sous l'Arbre:
«Allah a très certainement
agréé les croyants quand ils t'ont prêté serment
d'allégeance sous l'Arbre (de Hudaybiyyah). Il a su ce qu'il y avait
dans leur cur et a fait descendre sur eux la quiétude et les a
gratifiés par une victoire proche». (V. 18/XLVIII)
La louange est donc spécifiée et
ne concerne que les croyants qui ont assisté à ce serment,
à l'exclusion des hypocrites qui y étaient présents comme
Abdullah b.'Ubay et Aws b. Qaydhâ.(74)
Parmi ceux-ci, certains osèrent
même calomnie la maison même du Messager d'Allah (SAW) et son foyer
conjugal, qu'Allah nous protège de ce genre de propos.(75)
Concernant d'autres, Allah dit:
«Quand ils entrevoient quelque
commerce ou quelque divertissement, ils s'y dispersent et te laissent debout».
(V. 11/LXII)
Cela s'est passé quand le Messager (SAW)
était dans la mosquée en plein serment du vendredi.
D'autres ont essayé de tuer le Messager
d'Allah (SAW) au niveau de 'Aqabah à son retour de la bataille de Tabûk
(76)ou du
pèlerinage d'adieu.(77)
Avoir bénéficié de la
compagnie du Prophète (SAW) n'est certainement pas plus
considérable que la prérogative d'être son épouse.
Le mariage avec lui constituait certes, le plus haut degré de la
compagnie. Or, Allah - exalté soit-IL - dit, au sujet des épouses
du Prophète (SAW):
«Ô femmes du Prophète!
Celle, d'entre vous, qui commettra une turpitude prouvée le
châtiment lui sera doublé par deux fois! Et ceci est facile pour
Allah. Et celle d'entre vous qui entièrement soumise à Allah,
à Son Messager et qui fait le bien, Nous lui accorderons deux fois sa
récompense et Nous avons préparé pour elle une
généreuse attribution. Ô! femmes
du Prophète vous n'êtes comparables à aucune autre femme».
(Vs. 30-32/XXXIII)
Allah dit, en ce qui concerne deux d'entre
elles:
«Si vous vous repentez à Allah,
c'est que vos curs ont fléchi. Mais si vous vous soutenez l'une l'autre
contre le Prophète, alors ses alliés seront Allah, Gabriel et les
Vertueux d'entre les croyants et les anges sont par surcroît son soutien
... jusqu'à: Allah à cité, en parabole pour ceux
qui ont mécru, la femme de Nûh (Noé) et la femme de Lot.
Elles étaient sous l'autorité de deux vertueux de Nos serviteurs.
Toutes deux les trahirent et ils ne furent, vis à vis d'Allah, d'aucune
aide pour elles (ces deux femmes). Et il fut dit: Entrez au feu, toutes les
deux avec ceux qui y entrent ...» (Sourate At-Tahrîm tout
entière LXVI)
Parlant du Jour de la Résurrection, le
Messager d'Allah (SAW) dit: «On amènera des hommes de ma
Communauté, qui seront conduits à gauche. Je dirai alors: ô
mon Seigneur! ce sont mes Compagnons! IL me dira: tu
ne sais pas ce qu'ils ont fait après toi! Je dirai ce qu'a dit le
serviteur vertueux: «et je fus témoin à leur encontre
aussi longtemps que je fus parmi eux. Puis quand tu m'as rappelé, c'est
Toi Qui fus Surveillant à leur endroit ...» (V. V117/V); IL
me dira: «ceux-là sont retournés à leur ancien
état depuis que tu les as quittés».(78)
Dans un autre récit: «Certains de
mes compagnons seront refoulés du Bassin; je les reconnais et dis: ce
sont mes compagnons! IL répondit: tu ne sais pas ce qu'ils ont commis
après toi».(79)
3- Critère pour la distinction du croyant
de l'hypocrite
Les hypocrites parmi les Compagnons
n'étaient connus que par Allah. Néanmoins, pour en informer Son
Prophète, IL en donna des indices, notamment le récit selon
lequel «'Ali ne sera aimé que par le croyant et ne sera
détesté que par l'hypocrite», rapporté par 'Ali
lui-même (a. s), Ummu Salamah (mère des croyants), Abdallah b.
Abbâs, Abû Dhar al-Ghifârî, Anas b. Malik et
'Imrân b. Huçayn. Ce récit était répandu et
célèbre à l'époque du Prophète (SAW).
En effet, Abû Dhar dit: «Nous ne
reconnaissions les hypocrites que parce qu'il leur arrivait de nier la parole
d'Allah et celle de Son Prophète, de s'absenter des prières et de
détester 'Ali b. Abî Tâlib».(80)
Abû Sa'îd al-Khudrî dit aussi:
«Nous reconnaissions les hypocrites - nous al-Ançars - à
l'animosité qu'ils avaient à l'égard de 'Ali b. Abî
Tâlib».(81)
A son tour, Abdallah b. Abbâs dit:
«À l'époque du Prophète (SAW), nous reconnaissions
les hypocrites à la haine qu'ils manifestaient à l'égard
de 'Ali b. Abî Tâlib».(82)
Jâbir b. 'Abdallah
al-Ançârî rapporte un récit similaire.(83)
A cause de tout ceci et de cet autre
récit dit en faveur de l'Imam 'Ali (a. s): «Ô Seigneur! Sois
l'Allié de ceux qui le soutiennent et l'ennemi de ses ennemis»*23,
les partisans de l'Ecole d'Ahlul-Bayt, se gardent bien de chercher les
repères de leur religion auprès d'un Compagnon qui
détestait 'Ali et ne l'aimait point de peur que ce Compagnon ne
fît partie des hypocrites que seul Allah connaît.
2e Champ de
Recherche:
Les Approches respectives de la Question de
l'Imamat, par les deux Ecoles (celle
des caifes et celle d'Ahlul-Bayt (a. s.)
En quatre chapitres:
Chap. 1: L'avènement du califat musulman
- la réalité historique
Chap. 2: Approches de l'Imamat dans l'Ecole des
califes.
Chap. 3: Approches de l'Imamat dans l'Ecole
d'Ahlul-Bayt (a. s.)
Chapitre 1
L'Avènement
du caifat musulman
La
Réalité historique
La discorde au sujet de la détention
(légitime) du pouvoir en Islam commença avec la mort du
Prophète (SAW). Celui-ci venait d'accorder la bannière d'une
expédition militaire pour le Shâm, à son mawlâ'
Ussâmah b. Zayd dont le père y fut tué par les romains. Le jeune
chef fut donc nommé à la tête d'une armée qui
comportait d'éminents Muhâjirîne (Immigrés)
et Ançars (Alliés de Médine), dont Abû
Bakr, 'Umar b. al-Khattâb, Abû 'Ubaydah, Sa'd b. Abî
Waqqâs, Sa'îd b. Zayd ... Cette armée stationna alors au
Jarf, une banlieue de Médine. D'aucuns se demandaient comment le
commandement sur al- Muhâjirîne et al-Ançars fut
assigné à un jeune homme (de vingt ans). Cette parole provoqua
une grande colère chez le Prophète (SAW) qui, la tête
bandée et le corps couvert d'une étoffe, dut s'adresser aux gens
et dire: «Quelle est cette parole qui m'est parvenue de certains d'entre
vous au sujet du commandement accordé à 'Ussâmah? Comme
vous avez auparavant critiqué l'assignation de son père à
la tête de l'expédition, alors qu'il en était digne, vous
faites de même pour le fils qui mérite, je vous l'assure,
d'être nommé à ce poste».
Après, ceux qui étaient là
parmi les effectifs de l'expédition susmentionnée, venaient dire
au revoir au Prophète avant d'aller rejoindre le corps de
l'armée. Tout en étant de plus en plus souffrant, le
Prophète (SAW) ordonnait d'expédier le détachement
d'Ussâmah. Le dimanche, la maladie du Prophète (SAW) devint plus
forte. Lundi, quand Ussâmah ordonna néanmoins à
l'armée de se préparer au voyage, l'information vint de
Médine que le Messager d'Allah (SAW) était mourant. Ussâmah,
'Umar et Abû 'Ubaydah revinrent alors à Médine.(84)
L'ordre d'écrire
le testament du Messager d'Allah (SAW)
Selon le récit d'Ibn 'Abbâs:
«Quand le Prophète (SAW) allait mourir et qu'il y avait dans la
même pièce que lui des hommes dont 'Umar b. al-Khattab, il (le
Prophète) dit: «Qu'on m'apporte (un feuillet) pour vous
écrire ce qui vous préservera de l'égarement».
'Umar, alors, répliqua: «Le Prophète souffre beaucoup et
vous avez le Livre d'Allah. Le Livre d'Allah nous suffit».
»Comme ceux qui étaient
présents n'arrivaient pas à s'entendre et se partagèrent
entre l'opinion de 'Umar et l'ordre du Prophète, celui-ci, devant leur
discussion de plus en plus hurlante et confuse, leur dit: «Sortez et
laissez moi car la discorde ne peut être de mise auprès de
moi».(85)
Après cet incident, Ibn 'Abbâs ne
cessait de dire: «La calamité, toute la calamité,
réside dans ce fait d'empêcher le Messager d'Allah, par leur
discorde en sa présence, de leur remettre cet écrit».(86)
L'attitude du calife
'Umar face à la mort du Prophète
Le Prophète (SAW) mourut un lundi
à midi. Abû Bakr n'y était pas. Il était à
Sinh. 'Umar qui était là demanda l'autorisation de le voir. Il
entra alors en compagnie d'Al-Mughîrah b. Shu'bah, découvrit le
visage du Prophète (SAW) et s'écria: «Quel
évanouissement le Messager d'Allah a subi!». Al- Mughîrah
répliqua: «Je jure par Allah que Son Messager est mort».
'Umar lui rétorqua: «Tu mens. Il n'est pas mort. Tu n'es qu'un
homme soumis à une tentation! Le Messager d'Allah ne mourra
qu'après l'extinction des hypocrites».(87)
'Umar continuait à dire: «Des
hommes parmi les hypocrites prétendent que le Messager d'Allah est mort.
Or il n'en est rien. Il s'est simplement rendu auprès de Son Seigneur
comme l'avait fait Mûssâ (Moïse) avant lui pendant quarante
nuits. Je jure par Allah que Son Messager reviendra et coupera des mains et des
pieds de ceux qui prétendent qu'il est mort».(88) «Avec mon épée, j'abattrai
quiconque prétend que le Prophète est mort. Il est simplement
monté au ciel».(89)
On lui récita alors ce verset: «Muhammad
n'est qu'un Messager; des Messagers ont vécu avant lui. Retournerez-vous
sur vos pas, s'il mourait ou s'il était tué?» (V.
144/III)(90)
Al-'Abbâs b. Abdul-Muttalib (l'oncle du
Prophète) dit alors: «Le Messager d'Allah est certes mort. J'ai vu
sur son visage ce que j'ai toujours vu à leur agonie sur les visages des
fils de 'Abdel-Muttalib. A sa mort, le Prophète a-t-il testé
devant quelqu'un parmi vous, dites, que l'on sache!» Ils
répondent, non. Il conclut alors: «Soyez en témoins».(91)
Pourtant, 'Umar continuait à parler,
à écumer jusqu'à ce qu'Abû Bakr revînt de Sinh
et lût: «Muhammad n'est qu'un Messager...», le verset
précédent 'Umar demanda alors : «Ce verset figure-t-il
dans le Livre d'Allah?». Oui, répondit Abû Bakr. 'Umar se
tut alors.(92)
La "Saqîfah" et le serment d'allégeance
prêté à Abû Bakr
A ce sujet, At-Tabarî(93) rapporte ceci: «Les Ançars se
réunissent au préau de Banî Sâ'idah (la Saqîfah)
alors que la famille du Prophète (SAW) s'occupait de sa dépouille
mortelle. Ils dirent: «Après Muhammad (SAW), nous chargeons Sa'd
b. 'Ubâdah du pouvoir (politique)». On le leur amena malade ....
Quand il prit la parole et après avoir loué Allah, il rappela la
primauté d'al-Ançar dans le domaine religieux, leur mérite
en Islam, la puissance qu'ils avaient donnée au Prophète et
à ses Compagnons, et leur jihâd contre les ennemis, un jihâd
qui a duré jusqu'à ce que les Arabes allassent droit. Le
Prophète est resté, jusqu'à sa mort, satisfait d'eux.
«Accaparez donc ce pouvoir ...», ordonna-t-il.
Tous répondirent: «Tu as bien vu et bien dit; nous pensons
comme toi et nous t'en investissons». Par après, les Ançars
ont discuté et dit: «Si les immigrés Quraychites protestaient
en disant: ce sont nous les Muhâjirîne, les premiers Compagnons du
Prophète, sa tribu et ses alliés; pourquoi alors nous
disputez-vous son pouvoir (après lui)? Nous rétorquerions alors,
répondit une fraction d'entre eux, "un prince de nous et un prince
de vous!"». Sa'd b. 'Ubaydah répliqua alors: «Ce que
vous venez de dire est le début de votre faiblesse».(94)
Abû Bakr et 'Umar eurent écho de
cette réunion et se hâtèrent d'y aller en compagnie
d'Abî 'Ubaydah b. al-Jarrâh, 'Ussayd b. Hudayr, 'Uwaym b.
Sâ'idah et 'Âçim b. Adiy des Banî 'Ajlân.(95)
Une fois arrivé, Abû Bakr
empêcha 'Umar de parler, prit la parole et, après avoir
loué Allah, rappela aux assistants la primauté
d'al-Muhâjirîne sur tous les Arabes quant à la foi qu'ils
avaient eue en le Prophète (SAW): «Ils (al-Muhâjirîne)
sont les premiers à avoir adoré Allah sur terre, cru en Son
Messager dont ils sont les alliés et le clan. Ce sont eux qui ont le
plus droit à ce pouvoir; ne le leur disputera qu'un homme
injuste». Abû Bakr ajouta aussi: «Après les premiers
Muhâjirîne, personne n'a votre rang. Nous sommes donc les princes
et vous les ministres». Al-Hubâb b. al-Mundhir se tint alors debout
et dit: «Ô les Ançars, prenez vos affaires en mains et
sachez que les gens sont chez vous, sous votre ombre. Personne ne pourra vous
contrarier mais si vous vous opposiez votre position se gâterait et votre
situation serait intenable. Si ces gens persistent... un prince sera de nous et
un prince sera d'eux».
'Umar répliqua: «Loin de là!
Deux (épées) ne sauraient tenir en un seul étui ... Par
Allah, les Arabes n'accepteront pas de vous investir alors que leur
Prophète vient d'un autre clan que le vôtre. Par contre, ils
n'hésiteront pas à le faire au profit de ceux dont la
prophétie émana. Sur nos adversaires nous avons l'argument
manifeste et la probation évidente. Qui osera nous disputer le pouvoir
de Muhammad et Sa place alors que nous sommes ses alliés et son clan, à
moins qu'il s'agisse d'un homme parlant faux ou se précipitant dans le
péché ou s'engouffrant dans une calamité».(96)
Al-Hubâb b. al-Mundhir reprit la parole et
dit: « Ô les Ançars, gardez vos mains et n'écoutez
pas ce que disent cet homme et ses compagnons, sinon votre part en cette
affaire sera usurpée. S'ils refusent ce que vous leur proposez,
chassez-les de ce pays et emparez-vous de ces questions car, par Allah, vous en
êtes plus dignes qu'eux. C'était avec vos épées que tout
rebelle à cette religion s'y était finalement soumis. Sachez que
je suis un as en cette affaire! Si, par Allah, vous le voulez bien, on
l'attisera de plus belle!»
'Umar répliqua: «Allah te tuerait
alors!»
Al-Hubâb répondit: «C'est toi
qu'IL tuera!»
Abû Ubaydah prit la parole et dit: «Ô
les Ançars! Vous étiez les premiers à soutenir et à
aider; ne soyez pas alors les premiers à changer et à
altérer!»
Bachîr b. Sa'd al-Khazrajî,
Abûn-Nu'mân b. Bachîr se tint alors debout et dit:
«Ô les Ançars! Certes, par Allah, nous avons eu le
mérite de combattre les polythéistes, notre primauté en
cette religion est évidente mais notre but était
l'agrément d'Allah, l'obéissance à notre prophète
et servir notre propre intérêt. Il ne convient pas donc d'en user
pour avoir le dessus sur les gens ou avoir quelque profit de ce bas-monde. A
nous ce qu'Allah nous accorde de biens. Muhammad (SAW) est originaire de
Quraych; les siens sont donc les ayants droits. Je jure par Allah qu'il ne me
verra jamais leur disputer ce droit. Craignez donc Allah et ne vous opposez pas
à eux!»
Abû Bakr dit alors: «Voici 'Umar,
voici Abû 'Ubaydah, prêtez allégeance à l'un de ces
deux hommes!»
Ceux-ci dirent alors: «Par Allah, nous ne
prendrons jamais le pas sur toi ...»
A son tour, 'Abdur-Rahman b. 'Awf se tint debout
et dit: «Ô les Ançars! Bien que vous soyez méritants,
il n'y a pas parmi vous des hommes tels qu'Abû Bakr, 'Umar et
'Ali».
Al-Mundhir b. al-Arqam répliqua alors:
«On ne nie pas le mérite de ceux que tu as cités puisque
l'un d'eux aurait l'unanimité pour lui s'il venait à se
proposer-il», fit allusion à 'Ali b. Abî Tâlib.(97) Les Ançars ou certains parmi eux disent
alors: «Nous ne prêtons allégeance qu'à 'Ali».
Quand l'assemblée devint houleuse et que
les voix s'élevaient, je craignis, raconta 'Umar, la discorde et
déclarai (à l'intention d'Abî Bakr): «Tends la main
que je te prête serment d'allégeance!» A ce moment là
Bachîr b. Sa'd les devança et prêta allégeance
à Abî Bakr. Al-Hubâb b. al-Mundhir interpella alors:
«Ô! Bachîr b. Sa'd, tu as trahi, as-tu envié ton
cousin au sujet du poste suprême?» L'autre répondit:
«Non, par Allah mais je n'ai pas voulu disputer aux gens le droit
qu'Allah leur a accordé».
Quand Al-Aws (l'une des deux tranches d'al-
Ançars, l'autre étant al-Khazraj) réalisèrent ce
que fit Bachîr b. Sa'd, les revendications de Quraych et l'ambition
d'al-Khazraj à l'investiture de Sa'd b. 'Ubâdah, ils se disent
parmi-eux il y avait 'Ussayd b. Hudayr l'un des chefs
délégués - : «Par Allah! si
al- Khazraj ont une fois le dessus sur vous, ils prendront pour toujours le pas
sur vous et ils ne vous concéderont jamais rien! Allez donc prêter
serment d'allégeance à Abû Bakr!».
Ils se levèrent alors et
prêtèrent serment d'allégeance. Les gens vinrent ensuite,
de toute part, pour faire de même. Le projet de Sa'd b. 'Ubâdah et
d'al-Khazraj avorta enfin et Sa'd faillit être piétiné. Des
gens de son camp demandèrent: «Faites attention à Sa'd, ne
le piétinez pas!»
'Umar rétorqua: «tuez le, qu'Allah
le tue!»
Ensuite 'Umar se tint debout près de sa
tête et lui dit: «J'allais te piétiner tout à l'heure
jusqu'à te faire crever!».
Qays b. Sa'd, (le fils du prétendant
malade) saisit alors la barbe de 'Umar et lui dit: «Par Allah, si tu
avais fait tomber un cheveu de sa tête, tu ne serais pas revenu chez toi
avec une dent, dans ta bouche!»
Abû Bakr intervint en disant: «Vas-y
doucement ô 'Umar! Ici la douceur est la plus efficace!».(98)
Sa'd reprit à l'adresse de 'Umar et lui
dit: «Par Allah, si j'avais encore mes forces, si je pouvais me lever, tu
entendrais à travers ses régions (de Médine) et ses rues
le rugissement qui vous ferait entrer dans votre trou, toi et tes compagnons!
Tu aurais alors rejoint les tiens, là où tu n'étais pas
suivi mais subalterne; emmenez-moi d'ici ...».(99)
Al-Jawharî (Abû Bakr) rapporte dans
son livre As-Saqîfah, que 'Umar s'était au moment de
l'allégeance prêtée à Abû Bakr,
retroussé et accourait devant Abî Bakr en répétant: «Les
gens ont effectivement prêté serment d'allégeance à
Abû Bakr ...!»(100)
Ce dernier fut alors conduit à la
Mosquée pour que l'allégeance y continuât. Al-'Abbâs
et 'Ali qui n'avaient pas encore achevé le lavage rituel du Prophète
(SAW) entendirent le Takbîr (la glorification d'Allah) dans la
Mosquée. 'Ali demanda: «Qu'est-ce que c'est?» Al-Abbâs
répondit: «C'est du jamais vu! Ne t'avais-je pas dit ...?»(101)
Al-Barâ'b b. 'Âzib frappa à
la porte de Banî Hâchim et leur annonça la nouvelle de
l'allégeance prêtée à Abî Bakr. Certains
d'entre eux dirent: «Les Musulmans n'auraient pas dû entreprendre
quoi que ce soit en notre absence puisque nous sommes les plus dignes de
Muhammad (SAW)». Al-'Abbâs dit aussi: «Par le seigneur de la
Ka'bah! Ils l'ont fait»
C'est que les Muhâjirîne et
al-Ançars, dans leur majorité, ne doutaient pas que le pouvoir
suprême après le Messager d'Allah, allât être
dévolu à 'Ali.(102)
At-Tabarî rapporte aussi à ce sujet
que la tribu "Aslam" entra en grand nombre à Médine, au
moment de la réunion d'As-Saqîfah, et prêta serment
d'allégeance à Abû Bakr. Content, 'Umar dit alors:
«Quand j'ai vu "Aslam" surgir, j'ai cru, à coup
sûr, en la victoire».(103)
Quand l'allégeance fut
prêtée à Abû Bakr, les gens le conduisaient (tel un
homme en cortège nuptial) à la Mosquée du Messager d'Allah
(SAW). Abû Bakr monta alors sur la chaire du Prophète (SAW) et
reçut l'allégeance des gens jusqu'au soir; c'est-à-dire
que cela leur a fait oublier l'inhumation de la dépouille du
Prophète (jusqu'au soir du mardi).(104)
Le lendemain, Abû Bakr s'assit sur la
chaire. 'Umar prit alors la parole avant Abû Bakr, loua Allah, reconnut
que ses paroles de la veille n'étaient ni du Coran ni du Prophète
qui leur légua le Livre d'Allah, qui les guiderait s'ils s'y
accrochaient et ajouta enfin qu'Allah les a réunis autour du meilleur d'entre
eux, le Compagnon du Messager d'Allah «tous deux dans la grotte»
(V. 40/IX): «Levez-vous donc, continua 'Umar, et prêtez-lui serment
d'allégeance!». Ce fut alors l'allégeance
générale après celle (restreinte) de la Saqîfah
(le préau). Comme le précisa Al-Bukhârî dans son Sahîh
(Tom. 4, p. 165). L'initiative de 'Umar qui incita Abû Bakr à
monter sur la chaire du Prophète est rapportée par Anas b.
Mâlik.
Ensuite Abû Bakr donna son discours.
Après les louanges adressées à Allah, il dit: «On
m'a chargé d'exercer le pouvoir sur vous sans être meilleur que
vous. Si j'agis bien aidez-moi, sinon corrigez moi ... Obéissez-moi tant
que j'obéis à Allah et à Son Messager. Si je
désobéis à Allah et à Son Messager je perdrai tout
droit à votre obéissance. Levez-vous pour accomplir votre
prière, qu'Allah vous accorde Sa Miséricorde».(105)
Selon Ibn Sa'd, le Messager d'Allah mourut un
lundi juste après midi mais les gens s'étaient occupés
à autre chose que son inhumation(106) et ce,
jusqu'à mardi soir.(107) Ces
occupations étaient d'abord les discours de la Saqîfah puis la
première allégeance prêtée à Abû Bakr
et celle de la Mosquée, accompagnée de son discours et celui de
'Umar. Après tout cela, les gens se sont intéressés aux
opérations funèbres relatives à la dépouille du
Prophète (SAW). Les gens sont entrés alors par groupes pour faire
sur lui, sans imam, la prière rituelle (qui procède l'enterrement).
L'inhumation du
Messager d'Allah (SAW) - ceux qui y étaient présents
Al-'Abbâs, 'Ali, Al-Fadl et Sâlih,
son serviteur, qui s'étaient chargés de son lavage, le
portèrent. Sur la quatrième personne, les récits
divergent, était-ce Sâlih, Shaqrân ou Ussâmah b. Zayd?(108)
Selon une version rapportée dans Kanz
al-'Ummâl, Abû Bakr et 'Umar n'assistèrent pas à
l'enterrement du Prophète (SAW).(109)
Aïsha rapporte ceci: «On n'a appris
l'inhumation du Messager qu'après avoir entendu la nuit le crissement
des pelles. C'était la veille de mercredi».(110)
Selon Ibn Sa'd, seuls les proches du
Prophète (SAW) s'étaient chargés de son inhumation. Banu
Ghanm entendirent chez eux le crissement des pelles.(111)
Après
l'inhumation du Messager (SAW)
Sa'd b. 'Ubâdah et ses partisans avaient
donc échoué. 'Ali et son groupe sont devenus une minorité.
Ils se chamaillaient avec le parti victorieux d'Abû Bakr. Les uns et les
autres uvraient pour s'attirer la sympathie des Ançars.
Az-Zubayr b. Bakkâr rapporte dans Al-Muwaffaqiyât
qu'après l'investiture d'Abû Bakr, beaucoup d'ançarites
regrettèrent de lui avoir prêté allégeance, s'en
blâmaient, évoquèrent 'Ali b. Abî Tâlib et
l'acclamèrent.(112)
Al-Ya'qûbî rapporte que des
Muhâjirîne et des Ançars refusèrent, toutefois, de
prêter allégeance à Abû Bakr et penchaient pour 'Ali
b. Abî Tâlib. Parmi eux, il y eut Al-'Abbâs b. 'Abdel-Muttalib,
Al-Fadl b. 'Abbâs, Az-Zubayr b. al-'Awwâm, Khâlid b.
Sa'îd, Al-Miqdâd b. 'Amru, Salmâm al-Fârissî,
Abû Dhar al- Ghifârî, 'Ammâr b. Yâssir, Al-Bara'
b. 'Azib, 'Ubay b. Ka'b ...
Abû Bakr fit venir alors 'Umar, Abu
'Ubaydah b. al- Jarrah et Al-Mughîrah b. Shu'bah et les consulta:
«Que faire?»
Al-Jawhari rapporte qu'Al-Mughîrah b.
Shu'bah conseille à Abû Bakr d'aller voir Al-'Abbâs b.
Abdel-Muttalib, et de lui concéder une part du pouvoir, qu'il
léguerait à sa postérité. «Ainsi, ajouta
Al-Mughîrah, vous isolerez 'Ali b. Abî Tâlib et votre
argument sera très fort vis à vis de 'Ali».
La nuit, Abû Bakr, 'Umar, Abû
'Ubaydah, Al- Mughîrah sont allés voir Al-'Abbâs qui,
après avoir compris leur proposition, les récusa.
Le retranchement dans
la maison de Fatima (a. s.)
'Umar b. al-Khattâb dit:
«Après la mort du Prophète, 'Ali, Az-Zubayr et ceux qui
étaient avec eux se sont retranchés dans la maison de
Fatima».(113)
Les historiens citent les noms de ceux qui
étaient avec 'Ali et Az-Zubayr:
1- Al-'Abbâs b. 'Abdel-Muttalib
2- Utabah b. Abî Lahab
3- Salmân al-Fârissî
4- Abû Dhar al-Ghifârî
5- 'Ammâr B. Yâssir
6- Al-Miqdâd b. al-Aswad
7- Al-Barâ' b. 'Azib
8- 'Ubay b. Ka'b
9- Sa'd b. Abî Waqqâs
10- Talha b. 'Ubaydillah
et des groupes de Hashimites,
d'al-Muhâjirîne et d'al-Ançars.(114)
Ce retranchement est rapporté d'une
façon régulière et inaltérée par un grand
nombre de narrateurs dans les livres de la Sîrah, de l'histoire,
des hadîths, de la littérature de la théologie, des
biographies ... mais, ayant mal apprécié ce qui s'était
passé entre les retranchés et le parti vainqueur, ces auteurs
clarifièrent rarement les événements en question.
Al-Balâdhurî par exemple, rapporte
que lorsque 'Ali (a. s.) s'est abstenu de l'allégeance en faveur
d'Abû Bakr, celui-ci envoya 'Umar b. al-Khattâb avec l'ordre de le
lui amener avec rigueur et sévérité. Une fois
arrivé chez 'Ali, celui-ci dit à 'Umar après une vive
discussion: «Tu procèdes à une traite dont tu auras la
moitié. Par Allah! tu n'insistes aujourd'hui
pour consolider son investiture que pour qu'il te la lègue
demain!»(115)
Au cours de la maladie qui précéda
sa mort, Abû Bakr dit: «Je ne regrette dans cette vie d'ici-bas que
trois actes que je n'aurais pas dû commettre. D'abord j'aurais
aimé ne pas avoir découvert la maison de Fatima même s'ils
s'y étaient retranchés avec l'intention de déclarer la
guerre».(116)
Quant à la manière dont on avait
procédé pour découvrir la maison de Fatima et contrecarrer
les hommes qui s'y étaient retranchés, des historiens rapportent
que certains Muhâjirîne n'étaient pas contents de
l'allégeance prêtée à Abû Bakr. Parmi eux 'Ali
et Az-Zubayr qui se retranchèrent avec des armes dans la maison de
Fatima.(117)
Dans une autre version, ils s'y étaient
réunis pour prêter allégeance à 'Ali(118). Abû Bakr leur envoya 'Umar b.
al-Khattâb pour les en sortir bon gré mal gré. 'Umar y alla
avec une torche de feu allumé pour incendier la maison (en cas de
besoin).
Fatima lui demanda: «Viens-tu, ô
'Umar pour brûler notre maison?». «Oui, répondit-il,
à moins que vous entriez dans le giron de la Communauté».(119)
Selon Al-Ya'qûbî, «Ils y sont
allés ('Umar et son groupe), investirent la maison, après que
l'épée de 'Ali eut été cassée»
(Al-Ya'qûbî, 2/126). Selon At-Tabarî c'était Zubayr
qui sortit de la maison, l'épée brandie, tituba et perdit
l'épée que les envahisseurs finirent par récupérer.(120)
Al-Jawharî (Abû Bakr) rapporte que:
'Ali répétait: «Je suis le serviteur d'Allah et le
frère du Messager d'Allah», tout au long du chemin jusque devant
Abû Bakr. Quand on lui ordonna de prêter allégeance, il dit:
«C'est moi qui suis l'ayant droit. Je ne vous prêterai pas
d'allégeance. C'est vous qui devez le faire pour moi. Vous avez
évincé les Ançars en avançant que vous êtes
les proches du Messager d'Allah. Si vous êtes justes, comme les
Ançars ont reconnu le bien fondé de votre argumentation, faites
de même en reconnaissant que je suis plus proche de lui que vous.
Craignez Allah, soyez équitables sinon-vous le savez bien, l'injustice
sera votre lot».
'Umar dit alors: «Tu ne partiras
qu'après avoir prêté allégeance!». 'Ali
répondit: «Procède, ô! 'Umar à une traite dont
tu auras la moitié; consolide aujourd'hui son pouvoir pour qu'il te le
lègue demain. Non, par Allah, je n'accepte pas ton propos et ne le suis
point». Abû Bakr dit alors: «si tu ne prête pas
allégeance je ne t'y forcerai pas». Abu 'Ubaydah intervient alors
et dit: «Ô Abûl-Hassan ('Ali)! Tu es encore jeune et tu n'as
pas encore l'expérience et le savoir-faire des anciens de Quraysh ton
peuple. A mon avis, Abû Bakr est plus à même que toi
d'assumer cette affaire, concède la lui et sois en content car si tu vis
longtemps, tu es certes digne, intègre, méritant par ton lien de
parenté, ton passé glorieux et ton jihâd».
'Ali répliqua et dit: «Ô les
Muhâjirîne! Allah! Allah! Ne sortez pas le pouvoir de Muhammad de
sa maison pour l'installer dans les vôtres. N'évincez pas sa
famille de son rang dans la Communauté. Je jure par Allah, ô les
Muhâjirîne, que nous les Ahlul-Bayt sommes les ayants droits bien
avant vous. N'était-ce pas parmi nous qu'il y avait le liseur du Livre
d'Allah? Le docte dans la religion d'Allah? L'érudit de la sunnah?
L'apte à gérer les affaires publiques? Par Allah! C'est chez nous
qu'il réside; ne succombez donc pas à vos passions, sinon vous
vous éloignerez encore plus du droit et de la justice!».
Bachîr b. Sa'd lui dit alors:
«Ô 'Ali! Si les Ançars avaient entendu ton propos avant de
prêter allégeance à Abû Bakr, ils n'auraient pas
hésité à te soutenir mais, c'est trop tard (cela est fait)».
'Ali est reparti chez lui sans avoir prêté allégeance
(Al-Jawharî selon An-Nahj, 2/3-5).
Ce dernier rapporte aussi qu'après avoir
réalisé ce qui était arrivé à 'Ali et
à Zubayr, Fâtimah (a. s) s'est tenue au seuil de sa maison et dit:
«Ô Abû Bakr! Pour envahir la famille du Messager d'Allah vous
êtes allés vite en besogne. Par Allah, je n'adresserai jamais la
parole à 'Umar, jusqu'à ce que je rencontre Allah».(121)
Dans une autre version: Fatima est sortie de
chez elle, en pleurs. Elle criait et les gens s'en abstenaient.(122)
Al-Ya'qûbî, (relatant les
événements de la maison) rapporte qu'elle (Fatima) devança
les intrus au seuil de sa porte et dit: «Par Allah! Ou bien vous sortirez
ou bien je découvrirai mes cheveux et crierai à Allah».
Tout le monde sortit alors de la maison.(123)
Al-Mas'ûdî rapporte ceci: quand
Abû Bakr a bénéficié de l'allégeance des gens
à la Saqîfah et qu'on la lui a renouvelée le mardi, 'Ali
alla à sa rencontre et lui dit: «Tu as gâché
l'état des choses; tu n'as pas consulté et tu n'as eu aucune
considération à notre égard!». «Si,
répondit Abû Bakr, mais j'ai craint la fitnah (la
tentation, la sédition)».(124)
Al-Ya'qûbî rapporte aussi qu'un
groupe (de musulmans) proposa à 'Ali de lui prêter serment
d'allégeance. Ce dernier leur dit alors: «Rendez-vous tôt
chez moi les têtes rasées». Le lendemain matin, seules trois
personnes s'étaient rendues chez lui.(125)
Par après, 'Ali porta Fatima sur un
âne, se rendit de nuit avec elle chez les Ançars pour leur
demander de le soutenir. Fatima leur demandait la même chose. Tous
disaient: «Ô fille du Messager d'Allah! Notre allégeance a
été prêtée à cet homme! Si ton cousin avait
précédé Abû Bakr chez nous, nous ne l'aurions pas
laissé pour un autre». 'Ali leur rétorqua alors:
«Est-ce-que j'aurais pu laisser la dépouille mortelle du Messager
d'Allah (SAW) chez lui, sans procéder aux opérations
funèbres nécessaires! Aurais-je dû sortir à ce
moment là disputer aux gens le devenir de son pouvoir?». A son
tour, Fatima dit: «Adûl-Hassan ('Ali) n'a fait que ce qu'il devait
faire. Quant à eux, ils ont fait ce dont ils sont responsables devant
Allah».(126)
Mu'ammar rapporte à partir
d'Az-Zuhrî citant Aïsha, la mère des croyants, le
récit relatant ce qui s'est passé entre Fatima et Abû Bakr
au sujet de l'héritage légué par le Prophète (SAW):
«Fatima a donc rompu avec lui (Abû Bakr) et, jusqu'à sa
mort, ne lui adressa point la parole. Elle a vécu six mois après
la mort du Prophète (SAW). Son époux l'a enterrée, a
prié sur elle sans prévenir Abû Bakr. De son vivant, 'Ali
jouissait parmi les gens de certains égards. Après mort, ils
l'ont ignoré et délaissé. Un homme demanda à
Az-Zuhrî: pendant six mois, 'Ali n'a donc pas prêté serment
d'allégeance à Abû Bakr? - Non, répondit
Az-Zuhrî, les Banî-Hâshim, non plus. Lorsque 'Ali a pris acte
du changement d'attitude à son égard, il se résolut
à prêter allégeance et les Banî-Hâshim lui
emboîtèrent le pas».(127)
Al-Balâdhurî dit: quand des Arabes
avaient manifesté leur apostasie (après la mort du
Prophète) 'Uthmân alla voir 'Ali et lui dit: «Ô mon
cousin! Personne n'ira combattre l'ennemi tant que tu ne prêtes pas
allégeance». Il lui parlait ainsi jusqu'à ce qu'il se
décidât finalement à aller voir Abû Bakr et à
lui prêter serment d'allégeance. Les Musulmans
manifestèrent alors leur joie, s'activèrent pour le combat et
cessèrent d'envoyer des délégations ...(128)
Même après avoir prêté
allégeance, 'Ali continuait à se plaindre de ce qui s'est
passé après la mort du Prophète. Ses plaintes furent
notées même au cours de son califat. Le prouve son sermon
célèbre appelé Ash-Shiqshiqiyyah.
La désignation
de 'Umar au califat son investiture
Malade, Abû Bakr appela 'Uthmân seul
chez lui. «Ecris, lui ordonna-t-il: Au Nom d'Allah le Clément le Miséricordieux,
voici le testament d'Abû Bakr b. Abî Quhâfah, adressé
aux Musulmans. Ensuite ... (Abû Bakr s'évanouit à ce moment
là, dit le narrateur, 'Uthmân écrit (de son propre chef):
J'accorde l'autorité sur vous (je désigne calife) à 'Umar
b. al-Khattâb. En cela, tout le bien est pour vous!.
Quand il s'est réveillé, il demanda à 'Uthmân de lui
lire ce qu'il avait écrit. Lorsque ce dernier s'exécuta,
Abû Bakr dit Allahu Akbar et remarqua: «Je vois que tu as
prévenu la discorde chez les gens si jamais je venais à mourir
dans mon évanouissement de tout à l'heure!».
«Oui», affirma 'Uthmân. «Qu'Allah te récompense
pour l'Islam et les Musulmans». Abû Bakr confirma alors tel quel le
texte écrit par 'Uthmân.
Dans l'histoire d'At-Tabarî, 'Umar
était assis parmi des gens. Il tenait une branche de dattier. A
coté de lui, Shadîd, un serviteur d'Abû Bakr, tenait le
feuillet dans lequel figurait la désignation de 'Umar au califat. 'Umar
s'adressait aux gens en disant: «Ô les gens! Ecoutez et
obéissez à la parole du successeur du Messager d'Allah, qui dit
(dans son testament) qu'il vous a donné le meilleur conseil!».(129)
Quel contraste entre cette attitude de 'Umar et
celle qu'il avait eue à l'égard de la volonté du Messager
d'écrire son testament!!
La
délibération et l'investiture de 'Uthmân
Dans Al-'Iqdul-Farîd, Ibn 'Abdi
Rabbih rapporte ceci: quand 'Umar fut frappé par la lance, on lui
proposa de désigner quelqu'un à sa succession. En guise de
réponse, il dit: «J'aurais désigné Abu 'Ubaydah b.
al- Jarrah, s'il était resté en vie. Si Allah me demande pourquoi
je le fais, je lui dirai que j'ai entendu Son Prophète dire qu'Abû
'Ubaydah est l'homme de confiance dans cette Communauté. J'aurais
désigné Sâlim, Mawlâ Abî Hudhayfah s'il
était resté en vie. Si Allah me demande pourquoi je le fais, je
lui dirai que Son Prophète dit que Sâlim aime Allah, Le craint et
ne Lui désobéit point».(130)
Dans une autre version, 'Umar dit aux gens qui
lui demandèrent de tester en faveur de quelqu'un: «Après ce
que je vous avais dit, je me suis résolu à désigner un
homme - en montrant 'Ali - capable, comme je l'espère, de vous conduire
dans le droit chemin. Puis je me suis ravisé. C'est que je ne veux pas
en porter le fardeau vivant et mort ...»
Selon Al-Balâdhurî, 'Umar dit
encore: «Faites venir 'Ali, 'Uthmân, 'Abdur-Rahmân b. Awf et
Sa'd b. Abî Waqqâs». Une fois réunis chez lui, 'Umar
n'adressa la parole qu'à 'Ali et à 'Uthmân: «Ô,
'Ali! il se peut que ces gens reconnaissent tes liens
de parenté avec le Prophète (SAW) et ce qu'Allah t'a donné
de Fiqh (savoir religieux) et de science. Crains donc Allah (sois
pieux) si on te désigne à ce poste». Ensuite, 'Umar dit
à 'Uthmân: «Ô 'Uthmân, il se peut que ces gens
reconnaissent ton alliance avec le Prophète et considèrent ton
âge. Crains donc Allah si on te désigne à ce poste. Ne
porte pas Âl Abî Mu'ayt (ton clan, Bani Umayyah) sur les nuques
(dos) des gens». Enfin 'Umar ordonna de faire venir 'Çuhayb
à qui il enjoignit de guider pendant trois jours la prière (faite
en commun dans la Mosquée). Que ces (les six précédents)
s'isolent dans une pièce pour délibérer. S'ils sont
unanimes à désigner l'un d'entre eux, qu'on coupe la tête
à quiconque s'opposera à eux. Lorsqu'ils sont sortis de chez lui,
'Umar dit: s'ils investissent le chauve ('Ali), il les conduira dans le droit
chemin!».
Al-Muhib Tabarî rapporte autrement ce
même propos de 'Umar (Ar-Riyâdun-Nadirah, 2e éd,
Egypte, 1373 h., 2/95): «Quel serait leur
exploit s'ils désignaient le chauve. Comme il est capable de les
maintenir dans le Vrai fût-il menacé d'une épée sur
le cou!» Mohamed b. Ka'b lui demanda alors: «lui reconnais-tu cela
et tu ne le désignes pas?!» 'Umar lui dit: «Si j'omets de le
faire pour eux un meilleur que moi avait fait de même avant moi».
Dans une autre version rapportée par
Al-Ya'qubî et Al-Balâdhurî, 'Umar dit une fois: «On
remarque que l'allégeance prêtée à Abû Bakr
était brusque et celle prêtée à 'Umar non
procédé de délibération. Eh bien! Après moi,
l'affaire se conclura après délibération: si les six se
partagent en deux groupes, l'un de quatre, l'autre de deux (voix), qu'on suive
le groupe majoritaire. Si les voix des deux groupes sont équivalentes
(3+3) qu'on suive l'opinion de 'Abdur-Rahmân b. 'Awf; écoutez et
obéissez et, quand il bat d'une main sur l'autre, suivez-le».
Al-Muttaqî rapporte aussi (Kanzul-'Ummâl,
3/160) à partir de Mohamed b. Jubayr citant son père: 'Umar dit:
«Si 'Abder-Rahmân b. 'Awf bat d'une main sur l'autre, prêtez
allégeance!»
Selon Aslam, 'Umar dit: «prêtez
serment d'allégeance à un homme désigné par
'Abder-Rahmân b. Awf et coupez la tête à quiconque s'y
refuse».
Il apparaît de ce qui
précède que le calife 'Umar concentra la question de la
candidature entre les mains de 'Abdur-Rahmân b. Awf à qui il
enjoignit de poser aux autres candidats la condition préalable de suivre
la politique des deux Sheikhs (les deux califes Abû Bakr et 'Umar). Ils
savaient d'une part que l'Imam 'Ali se refuserait sûrement à
considérer la politique des deux Sheikhs comme faisant partie des
piliers de la politique islamique (le Livre d'Allah et la sunnah du Messager
SAW), d'autre part que 'Uthmân y consentirait volontiers. Le dernier
bénéficierait alors de l'allégeance et 'Ali, dans le cas
où il s'y opposerait, serait menacé de mort.
En outre, cette thèse est prouvée
par le récit rapporté par Ibn Sa'd dans At-Tabaqât,
à partir de Sa'îd b. al-'Açi: «Ce dernier alla un
jour demander au calife 'Umar de lui accorder une parcelle de terre
supplémentaire en vue de l'élargissement de sa maison. Le calife
lui donna rendez-vous pour le lendemain après la prière de
l'aube. Une fois chez Sa'îd b. al-'Açi, le calife lui
délimita le terrain en le traçant des pieds. Quand Sa'îd le
supplia d'en augmenter la superficie (en raison de sa famille nombreuse), 'Umar
lui dit: «Cela te suffit et voici un secret que tu dois garder pour toi:
celui qui prendra le pouvoir après moi considérera bien ton lien
de parenté et satisfera ta demande». Sa'îd raconte:
«J'attendais alors jusqu'à ce que 'Uthmân fût
chargé du califat après délibération et
agrément. Par après, 'Uthmân m'a fait beaucoup de bien,
satisfait ma demande (antérieure) et m'a même associé dans "des
responsabilités"».
Le calife 'Umar avait donc informé
Sa'îd b. al-'Açi qu'un homme de sa famille (umayyade) prendrait le
pouvoir et déclaré que c'était une confidence à
bien garder. Il s'ensuit que la question de l'investiture de 'Uthmân a
été tranchée du vivant même du calife 'Umar et que
la désignation des six candidats fut manuvrée pour faire passer
l'affaire en douceur et à la satisfaction générale.
Quant à la mise de l'Imam 'Ali sous la
menace de l'exécution, le prouve, en plus de ce qui
précède, le récit rapporté par Ibn Sa'd à
propos du même Sa'îd b. al-'Açi: «Un jour 'Umar dit
à Sa'îd al-'Açi: «Pourquoi t'éloignes-tu de
moi comme si tu croyais que j'ai tué ton père? Ce n'est pas moi
qui l'ai tué, c'est 'Ali b. Abî Tâlib». Son
père (dans le camp des infidèles) fut tué dans la bataille
de Badr.
N'y avait-t-il pas là une incitation
contre l'Imam 'Ali et une vivification de la haine et des rancunes?
L'Imam 'Ali (a. s.)
savait que le califat fut volontairement écarté de lui
L'Imam 'Ali savait qu'on le repoussait
volontairement du califat. Toutefois, il continuait de participer aux
délibérations pour qu'on ne prétendît pas qu'il se
désintéressait du califat. Le récit suivant prouve que
l'Imam savait ce qu'on tramait contre lui.
Al-Balâdhurî (Ansâbul-Ashrâf,
5/19) rapporte que 'Ali s'est plaint auprès de son oncle Al-'Abbâs
de l'injonction de 'Umar, selon laquelle l'investiture devrait échoir
dans le groupe où se trouvait 'Abdur-Rahmân b. 'Awf. 'Ali dit:
«Par Allah, la partie est perdue pour nous!». Al-'Abbâs
demanda alors: «Ô mon neveu! comment le
sais-tu?» 'Ali répondit: «Sa'd n'ira pas à l'encontre
de son cousin 'Abder-Rahmân b. Awf; ce dernier est l'égal de
'Uthmân et son beau-frère c'est à dire que l'un ne
s'opposera sûrement pas à l'autre. Même si Az-Zubayr et
Talhah étaient de mon côté, cela ne me profiterait pas du
moment qu'Ibn 'Awf se trouve avec les autres». (Voir Al-'Iqdul-Farîd,
3/74).
Dans la référence
précédente (p. 21), Abû Mikhnaf rapporte ceci: quand 'Umar
fut enterré (un dimanche le 4e jour de son assassinat), les candidats
à la délibération s'abstenaient de tout acte pendant
qu'Abû Talhah guidait leur prière (faite en commun à la
Mosquée). Un matin, Abû Talhah les incita à la
délibération dans la maison du "Trésor public"
(ou dans la maison d'al-Miswar b. Makhramah). Quand leur discussion lui
paraissait interminable, 'Abdur-Rahmân b. 'Awf leur dit:
«Écoutez-moi: moi, je me retire ainsi que Sa'd (b. Abî
Waqqâs) pourvu que les quatre restants finissent par choisir. Sachez que
cela est devenu trop long, que les gens (les Médinois) s'impatientent de
connaître leur calife et imam et que les provinciaux ici présents
attendent d'en être informés avant de revenir dans leurs
contrées ...». Les candidats au califat répondirent: oui,
à l'exception de 'Ali qui s'est contenté de dire: «je vais
voir».
'Abdur-Rahmân informa Abû Talhah de
la proposition qu'il avait faite aux candidats et des réticences de
'Ali. Abû Talhah s'adressa à ce dernier et lui dit: «Ô
Abûl-Hassan! Sache qu'Abû Mohamed (Abdur-Rahmân b 'Awf) est
un homme de confiance pour toi et pour les Musulmans. Dis pourquoi tu chicanes
alors qu'il s'est retiré de la candidature! il
ne pourra donc pas mal agir au profit d'autrui!». 'Ali fit alors jurer
'Abder-Rahmân b. Awf qu'il ne se laisserait pas guider par ses passions,
qu'il préférerait le juste et le Vrai et qu'il ferait de son
mieux pour servir la Ummah (la communauté) et qu'il ne ferait pas preuve
de favoritisme au profit d'un proche parent. Quand 'Abder-Rahmân jura
à l'Imam 'Ali, celui-ci lui dit: «Choisis alors, bien
guidé!».
Ensuite 'Abdur-Rahmân fit jurer chacun des
candidats qu'il ne s'opposerait pas à lui s'il venait à
prêter allégeance à l'un d'eux, qu'ils seraient avec lui
contre celui qui se rebifferait.
'Abder-Rahmân prit alors la main de 'Ali
et lui dit: «T'engages-tu par le pacte d'Allah, si tu es investi du
califat, de ne pas porter Banî 'Abdel-Muttalib (son clan, sa famille) sur
les nuques des gens (les favoriser) et de suivre la Sîrah du
Messager d'Allah (SAW) sans en dévier ni y manquer!». 'Ali
répondit: «Je ne porterai pas le pacte d'Allah ainsi. Qui pourra
suivre (à la lettre) la Sîrah du Messager d'Allah (SAW)?
Néanmoins, je ferai de mon mieux, selon ma capacité et dans les
limites de la science que j'ai». Abder-Rahmân lâcha alors la
main de 'Ali. Ensuite, il fit de même avec 'Uthmân qu'il fit jurer,
par le pacte d'Allah (conclu avec les Musulmans) qu'il ne favoriserait pas
Banî Umayyah (son clan, sa famille) au détriment des gens, qu'il
suivrait la Sîrah du Messager d'Allah (SAW) et celle d'Abû
Bakr et de 'Umar sans s'y opposer. 'Uthmân jura. 'Ali dit alors:
«Abû 'Abdillahi ('Uthmân) a accepté volontiers ce que
tu as demandé! Prête-lui allégeance si tu veux».
Par après 'Abdur-Rahmân revint
auprès de 'Ali, lui demanda de jurer de suivre la sîrah
du Messager d'Allah et celle d'Abû Bakr et de 'Umar. 'Ali
répondit: je devrai faire preuve d'ijtihâd (effort
personnel basé sur la science)». Mais 'Uthmân continuait
à jurer qu'il se conformerait à la politique du Prophète
et à celle d'Abû Bakr et de 'Umar sans s'en écarter ni y
manquer. 'Abder-Rahmân battit alors la main sur la sienne et lui
prêta serment d'allégeance. Les autres candidats lui
emboîtèrent le pas. 'Ali qui était debout s'assit.
'Abder-Rahmân le menaça alors en disant: «Prête allégeance,
sinon tu seras exécuté!».
On rapporte que 'Ali est sorti très
fâché. Les hommes de la délibération le rejoignirent
et le menacèrent de mort s'il ne prêtait pas allégeance.
'Ali revint avec eux auprès de 'Uthmân et lui prêta
allégeance.
Dans le récit précédent, il
y a une altération des propos de l'Imam 'Ali (la suppression dans la
1ère proposition faite à 'Ali, du groupe nominal et "la sîrah
des deux Sheikhs (Abû Bakr et 'Umar)".
Le récit est plus complet dans l'histoire
d'Al-Ya'qûbî, 1/162: Abder-Rahmân emmena 'Ali b. Abî
Tâlib à l'écart, lui demanda de jurer par Allah de se
conformer, si le califat venait à lui échoir, au Livre d'Allah,
à la sunnah de Son Prophète et à la sîrah
d'Abû Bakr et de 'Umar. 'Ali répondit: «Je me conduirai,
dans les limites de ma capacité, conformément au Livre d'Allah et
à la Sunnah de Son Prophète». 'Abder-Rahmân
répéta alors la même proposition à 'Uthmân qui
répondit: «Oui, je me conduirai parmi vous selon le livre d'Allah,
la sunna de Son Prophète et la sîrah d'Abû Bakr et de
'Umar». De nouveau 'Abder-Rahmân alla voir d'abord 'Ali, ensuite
'Uthmân pour leur réitérer les mêmes propos. Chacun
des deux candidats réaffirme sa première réponse. En
troisième lieu, 'Ali lui dit: «Sache qu'avec le Livre d'Allah et
la sunnah de Son Prophète, on n'a pas besoin de la tradition
d'autrui». «En effet, ajouta 'Ali, tu t'acharnes à
m'éloigner de cette affaire (à écarter le califat de
moi)». Finalement 'Abder-Rahmân battit de la main sur celle de
'Uthmân (en guise d'allégeance).
Dans l'histoire d'At-Tabarî (Événements
de l'année 23, 3/297) ainsi que d'après Ibn al-Athîr
(3/37), l'Imâm 'Ali dit à 'Abder-Rahmân, le 3e jour de
l'investiture de 'Uthmân: «Tu lui as fait un don séculaire!
En fait, ce n'est pas la première fois que vous faites cause commune
contre nous. «Douce patience! Allah est Celui dont l'aide est
demandée contre ce que vous débitez» (V. 18/XII). Par
Allah! Tu ne l'as investi que pour qu'il te favorise de retour! Mais «Allah
crée chaque jour quelque chose de nouveau». (V. 29/LV) (voir
aussi Al-'Iqdul-Farîd, 3/76).
* * * * *
L'allégeance
prêtée serment à l'Imam 'Ali (a. s.)
Après l'assassinat de 'Uthmân, les
Musulmans se libérèrent de tout lien d'allégeance
antérieure. Ils se précipitèrent alors auprès de
'Ali b. Abî Tâlib et demandèrent de lui prêter serment
d'allégeance. At-Tabarî rapporte ceci (5/152; voir aussi Al-Kanz,
3/161, h/2471):
Les Compagnons du Messager d'Allah
allèrent chez 'Ali et lui dirent: «Cet homme a été
tué et il est nécessaire que les gens aient un imam (un calife).
Aujourd'hui, nous ne trouvons pas plus digne de cette affaire que toi, ni plus
glorieux ni plus proche du Messager d'Allah (SAW)!». 'Ali
répondit: «Ne faites rien (dans ce sens) peut-être est-il
mieux pour vous que je sois ministre (assistant) plutôt que
prince!». Ils dirent: «Non, par Allah! Nous ne te laisserons pas,
à moins que tu acceptes l'allégeance de notre part». 'Ali
dit: «Alors ce sera dans la Mosquée car mon allégeance ne
pourra se faire en cachette et devra bénéficier du consentement
des Musulmans ...».
Dans une autre version At-Tabarî rapporte
ceci: les Musulmans et les Ançars se réunirent - parmi eux,
Talhah et Az-Zubayr notamment - puis allèrent voir 'Ali et lui dirent:
«Ô Abûl-Hassan, viens qu'on te prête allégeance!»
Il répondit: «Je n'ai nul besoin de votre affaire! Je suis avec
vous j'accepterai celui que vous choisirez ...». «Par Allah! Nous
ne choisissons que toi», rétorquèrent-ils.
Ainsi, après l'assassinat de
'Uthmân, ils sont allés plusieurs fois chez 'Ali à qui ils
dirent finalement: «Les gens ne sont corrects qu'en présence d'une
autorité et tu vois que cela se fait attendre». 'Ali leur dit:
«Vous êtes venus me voir à maintes reprises. Si vous
acceptez ce que je vais vous dire, je me chargerai de votre affaire sinon je n'en
voudrai pas . Ils lui déclarèrent:
«Quel que soit ton propos, nous l'accepterons inshâ-Allah».
Il monta alors sur la chaire et les gens se réunirent autour de lui.
Ensuite, il dit: «En fait, je n'aime pas votre affaire, mais vous avez
insisté. Sachez donc que je n'agirai pas arbitrairement en dehors de
vous, que je garderai les clefs des finances publiques et que je n'en prendrai
pas un dirham en dehors de vous, avez-vous accepté?»
- Oui, répondirent-ils.
- Ô Seigneur! Sois-en
témoin». Puis 'Ali reçut, à cette condition, leur
allégeance.
Al-Balâdhurî rapporte ceci: quand
'Ali est rentré chez lui, les gens - Compagnons et autres - accoururent
chez lui en disant: «'Ali est le prince des croyants». Une fois
chez lui, ils lui dirent: «Il est nécessaire d'avoir un imam;
tends la main: nous voulons te prêter allégeance!». 'Ali
leur fit remarquer que cela était du ressort d'Ahlu-Badr (les Compagnons
qui assistèrent avec le Prophète à la bataille de Badr) et
que celui qui bénéficierait de leur consentement serait
nommé calife. Alors tous les Badrî allèrent voir 'Ali et
lui dirent: «On ne voit pas plus digne que toi dans cette affaire!
...» 'Ali monta alors sur la chaire. L'y rejoignit en premier pour lui
prêter allégeance Talhah qui avait un doigt estropié. 'Ali
en tira mauvais augure et dit: «Comme il est digne de parjurer!».
Dans le même sens, At-Tabarî
rapporte que lorsque Habîb b. Dhu'ayb vit Talhah prêter serment
d'allégeance, il remarqua: «c'est une main estropiée qui a
commencé par prêter serment d'allégeance; cette affaire
n'ira pas bien! ...».
Après cette étude de la
réalité historique et des circonstances dans lesquelles le
pouvoir politique en Islam vit le jour, nous étudions à
présent les points de vue respectifs des deux Ecoles au sujet du califat
et de l'Imamat.
Chapitre 2
De l'Imamat:
Recherches dans
l'Ecole des califes
La terminologie de
cette recherche
1)- Ash-Shûrâ (la délibération)
Ash-Shûrâ et les substantifs de la
même famille signifient l'action de se consulter les uns et les autres
afin de déterminer l'opinion de tout un chacun. C'est dans cette
terminologie linguistique (et non-Shar'î) que le terme est employé
dans le Sait Coran: «Leur affaire est objet de
délibération entre eux». (V. 38/XLI)
2)- Al-Bay'ah
En langue arabe c'est d'abord une transaction de
vente consentie par les deux parties et manifestée par l'action de
battre une main sur l'autre en guise de conclusion de l'acte.
Les Arabes se servaient de moyens divers pour
conclure une alliance ou un pacte. Par exemple, en concluant un pacte, ils
devaient ensemble immerger leurs mains dans une cuvette pleine de parfum ou de
sang.
En Islam, al-Bay'ah (ou serment
d'allégeance) est un acte par lequel une partie contracte l'engagement,
vis-à-vis de l'autre partie, de lui obéir conformément aux
clauses de leur accord. Dans le Coran, Allah -exalté soit-IL - dit:
«Ceux qui te prêtent serment d'allégeance ne font que
prêter serment à Allah. La main d'Allah est posée sur leurs
mains». (V. 10/XLVIII).
Le premier serment d'allégeance exigé des Musulmans par le Messager d'Allah
se tint à la 1ère 'Aqabah et eut pour objet l'Islam (en
général).
Le deuxième serment d'allégeance se tint aussi Al-'Aqabah. Il eut pour
objet le droit de faire la guerre (le cas échéant) en vue
d'établir la société islamique.
Ainsi, en premier lieu c'était ce qu'on
appelle la Bay'ah des femmes, limitée à la
fidélité à la religion de l'Islam, exempte de l'obligation
de combattre.
Le troisième serment d'allégeance se tint sous l'arbre d'al-Hudaybiyyah
quand les Musulmans sortirent en sacralisation d'al-'Umrah
(n'ayant que l'intention de faire à la Mecque le petit
pèlerinage). Mais parce que les quraychites les empêchèrent
de la Ka'bah et manifestaient un air belliqueux, le voyage pour la 'Umrah
(petit pèlerinage) se transforma en l'obligation de combattre, la
nouvelle situation exigea la prise d'un nouveau serment d'allégeance
ayant pour objet la nouvelle action envisagée. Effectivement ce nouveau
serment d'allégeance porta ses fruits et effraya les Mecquois. C'est
ainsi que le Messager d'Allah (SAW) s'est conduit en matière
d'allégeance (pour l'Islam, pour la défense par le combat et en
cas de guerre). On rapporte aussi dans sa tradition qu'il stipulait dans le
serment d'allégeance l'obligation de lui obéir dans la limite de
la capacité et à condition d'avoir "la puberté
légale".
De la sîrah du Messager (SAW), il
apparaît que le serment d'allégeance repose sur trois piliers:
1- La personne qui s'engage
2- La personne au profit de qui se fait
l'engagement
3- L'accord sur l'obéissance.
La Bay'ah repose aussi sur la
compréhension des clauses convenues et des actes qu'implique
l'obligation d'obéir. Sur le plan de la forme, les parties contractantes
battent d'une main (de celui qui prête serment d'allégeance) sur
l'autre (de celui pour qui bl'allégeance est tenue). Ainsi le mot "Bay'ah"
(allégeance) est un terme Shar'î. Les conditions de sa
réalisation en conformité avec la loi islamique ne sont pas
claires et nettes dans les esprits de certains musulmans. Ces conditions de
validité sont:
- La partie qui prête serment
d'allégeance doit être intègre et libre. L'enfant et le
simple d'esprit en sont dispensés par la loi. Comme le contrat de vente
ne produit pas d'effet sous la contrainte, le serment d'allégeance ne
peut se faire sous l'oppression et par l'épée.
- La partie pour qui l'allégeance est
prise ne doit pas être un pécheur déclaré
(publiquement) parce que le Messager (SAW) dit: «Nulle obéissance
au profit de quelqu'un qui désobéit à Allah».(131)
L'allégeance n'est pas valide quand elle
a pour objet de commettre ce qu'Allah a défendu de faire et de violer
Ses injonctions et celles de Son Messager (SAW). Dans le hadîth, il est
dit: «S'il ordonne d'accomplir une contravention (un péché),
il ne doit être ni écouté ni obéi».(132)
3) et 4)- Le calife et le prince des croyants
Al-Khilâfah, en langue arabe, signifie la
représentation d'autrui. Al-Khalîfah (le calife) est
celui qui remplace autrui et remplit son rôle. C'est dans ce sens que le
terme est utilisé par le Saint Coran:
«Souvenez-vous que le Seigneur a fait
de vous Khulafâ' après le peuple de Noé». (V.
69/VII)
Dans la sunnah, le hadîth dit:
«Ô Allah! Fais miséricorde à mes
Khulafâ'». Comme définition, le Messager (SAW) dit:
«Ce sont ceux qui viendront après moi, qui rapporteront mon
hadîth et ma tradition (sunnah)». Le terme de Khalîfah
dans le Coran et la Sunnah n'est donc pas le nom donné à celui
qui gouverne au nom du Messager d'Allah (SAW). Ceci est resté ainsi
jusqu'à l'époque de 'Umar b. al-Khattâb qu'on appelait Khalîfah
du Khalîfah du Messager. Ensuite il fut appelé
"prince des croyants". L'appellation passa dans l'usage
jusqu'à l'époque des Abbassides qui qualifiaient leur gouverneur
de Khalîfah d'Allah ou de prince des croyants. A l'époque
des Ottomans, le gouverneur musulman suprême fut appelé "Khalîfah"
tout court. Jusqu'à nos jours, ce terme reste courant parmi les
Musulmans.
Les deux surnoms "Khalîfah"
et "prince des croyants" relèvent donc de la terminologie
musulmane et non de la terminologie Shar'î.
5)- L'Imam
En langue arabe, l'Imam est celui que suivent
les gens. C'est ainsi que le Coran l'utilise mais il attache à l'Imamat
certaines conditions citées (par exemple) dans la parole d'Allah
révélée à Ibrâhîm (a. s.):
«Je vais faire de toi un Imam pour les
hommes Abraham dit: Et pour ma descendance aussi? Le seigneur dit: Mon alliance
ne concerne pas les injustes». (V. 124/II)
L'Imamat est donc une institution émanant
d'Allah (divine) et un pacte qui ne vaut point pour quiconque contracte
l'injustice, qu'on soit injuste envers soi-même ou envers les autres. Le
mot Imam est donc un terme Shar'î et relève de la
terminologie islamique.
6)- Al-'Amr - 'Ulûl-'Amr
Le terme 'Amr est employé dans
la langue arabe, l'usage musulman et les textes islamiques dans le sens de
l'autorité (la Wilâyah) exercée sur les gens et du
commandement.
La locution "'ûlûl-'Amr"
peut être considérée comme un terme islamique étant
donné qu'elle est employée dans le Sait Coran dans le sens de
l'autorité sur les gens:
«Ô vous qui croyez!
Obéissez à Allah! Obéissez au Messager et à ceux
d'entre vous détenant l'autorité ...». (V. 59/VI)
Les deux Ecoles (celle des califes et celle
d'Ahlul-Bayt) divergent quant à l'identification des 'ûlûl-'Amr
(pluriel) et de Waliyyul-'Amr (singulier) (détenteurs de
l'autorité) après le Messager (SAW):
l'Ecole d'Ahlul-Bayt estime que l'Imam ou Waliyyul-'Amr
(le détenteur de l'autorité) qui n'entre en fonction
qu'après le Messager (SAW) est désigné par Allah Qui
choisit qui IL veut, le Prophète informant sa Communauté de cette
désignation, tandis que l'Ecole des califes estime que Waliyyul-'Amr
est désigné soit par l'allégeance soit par le fait
accompli s'il a pris le pouvoir par la force. Après qu'il s'empare de
l'autorité suprême, quel qu'il soit, on lui doit
obéissance. De là, ils (des partisans de cette Ecole) ont
obéi à Yazîd qui a tué et assujetti la descendance
du Messager (SAW), saccagé et violé Médine la ville du
Prophète, tué ses Compagnons et les Tâbi'îne qui
vivaient encore à cette époque et catapulté la Ka'bah.
Après tous ces actes abominables, les partisans de cette Ecole
continuent jusqu'à nos jours de donner à Yazîd le surnom de
"prince des croyants".
7)- Al-Waçiyyu - le Waçî du Prophète (le légataire).
Al-waçî dans le Livre et la sunnah
est la personne mandatée par quelqu'un d'effectuer après sa mort
quelque chose qui l'intéresse, que le testateur en charge le
légataire expressément en lui disant: fais ceci ou cela
après moi ou qu'il en informe les autres en leur disant: un tel est
chargé de faire ceci ou cela après moi ou tout autre locution
signifiant (clairement) l'établissement d'une Waçiyyah
(un testament). Le Waçî du Prophète est la
personne envers qui il stipule le droit de veiller après lui sur (les
intérêts) la Shari'ah et de la Communauté.
Le Califat et l'Imamat.
Le point de vue de l'Ecole des califes
Après la clarification de la terminologie
utilisée (dans ce domaine), il devient aisé pour nous
d'étudier les points de vue respectifs des deux Ecoles au sujet du
califat et de l'Imamat.
L'argumentation de l'Ecole des califes
a- Le calife Abû Bakr dit:(133) «On ne reconnaît la dévolution
du pouvoir qu'à Quraysh parce qu'ils en sont dignes de par leur
lignée et leur territoire. Je vous propose l'un de ces deux hommes
('Umar et Abû 'Ubaydah) prêtez serment d'allégeance
indifféremment à l'un d'eux!
b- 'Umar b. al-Khattâb dit: «Qu'on
ne se trompe pas en voulant suivre l'exemple de l'allégeance brusque
mais accomplie, prêtée à Abû Bakr. Celle-ci fut
effective-ment ainsi mais Allah nous en a épargné les
méfaits. Parmi vous, il n'y a pas l'égal à Abû Bakr.
Si donc, sans délibération préalable des Musulmans,
quelqu'un prête serment d'allégeance à un homme, l'un et
l'autre risquent de se faire tuer».
Critique de ces deux arguments:
L'argumentation d'Abû Bakr à la Saqîfah
ainsi que celle des autres protagonistes suivent une logique tribaliste. Quand
les Ançars délaissèrent la dépouille mortelle du
Prophète (SAW) dans sa petite famille et accoururent au préau (Saqîfah)
de Banî Sâ'idah pour investir Sa'd, ils ne prétendaient pas
que celui-ci était meilleur que les autres ou plus digne qu'eux de
l'autorité suprême mais se contentaient simplement de dire:
«Les gens sont chez vous, dans votre ombre et personne ne pourra oser
vous contrarier».
A leur tour les Muhâjirîne parmi les
Qurayshites ont eu recours à la même logique tribale quand ils ont
dit: «Quraysh est, parmi les Arabes, plus digne de cela par leur "Maison".
Qui ose nous disputer le pouvoir de Muhammad alors que nous sommes les siens et
son clan?», ajoutèrent-ils. On peut dire la même chose tant
de l'intervention de l'Ançarite qui dit: «De nous un prince et de
vous un prince» que de celle du Mahâjirite qui dit: «Nous
sommes les princes et vous les ministres».
De même, Ussayd b. Hudayr,
l'Ançarite qui favorisa le camp des Muhâjirîne et amena sa
tribu Al- 'Aws à lui emboîter le pas, fut mû par un mobile
tribal: craignant la prise du pouvoir par Al-Khazraj - les frères
ennemis d'autrefois - et se rappelant la guerre "Al-Bi'âth" qui
les opposait (avant l'Islam mais à peine vingt ans les en
éloignèrent), les Ançars d'Al-'Aws dirent: «Par
Allah! S'il arrive une fois qu'al-Ançars (l'autre tribu ançarite)
prenne le pouvoir, elle aura et à jamais le mérite à vos
dépens et ne vous concédera rien de cette affaire. Levez-vous
donc et prêtez serment d'allégeance à Abû
Bakr».
Enfin les Muhâjirîne qurayshites se
sont assurés la victoire par l'entrée à Médine de
la tribu "Aslam" dont les membres remplirent les rues de la ville et
prêtèrent serment d'allégeance à Abû Bakr au
détriment d'al- Ançars.
Quant aux propos du calife 'Umar relatifs
à la Shûrâ (délibération), on voit
qu'il n'a avancé aucun argument puisé du Livre ou de la sunnah
mais se basa uniquement sur son Ijtihâd (effort personnel
d'interprétation). Celui qui considère la Sîrah
(la conduite) des Compagnons et leurs dires au même titre que le Livre
d'Allah et la tradition de Son Messager c'est à dire des sources de la Shari'ah
islamique, pourrait alors arguer de la tradition de 'Umar pour fonder le
pouvoir politique ou établir le califat. Toutefois, les propos de 'Umar
s'opposent à sa propre tradition et celle du premier calife Abû
Bakr dont l'allégeance fut brusque comme l'a qualifié le calife
'Umar. Ce dernier fut nommé au poste suprême, sans
délibération préalable, par le premier calife. De
même 'Umar dit: «Si 'Abû 'Ubaydah avait été encore
en vie, je l'aurais désigné à ma succession». Et cet
autre propos: «Si Sâlim le serviteur affranchi d'Abû Hudhafah
avait été encore en vie je l'aurai désigné à
ma succession. Ces affirmations s'opposent (catégoriquement) à
l'engagement d'établir le califat ou la succession sur la base de la Shûrâ
(la délibération des Musulmans).
Même en dehors de ces contradictions et en
supposant qu'il soit valable d'établir le califat sur la shûrâ
'umarienne, quelles sont ses modalités? Quel est le nombre des
membres de l'"Assemblée" délibérante? En guise
de réponse à cette dernière question on dit: «Le
nombre des délibérants est limité à six. Cinq
d'entre eux prêteront serment d'allégeance au
sixième». Ensuite sur quel fondement fut basé l'octroi
à 'Abder-Rahmân b. 'Awf le droit exclusif de prendre la
décision finale au détriment des autres membres de
"l'assemblée" délibérante? Sur quel fondement
fut basé l'ordre de tuer quiconque s'opposerait à la
décision de 'Abder-Rahmân et à son opinion personnelle? De
qui craignait-on une éventuelle opposition à l'opinion de
'Abder-Rahmân? Enfin, l'Ecole des califes a-t-elle appliqué une
fois le principe de la shûrâ 'umarienne ou établi
sur sa base durant les siècles passés un régime califal au
profit de l'un de ses califes?
Le point de vue de
l'Ecole des califes au sujet du califat - récapitulatif
Ce point de vue se résume en deux choses.
A) Le califat s'établit par:
1- La Shûrâ (la
délibération)
2- La Bay'ah (l'allégeance)
3- L'imitation dans ce domaine des actes des
Compagnons
4- La force et la coercition
B)- L'obligation d'obéir au calife
à qui le serment d'allégeance est prêté quand bien
même il désobéit à Allah (Il s'agit maintenant de
discuter successivement chacun de ces arguments).
1)- La Shûrâ comme argument
'Umar fut le premier à avoir
évoqué la shûrâ et son application pour
établir le califat mais il n'avança pas d'argument (valable)
stipulant que l'Imamat en Islam s'établit par le biais de la shûrâ.
Ce ne sera que tardivement que les partisans de l'Ecole des califes avanceront
comme argument deux versets coraniques: le fait que le Messager (SAW) a
consulté ses Compagnons dans certaines affaires importantes et un mot
d'ordre de l'imam. Etudions alors leur argumentation.
Le Verset coranique: « ... Dont l'affaire, entre eux, est
objet de délibération ... » (V. 38/XLII)
C'est un fragment du verset 38 de la sourate
"la délibération. Après lui vient cette
proposition : "(qui) sur ce que Nous leur avons attribué, font
dépense (en aumônes). Ce qui veut dire d'une part que les deux phrases
ne signifient que la recommandabilité de l'acte dont il est question et
non l'obligation de délibérer et de dépenser.
D'autre part, la délibération
n'est valide que si l'affaire en question n'a pas fait l'objet d'un jugement
rendu par Allah et Son Messager. Le prouve ce verset coranique:
«Lorsque Allah et Son Messager ont
pris une décision, il ne convient ni à un croyant, ni à
une croyante de maintenir son choix sur cette affaire. Celui qui
désobéit à Allah et à Son Messager s'égare
totalement et manifestement». (V. 36/XXXIII)
Nous verrons un peu plus loin les
déclarations divines et prophétiques sur la question de l'Imamat.
De telles déclarations ne laissent aucune place à la
délibération.
Le Verset coranique: «consulte les sur l'affaire»
(V. 159/III)
Ce verset est situé dans un contexte
englobant les versets 139-166 de la sourate Al-'Imrân. Tous parlent des
batailles menées par le Messager (SAW) et de la victoire qu'Allah y
accorda à Ses serviteurs. Dans certains de ces versets le Coran
s'adresse aux Musulmans et aux guerriers, parmi eux, en particulier et les
exhorte; dans d'autres, il ne s'adresse qu'au Messager (SAW). Ce verset en fait
partie: «Tu as été doux à leur égard par
une miséricorde d'Allah. Si tu avais été rude et dur de
cur, ils se seraient séparés de toi. Pardonne-leur. Demande
pardon pour eux; consulte-les sur l'affaire; mais, lorsque tu as pris une
décision, place ta confiance en Allah - Allah aime ceux qui ont
confiance en Lui». (V. 159/III)
Il apparaît donc clairement que dans ce
verset l'ordre de consulter avait pour but la consécration de ma douceur
et de la miséricorde dans le traitement des Compagnons et non l'ordre
d'agir selon leur opinion.
Le prouve la suite du verset: «Mais
lorsque tu as pris une décision, place ta confiance en Allah»,
c'est à dire aie confiance et agis comme tu l'entends. De tout le
contexte, on comprend aussi que la consultation n'est de mise qu'en cas de
guerre comme le clarifiera ce qui suit:
Le Messager (SAW) consulte ses Compagnons
Leur consultation s'est limitée aux
périodes des expéditions militaires comme le confirme le
compagnon Abû Hurayrah: «En matière de consultation des
Compagnons, je n'ai pas vu quelqu'un qui l'a fait plus que le Messager d'Allah
(SAW); il ne les consultait qu'en période de guerre».(134)
Bien sûr, le but poursuivi par le Messager
(SAW) en matière de consultation n'était pas d'apprendre de ses
Compagnons ce qu'il devait faire. Parfois, le Prophète avait recours
à ce style pour inculquer à ses compagnons le bon choix qui
était le sien avant de le leur apprendre et qui devient le leur aussi
(du fait de la consultation). Citons à titre d'exemple la consultation
qui précéda la bataille de Badr. On sait qu'Allah avait appris
d'avance le résultat de cette bataille à Son Messager qui savait
que la victoire serait remportée contre l'armée de Quraysh.
Après la délibération, il le leur apprit et leur montra
les lieux où les guerriers qurayshites allaient être battus. Par
le biais de la consultation, le Prophète (SAW) orientait les Musulmans
vers ce qu'il convenait de faire. Loin de lui la méthode des rois et des
tyrans qui dictent et imposent leurs opinions aux gens, en disant par exemple:
«Nous le Roi ... avons donné notre ordre royal de ...».
Le début du verset précité
(V. 159/III) corrobore ce que nous avons dit. En effet, ici, la consultation
des Compagnons par le Prophète (SAW) est une pierre de touche de la
douceur et de la miséricorde émanant d'Allah.
Il arrivait aussi que le Prophète (SAW) consultait
ses Compagnons pour atteindre un autre but que la tendresse et
l'amabilité. Il s'agissait parfois de procéder à une
véritable éducation psychique, spirituelle ou morale. On peut
citer à cet égard la consultation qui précéda la
bataille de 'Uhud. Le Prophète (SAW) n'était pas d'avis de
quitter Médine pour aller à la rencontre de l'ennemi. Mais comme
ils insistaient pour y aller, il porta alors ses vêtements de guerre en
vue de se diriger vers 'Uhud. A ce moment là, les Compagnons
regrettèrent leur insistance en disant: «Ô Messager d'Allah!
On n'aurait pas dû s'opposer à toi; mais fais ce que bon te
semble!». Le Prophète (SAW) leur rétorqua: «Je vous
avais appelé à la retenue mais vous avez refusé, mais
sachez qu'il ne convient pas qu'un Prophète dépose sa cuirasse
après l'avoir portée avant qu'Allah ne tranche entre lui et ses
ennemis».
Ainsi, tout en sachant que l'opinion de ses
Compagnons n'était pas pertinente, le Prophète (SAW) y souscrivit
afin d'élever leur moral et les éduquer. S'il n'avait pas
répondu positivement à leur désir très fort de
sortir (à la rencontre de l'ennemi) cela aurait laissé un
très mauvais effet sur leur psychisme et engendré la faiblesse,
l'hésitation ou la défection en temps de guerre.
2)- L'argument de la bay'ah (l'allégeance)
Nous avons vu que la bay'ah est un acte
qui ne s'accomplit - comme le contrat de vente - que par consentement mutuel et
non par l'épée et la coercition.
- Qu'il n'y a pas de bay'ah dans le
péché
- Ni allant à l'encontre des injonctions
d'Allah
- Ni au profit de quelqu'un qui
désobéit à Allah.
Nous avons vu aussi que la première bay'ah
qui fut contractée était celle prêtée à
Abû Bakr. Sur sa validité, repose la bay'ah de 'Umar qui
a été effectuée sur ordre d'Abû Bakr. De même
sur la validité de la bay'ah du calife 'Umar repose celle du
calife 'Uthmân à qui on prêta serment d'allégeance
sur ordre du calife 'Umar qui, après avoir désigné six
candidats au poste de calife successeur, leur enjoignit de prêter serment
d'allégeance à celui d'entre eux que 'Abder-Rahmân b 'Awf
aurait désigné et de tuer celui qui s'y opposerait.
Nous avons vu aussi comment le serment
d'allégeance fut prêté à Abû Bakr au
préau (la Saqîfah) de Banî Sâ'idah, comment l'aide
apportée par la tribu "Aslam" dont les membres remplirent les
rues de Médine, était décisive, comment le feu fut
porté jusqu'à la maison de Fatima (a. s.) la fille du
Prophète (SAW), parce que chez elle s'étaient retranchés
les récalcitrants à la bay'ah d'Abû Bakr, comment
les Banî Hâchim refusaient de prêter serment
d'allégeance à Abû Bakr durant la vie de la fille du
Prophète (SAW) et comment Sa'd b. 'Ubâdah qui avait refusé
de prêter serment d'allégeance à Abû Bakr fut
tué par deux flèches tirées par les "djinns"!
C'était ainsi que la bay'ah se
déroulait à Médine. Ailleurs, ceux qui refusèrent
de prêter serment d'allégeance à Abû Bakr ou de
verser la zakât (l'aumône légale) à ses
percepteurs, furent tués, leurs femmes tombées en
captivité et leurs biens confisqués.
Citons à ce propos l'exemple de
Mâlik b. Nuwayrah, Compagnon et gouverneur du Messager (SAW), et de sa
famille appartenant à la tribu de Tamîm. Pendant la nuit,
l'armée de Khâlid b. al- Walîd les envahit. Ils prirent
alors leurs armes. Les envahisseurs leur disent: «Nous sommes des
musulmans». Les compagnons de Mâlik dirent: «Et nous sommes
des Musulmans». Les guerriers de Khâlid leur dirent: «Si vous
êtes comme vous dites, déposez alors les armes». Ils les
déposèrent et firent ensuite la prière (commune) avec les
guerriers de Khâlid. Par après ceux-ci les capturèrent et
les conduisirent devant Khâlid b. al-Walîd qui ordonna de couper la
tête à Mâlik. Celui-ci regarda vers son épouse - qui
était très belle - et dit à Khâlid: «C'est
celle-ci qui m'a tué» (c'est à cause d'elle que je vais
être exécuté). Khâlid lui dit: «C'est Allah Qui
te tue à cause de ton reniement de l'Islam». Mâlik dit:
«Nous sommes dans l'Islam (toujours musulmans)». Après qu'on
l'a tué, Khâlid ordonna de se servir de sa tête comme
trépied à leur marmite. Pendant cette nuit même et avant
que Mâlik ne fût enterré, Khâlid épousa sa
veuve(135) (sans attendre
l'écoulement Shar'î de la retraite légale
exigée par le Sait Coran, abstraction faite des circonstances de
l'affaire).
On peut citer aussi l'exemple des tribus de
Kindah. Ziyâd b. Labîd le percepteur d'Abû Bakr s'empara
d'une chamelle appartenant à un jeune homme de Kindah. Celui-ci lui
demanda d'en prendre une autre. Ziyâd refusa la proposition sous
prétexté qu'il avait (déjà) marqué la
chamelle par la marque de la Zaqât (l'aumône
légale). Le jeune homme alla voir Hârithah b. Surâqah, un
notable de Kindah et lui raconta ce qui s'était passé, en
ajoutant qu'il était très attaché à cette chamelle
et qu'il aimerait bien voir sa chamelle détachée et remplacée
par une autre de son troupeau. Quand Hârithah parla à Ziyâd,
intercédant en faveur du jeune homme et que Ziyâd refusa son offre
avec véhémence, Hârithah alla lui-même dans le troupeau
de la zakât, sortit la chamelle en question et dit au jeune homme:
«Prends la et si quelqu'un t'interpelle, je lui casserai le nez par
l'épée». Hârithah dit aussi: «Quand le Messager
d'Allah (SAW) était vivant, nous lui avons obéi. Si un homme de
sa propre famille (Ahlu Baytihi) avait pris sa place, nous lui aurions obéi
également. Quant à Ibn Abî Quhâfah (Abû Bakr),
je jure par Allah que nous ne lui devons ni obéissance ni
allégeance». Ensuite, il a donné des vers de poésie
dont celui-ci:
Nous avons obéi au Messager d'Allah
Quand il était parmi nous,
Ô combien m'étonnent ceux qui
Obéissent à Abû Bakr!
Al-Hârith, un autre notable de la tribu
Kindah dit à Ziyâd: «Tu invites à obéir
à un homme à qui on n'a pas été engagé. Ni
à nous, ni à vous, aucune stipulation n'a été
notifiée à son sujet!». Ziyâd lui dit: «Tu dis
vrai mais nous l'avons choisi pour ce poste». Al-Hârith demanda
alors: «Dis-moi pourquoi vous en avez écarté les siens (la
famille du Prophète SAW) alors qu'ils sont, parmi les gens, les plus
dignes de ce poste puisque Allah - gloire à Lui - dit: «D'après
le Livre d'Allah, la parenté a la priorité sur les liens existant
entre les croyants et entre les émigrés (Muhâjirîne)».
(V. 6/XXXIII)
Ziyâd répondit ainsi: - Les
Muhâjirîne et les Ançars connaissent mieux que toi leurs
intérêts.
- Non par Allah, répliqua
Al-Hârith, vous n'avez écarté le califat de ses ayants
droit que par envie de votre part. Moi, je ne peux croire que le Messager
d'Allah (SAW) a quitté ce bas-monde sans avoir établi aux gens le
guide qu'ils devraient suivre. Comme ce que tu dis est inacceptable, je te
demande de décamper d'ici». Ensuite Al-Hârith dit: C'est le
Messager qui était obéi.
Voilà qu'il est parti
Qu'Allah prie sur lui
Il n'a pas été remplacé
Ziyâd détacha alors les chameaux de
la zakât et se dirigea vers Médine. Là il informa
Abû Bakr de ce qui s'était passé. Le calife le dota alors
de quatre mille guerriers. En chemin vers Hadramawt, Ziyâd attaqua
à l'improviste, ici et là, certaines tribus de Kindah, tuant des
hommes et faisant des prisonniers. Ainsi Banû Hind furent conquis par
Ziyâd qui tua des hommes parmi eux et s'empara de leurs femmes et
enfants. Arrivé à la contrée de Banîl-'Aqil (de
Kindah) il les prit à l'improviste, les combattit quelque temps, leur
infligea la défaite et s'empara de leurs femmes et de leurs biens.
Par surprise, ses cavaliers envahirent aussi, au
milieu de la nuit, la contrée de Banî Hujr (de Kindah), en
tuèrent deux cents, en firent cinquante prisonniers et
s'emparèrent des femmes et des enfants.
Ensuite Al-Ash'ath b. Qays combattit Ziyâd
et l'assiégea dans la ville de Taym, récupéra les biens et
les enfants qu'il rendit à leurs familles. Pour le contenter, le calife
envoya une missive à Al-Ash'ath b. Qays qui répliqua en disant
à l'émissaire: «Abû Bakr, ton compagnon, nous prend
pour incrédules si nous nous opposons à lui et ne fait pas de
même vis-à-vis de son compagnon (Ziyâd) que tua mon peuple
et mes cousins ». L'émissaire lui dit: «Oui, ô
Al-Ash'ath! L'incrédulité s'applique effectivement à toi
parce qu'Allah - gloire à Lui - te la flanque en raison de ton
opposition à la communauté des Musulmans». Un jeune cousin
d'Al-Ash'ath frappa alors l'émissaire de son épée et le
tua. Comme Al-Ash'ath approuva l'acte du jeune homme, la plupart de ses compagnons
se fâchèrent contre lui à tel point qu'il ne resta avec lui
qu'environ deux milles hommes. Ziyâd écrivit alors à
Abû Bakr pour l'informer de l'exécution de l'émissaire et
du siège dont ils furent l'objet. Quand le calife consulta les musulmans
sur la décision qu'il devrait prendre, Abû Ayyub Ançârî
lui dit: «Ces gens comptent un grand nombre de guerriers et ils peuvent
en réunir davantage. Je propose que tu en fasses reculer ton
expédition le long de cette année dans l'espoir qu'ils
t'apporteront leur zakât, de bon gré, l'année
prochaine!!»
Abû Bakr dit alors: «Par Allah,
s'ils me refusent un licou (attache de bête) de ce que le Prophète
leur avait imposé, je me verrai dans le droit de les combattre
jusqu'à ce qu'ils reviennent vers le vrai (dans la légalité)».
Ensuite, le calife écrivit à 'Ikrimah b. Abî Jahl, lui
ordonnant d'aller avec les fidèles parmi les Mecquois à la
rencontre de Ziyâd, en emmenant avec lui ceux qu'il pourrait mobiliser
dans les contrées avoisinantes.
'Ikrimah partit avec deux mille cavaliers pour
"Ma'rib". Les habitants de Dubâ décidèrent de les
combattre pour les empêcher d'aller faire la guerre à leurs
cousins de Kindah. Ils commencèrent par chasser le gouverneur
nommé par Abû Bakr. 'Ikrimah reçut alors l'ordre de leur
faire la guerre, de ne pas les ménager et de lui envoyer les
prisonniers. Quand 'Ikrimah les eut assiégés, ils
demandèrent à signer la paix et à verser la zakât
mais il n'accepta de leur part que la capitulation. Quand ils se sont rendus,
'Ikrimah entra dans leur fort, tua leurs notables, réduisit leurs femmes
et leurs enfants en captivité, s'empara de leurs biens et en envoya
d'autres à Abû Bakr.
Quand celui-ci voulut tuer les hommes et
partager les femmes et les enfants, 'Umar lui dit: «Ô calife du
Messager d'Allah! Ces gens sont musulmans et jurent fort qu'ils n'ont pas
renié l'Islam ...». Abû Bakr les mit alors en prison
où ils resteraient jusqu'après sa mort. 'Umar les libéra.
Quand 'Ikrimah rejoignit Ziyâd et
qu'Al-Ash'ath en prit connaissance, il se réfugia dans le fort
d'An-Nagîr où il mit à l'abri ses femmes et celles de sa
tribu. Ceux parmi les hommes de Kindah qui avaient quitté Al-Ash'ath
lorsqu'il cautionna l'assassinat de l'émissaire d'Abû Bakr,
regrettèrent d'avoir abandonné les leurs et décidèrent
d'aller combattre Ziyâd. Celui-ci s'en effraya et dit à 'Ikrimah:
«A mon avis, tu maintiendras le siège de ce fort et moi j'irai
à la rencontre des autres». Ziyâd acquiesça en
disant: «Très bien mais si tu as la victoire sur eux, ne range ton
épée qu'après l'extermination du dernier homme parmi
eux!». Je ferai ce que je pourrai, répondit 'Ikrimah.
Ce dernier rencontra les renforts d'Al-Ash'ath
et se livrèrent une guerre où, dans les deux camps, les
succès alternèrent avec les échecs. Al-Ash'ath qui n'en a
pas été informé, qui supporta mal l'état de
siège, la faim et la soif, demanda à Ziyâd de lui accorder
la vie sauve ainsi qu'à sa famille et à une dizaine de ses
hommes.
Le traité de paix fut écrit et
envoyé par Ziyâd à 'Ikrimah qui le montra aux tribus de
Kindah (ne voyant plus de raison pour continuer la guerre), elles
cessèrent le combat et s'en allèrent. Ziyâd entra alors
dans le fort et, (faisant fi du traité signé avec Al- Ash'ath!),
commença par couper les têtes des guerriers. Par après,
Abû Bakr ordonna, par écrit, à 'Ikrimah de lui envoyer les
captifs à Médine. Ceux qui sont restés en vue furent donc
enchaînés et expédiés à Médine.(136)
C'est ainsi que s'accomplit l'allégeance
d'Abû Bakr, qualifiée de brusque par le calife 'Umar et
légitimant le califat d'Abû Bakr, de 'Umar et de 'Uthmân.
C'est cette allégeance qu'on érige en argument (pour fonder
l'établissement du califat).
3)- Le troisième argument: Les actes des
Compagnons
Arguer des actes des Compagnons serait valable
si leur conduite (sîrah) faisait partie des sources de la
législation islamique au même titre que le Livre et la Sunnah ou
si la Révélation recommandait de les suivre comme elle l'avait
fait pour le compte du Messager d'Allah (SAW):
«Vous avez, dans le Messager d'Allah,
un bel exemple ...». (V. 21/XXXIII)
«Prenez ce que le Messager vous donne
et abstenez-vous de ce qu'il vous interdit». (V. 7/LIX)
Sans cela, nous ne sommes pas tenus d'invoquer
les actes des Compagnons comme arguments.
En outre, nous ne savons pas qui des Compagnons
nous devons prendre comme exemple alors que les actes et les propos des uns
s'opposent à ceux des autres. D'où les divergences dans les
positions des 'ulémas (savants) quant à la façon
d'établir le califat: suffit-il qu'un seul homme prête serment
d'allégeance à un autre pour que ce dernier soit nommé
calife? D'aucuns l'affirment parce qu'Al-'Abbâs,
l'oncle du Prophète (SAW) dit à 'Ali (a.s): «Tends la main
que je te prête serment d'allégeance. Si je le fais les gens le
feront après moi».
Ou bien faut-il s'inspirer des propos de 'Umar
pour qui l'allégeance d'Abû Bakr était brusque? Ou encore
de la conduite de Mu'âwiyah qui brandit l'épée contre le
calife légitime de l'époque, (l'Imam 'Ali (a. s.)?
Nul besoin, après ce que nous avons
étayé, de discuter tous ces points de vue. Reste l'argument selon
lequel l'Imam 'Ali (a. s.) dans Nahjul-Balâghah, se basa sur la
validité de la Shûrâ, de l'allégeance et des
actes des Compagnons.
La discussion de cet argument
D'aucuns arguent du récit rapporté
par Ash-Sharîfur-Radîy à partir de l'Imam 'Ali (a. s) (Nahjul-Balâghah,
les lettres de l'Imam dont-celle-ci adressée à Mu'âwiyah):
«Ceux qui avaient prêté
serment d'allégeance à Abû Bakr, 'Umar et 'Uthmân
viennent d'en faire autant pour moi, dans les mêmes conditions et pour
les mêmes causes. Aucune contestation n'était acceptable ni pour
ceux qui y avaient pris part ni pour ceux qui y étaient absents. Car la
délibération y était aussi bien l'affaire des
Muhâjirîne que celle d'Al-Ançars. Si l'unanimité se
réalise sur le choix d'un dirigeant (Imam, calife), ce choix est
satisfaisant (agréé par Allah?). S'il arrive que par contestation
de ce choix ou par hérésie, quelqu'un rompe avec la
volonté de la nation on tâche de le persuader d'y retourner. En
cas de refus, il sera combattu, pour s'être écarté de la
volonté (du chemin) des Croyants. Ensuite Allah le chargera de ce dont
il se sera chargé ...»(137)
Dans cette lettre, l'Imam fonde son
argumentation à l'encontre de Mu'âwiyah sur l'allégeance,
la délibération et l'unanimité des Muhâjirîne
et d'Al- Ançars. Ce qui veut dire pour certains que l'Imam est d'avis
que le califat établi sur ces fondements est valide. En fait
Ash-Sharîfur-Radîy (le compilateur de Nahjul-Balâghah)
choisissait parfois des passages extraits des lettres et des sermons de l'Imam,
qu'il jugeait d'une rhétorique sans égal et délaissait le
reste comme il fit avec la lettre en question, dont l'intégralité
se trouve dans le livre de Nasr b. Muzâhim çaffîne. En voici
le texte:
«Au Nom d'Allah, le Clément le
Miséricordieux.
»Ensuite sache que tu es tenu en Syrie de
respecter l'allégeance qui me fut accordée à Médine
car ceux qui avaient prêté serment d'allégeance à
Abû Bakr, 'Umar et Uthmân ont fait autant pour moi, dans les
mêmes conditions et pour les mêmes causes. Aucune contestation
n'était acceptable ni pour ceux qui y avaient pris part ni pour ceux qui
y étaient absents. Car la délibération y était
aussi bien l'affaire des Muhâjirîne que celle d'al-Ançars.
Si l'unanimité se réalise sur le choix d'un dirigeant (Imam,
calife), ce choix sera satisfaisant. S'il arrive que par contestation de ce
choix ou par convoitise, quelqu'un rompt avec cette volonté, il y sera
ramené par la persuasion. En cas de refus, il sera combattu pour
s'être écarté de la volonté (du chemin) des
Croyants. Ensuite Allah le chargera de ce dont il se sera chargé et lui
fera affronter la Géhenne et quel détestable "devenir"!
Talhah et Az-Zubayr m'ont prêté serment d'allégeance puis
se sont parjurés. Leur parjure ayant été
l'équivalent de la contestation, je les ai combattus pour cela
jusqu'à ce vînt la Vérité et qu'apparût
l'Ordre d'Allah en dépit de leur aversion. Rejoins alors dans cette
affaire les Musulmans qui t'ont précédé et sache
qu'à ton sujet, l'état sauf est ce que j'aime le plus à
moins que tu t'exposes à la tentation. Si tu le fais, je te combattrai
en implorant l'aide d'Allah contre toi. Pour ce qui est des meurtriers de
'Uthmân dont tu as trop parlé, rejoins d'abord les Musulmans dans
leur unité, ensuite si tu les cites (ces meurtriers) à
comparaître devant moi, je statuerai entre vous selon le Livre d'Allah.
Quant à l'affaire à laquelle tu aspires, ce n'est en fait qu'une
tromperie à la manière de celle qu'on inflige à l'enfant
pour le sevrer. Ô Mu'âwiyah! de par ma
vie, si tu jugeais raisonnablement et en l'absence de tout caprice, tu te
rendrais compte que je suis plus que quiconque, innocent de l'assassinat de
'Uthmân. Sache aussi que tu fais partie des affranchis de la Mecque, qui
n'ont droit ni au califat ni à la délibération. A toi et
à ton voisinage, j'ai envoyé mon représentant, Jarîr
b. 'Abdullah un homme de foi et un Muhâjir, pour que tu prêtes
auprès de lui ton serment d'allégeance et nulle puissance que par
Allah».(138)
A la lecture de cette lettre, il devient clair
que l'Imam 'Ali fit valoir contre Mu'âwiyah l'argument qu'ils se sont
engagés de considérer - l'Imam dit à Mu'âwiyah:
«tu es tenu en Syrie de respecter l'allégeance qui me fut
accordée à Médine, comme c'était le cas avec
'Uthmân qui reçut à Médine l'allégeance que
tu étais tenu, en Syrie, de respecter. Tes semblables vivant
à l'extérieur de Médine sont tenus également de se
plier à l'allégeance qui me fut accordée à
l'intérieur de Médine, comme cela s'était passé
à l'époque de 'Umar».
C'est ainsi qu'agissent les hommes raisonnables
dans leur argumentation: ils n'avancent à l'encontre de l'adversaire que
ce qu'il est tenu de considérer comme arguments.
D'autre part dans cette lettre ou bien l'Imam a
dit: «... ce choix sera satisfaisant (comme l'avait rapporté Nasr
b. Muzâhim) ou bien la même phrase avec cet ajout "pour
Allah".
Selon la première version quand
l'unanimité des Croyants se réalise sur le choix d'un dirigeant,
cela sera satisfaisant pour eux à condition qu'ils n'aient pas
prêté serment d'allégeance sous la contrainte et la menace
de l'épée.
Si l'on suppose que c'est la deuxième
version qui correspond à ce que dit l'Imam, cela revient au même
car l'unanimité d'al-Muhâjirîne et d'al-Ançars y compris
l'Imam 'Ali et les petits-fils du Messager, Hassan et Hussayn aurait fait
sûrement l'objet d'une satisfaction divine.
Enfin je ne sais pas pourquoi ces auteurs
arguent de cette lettre figurant dans Nahjul-Balâghah et
oublient ou font semblant d'oublier les autres propos de l'Imam contenus dans
le même livre. En voici un exemple (chap.: "Des pensées de
l'Imam, de sa sagesse"):
«Quand le "Prince des Croyants"
fut informé de ce qui s'était passé à la Saqîfah,
après la mort du Messager d'Allah, il dit: «Qu'avaient dit
al-Ançar?».
- De nous un prince et de vous un prince»,
lui répond-on. Pourquoi n'avez-vous pas argué à leur
encontre que le Messager d'Allah (SAW) avait commandé qu'on fît du
bien aux bienfaiteurs parmi eux et qu'on pardonnât au fautif? Y a-t-il
là un argument valable à leur encontre?, lui demanda-t-on.
- Oui, puisque si c'était à eux
que devrait échoir le califat, il serait inopportun de commander quoi
que ce fût à leur profit!
Ensuite, l'Imam (a. s.) demanda: «Qu'avait
dit Quraysh alors?»
- Elle (la tribu) argua qu'elle était
l'arbre du Messager (SAW), lui répondit-on. Ils (les Quraychites)
arguèrent de l'arbre et en perdirent le fruit.
Dans un contexte, l'Imam (a. s.) dit:
«Comme c'est étonnant! Que le califat s'établit par la
compagnie (du Prophète) et non par la compagnie et la parenté
ensemble!»
Ar-Radîy rapporte dans ce sens des vers de
poésie attribués à l'Imam (a. s.): si c'est par le
principe de la délibération.
Que tu as pris possession de leurs affaires,
Comment était-ce possible alors que
Les délibérants étaient
absents?
Si par contre, c'est par la parenté que
tu as évincé l'adversaire,
Comment était-ce et d'autres sont plus
dignes du Prophète et plus proches?
Mais le discours de l'Imam (a. s), le plus
complet relativement à cette affaire se trouve dans son fameux sermon
appelé Ash-Shiqshiqiyyah dans lequel il dit:
«Par Allah! un
tel se l'est appropriée (la succession) alors qu'il savait que ma place
est celle du pôle des dirigeants ... Comme c'est étonnant! Tandis
qu'il cherchait à s'en démettre de sa vie, il l'assigna à
un autre après sa mort ... Pourtant j'ai gardé patience
malgré la longueur de la durée et la dureté de
l'épreuve. Avant de s'en aller (mourir), l'autre désigna pour le
califat un groupe de candidats, prétendant que je serai l'un d'entre
eux! Depuis quand doutait-on de ma priorité face au premier qui se l'est
appropriée pour qu'on me joigne après à ces
comparables?!».
Ils (les partisans de l'Ecole des califes) ont
oublié ou feint d'oublier tous ces propos de l'Imam 'Ali (a. s.) pour ne
s'en tenir qu'au propos dans lequel l'Imam ne fit qu'avancer des arguments
admis par Mu'âwiyah et les autres adversaires.
4)- L'établissement du califat par la
force et la coercition Discussion de cet argument.
Quiconque explore l'histoire de l'Islam trouve
que depuis le début jusqu'à l'époque des califes-ottomans,
le califat reposait sur la coercition exception faite du califat de l'Imam 'Ali
(a. s). Cette donnée historique est vraie et indiscutable.
Voici leur propos (de partisans de l'Ecole des
califes) selon lequel: «Quiconque devient calife et se nomme "prince
des croyants" après avoir remporté la victoire par
l'épée sur ces concurrents se trouve (légitimement
établi) de telle façon qu'il est illicite pour tout musulman qui
croit en Allah et au Jugement dernier de passer une nuit sans le
considérer comme Imam, peu importe que cet homme soit vertueux ou
libertin».(139)
Je ne sais de quoi parlent ces excellences! De
l'application de la loi d'Allah pour l'établissement du pouvoir
politique dans la société islamique ou de la loi de la jungle,
propice aux lions et aux léopards?!
Mais pour qu'on ne nous reproche pas de citer
les propos des Anciens et passer sous silence ceux des contemporains qui ne
partagent pas leurs idées et leurs croyances et pour qu'on ne dise pas
«qu'on soit dans le présent de l'Islam»,(140) nous citons le titre d'un livre publié
à l'intention des écoles d'un pays où se trouvent la Ka'bah,
la Maison Sacrée et la Mosquée du Messager des croyants:
«Vérités sur le prince des croyants Yazîd b.
Mu'âwiyah», publié par le ministre d'al-Ma'ârif et
diffusé dans les deux lieux sacrés (à la Mecque et
Médine). Ce livre vante les mérites de Yazîd et rapporte
des hadîths faisant son éloge. C'est ce Yazîd qui donna
l'ordre de catapulter la Ka'bah et de livrer pendant trois jours la
Mosquée du Messager et son enceinte sacrée à son
armée qui, à Médine tua les hommes et viola les femmes.
5)- L'obligation d'obéir à l'imam
(au calife) quand bien même il désobéit au Messager (SAW).
Muslim rapporte dans son sahîh,
à partir de Hudhayfah: le Messager d'Allah dit: «Après moi
viendront des imams qui ne suivront pas ma guidance et ne s'inspireront pas de
ma sunnah; des hommes ayant des curs sataniques dans des corps humains».
Hudhayfah demanda : «Que ferais-je alors ô Messager d'Allah!
Si j'y étais présent?». Le Prophète répondit:
«Tu écoutes et tu obéis au prince quand bien même il
frappe ton dos et s'empare de tes biens. Ecoute et obéis».
Ibn 'Abbâs rapporte que le Messager
d'Allah dit: «Que celui qui désapprouve ou déteste quelque
acte de son imam fasse preuve de patience car celui qui meurt, après
avoir quitté d'un empan la communauté (musulmane), fait une mort
jâhiliyyah (mort en impie).(141)
Dans son commentaire du Sahîh de
Muslim, An-Nawawî dit (chap., "L'obligation d'obéir aux
princes quand il ne s'agit pas de perpétrer un
péché"):
«La totalité des partisans de la
sunnah, jurisconsultes, traditionalistes et théologiens affirment que
l'imam (le calife) ne doit pas abdiquer pour prévarication, injustice ou
abolition des droits, ni être démis de ses fonctions. Il n'est pas
permis non plus de se soulever contre lui. Il faut plutôt l'exhorter et
l'inciter à la crainte (d'Allah) en raison des hadîths relatifs
à ce sujet».
Avant ce passage, An-Nawawî dit dans le
même sens:
«Quant à la rébellion et
à la lutte armée contre eux (les califes), elles sont illicites
de par le consensus des Musulmans quand bien même ils (ces princes) sont
prévaricateurs et injustes. Les hadiths rapportés concordent sur
ce point. Les gens de la sunnah sont unanimes à dire que le sultan
n'abdique pas pour cause de prévarication».(142)
Ainsi l'Ecole des califes rapporte des
récits selon lesquels le Messager d'Allah (SAW) aurait prohibé le
soulèvement contre le prince injuste et infidèle à la
sunnah du Messager (SAW) et prescrit l'obéissance à son
égard.
Quant à l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s) elle
rapporte à partir du Messager d'Allah (SAW) des récits
opposés comme celui de l'Imam Al-Hussayn (a. s), petit fis du Messager
d'Allah (SAW): «Si quelqu'un voit un prince injuste, profanant le
sacré d'Allah, parjurant Son pacte, opposé à la sunnah du
Messager d'Allah (SAW) et abusant des créatures d'Allah par le
péché et l'agressivité et qu'il n'essaie de changer cet
état de chose ni par une parole ni par un acte, Allah sera dans le droit
de lui réserver le même sort que lui (l'injuste)».(143)
De la comparaison des récits
rapportés par l'une ou l'autre Ecole, on comprend que ce que l'Ecole des
califes a rapporté se situe dans le cadre des intérêts
recherchés (par les narrateurs) et du soutien apporté aux
autorités en place. Cela se passait au début de l'époque
Umayyade. Ensuite, ces récits furent notés au temps de la
compilation des recueils des hadîths au début du IIème
siècle de l'hégire. Comme on qualifiait ces
récits d'authentiques, l'unanimité s'est faite autour d'eux. La
mise en application de ces récits et les études qu'on leur
consacrait amenaient les savants des palais, traditionnistes, magistrats,
orateurs, imams des Vendredis et leurs semblables à s'y accrocher avec
insistance à travers les siècles et partout dans le monde
(islamique) et ce, depuis le califat umayyade en Syrie et en Andalousie en
passant par les 'Abbassides de Bagdad, les Ottomans de Turquie, les
Mamâlîk d'Egypte, les Saljuqides, les Ghaznawiyyîne d'Iran et
les Kurdes de Syrie. Les Autorités les comblaient alors de prestige, de
fortune et des autres faveurs du palais. Leurs partisans qui en profitaient
aussi les suivirent...
Ainsi les Musulmans se sont divisés en
deux Ecoles: celle des califes dont les patrons comblaient de biens, de prestige,
de fonctions et de faveurs les personnes qui en diffusaient les idées,
et l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.) qui résista à ces idées et
aux récits rapportés dans le but de soutenir les Autorités
en place et leurs thèses. Le pouvoir gouvernant réserva alors
à cette Ecole toute une gamme d'assassinat, d'incarcération de
persécution, de campagnes d'extermination, d'incinération des
livres et des bibliothèques afin d'écarter de la
société et de cacher aux yeux des Musulmans, ses idées qui
garantissent la sauvegarde de la sunnah du Messager (SAW).
Après tout cela, quelle quantité
de vérités peut-elle parvenir à cette époque?
Chapitre: 3
De l'Imamat
Recherches dans
l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.)
Nous avons passé en revue les principes
et les idées de l'Ecole des califes et ses arguments au sujet de
l'Imamat.
Les partisans de l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s.)
posent comme conditions que l'Imam après le Prophète soit un
homme infaillible, exempt des péchés, désigné de la
part d'Allah - gloire à Lui - et textuellement nommé par Son
Prophète (SAW) en raison de la parole d'Allah adressée à
Son messager Ibrâhîm (Abraham) (a. s.):
«Je vais faire de toi un Imam pour les
Hommes. - (Feras-Tu de même) de ma descendance?, demanda (Abraham). (Mais
le Seigneur) dit: Mon pacte ne vaudra point pour les injustes». (V.
124/II)
L'Imamat est donc un pacte émanant
d'Allah Qui informe Son Prophète de l'homme qui en est chargé
comme IL l'informe des autres prescriptions et stipulations divines.
D'après le verset précédent
l'Imamat ne vaut point pour un Injuste. En revanche, celui qui n'a jamais fait
preuve d'injustice envers lui-même et envers les autres s'avère
infaillible.
L'Imamat est donc un pacte et une investiture
divine, le Messager ne fait que transmettre (ce pacte à la
communauté). Ceci implique l'infaillibilité chez la personne qui
en est chargée. Ces deux conditions préalables à l'Imamat
sont toutes les deux remplies par les Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.).
L'infaillibilité
d'Ahlul-Bayt (a. s.)
Allah - gloire à Lui - informa
qu'Ahlul-Bayt c'est à dire Muhammad, 'Ali, Fatima, Al-Hassan et Al-
Hussayn (SAW) sont infaillibles et exempts des péchés:
«... Ô vous, les gens de la
Maison (Ahlul-Bayt) Allah veut seulement éloigner de vous la souillure
et vous purifier totalement». (V. 33/XXXIII)
La révélation de ce verset et ce que fit le Messager (SAW) en cette occasion.
'Abdullah b. Ja'far b. Abî Tâlib
rapporte ceci(144): lorsque le
Messager d'Allah (SAW) vit que la Miséricorde descendait il ordonna:
«Faites-venir, faites-venir!». Safiyyah demanda alors: «Qui
ô Messager d'Allah?». «Ahlul-Baytî» (les gens de
ma maison 'Ali, Fatima, Hassan et Hussayn), répondit-il. Quand ils
arrivèrent, le Prophète (SAW) les couvrit de son manteau puis
leva les mains en disant: «Allâhumma, voici mes Proches,
prie sur Muhammad et sur ses Proches!». La révélation est
venue alors avec ce verset: «Ô les gens de la Maison! Allah
veut seulement éloigner de vous la souillure et vous purifier totalement».
Dans le récit rapporté par la
mère des Croyants Aïsha, "le manteau était en
étoffe noire".(145)
Le compagnon Wâ'ilah b. al-Asqa' donne une
autre précision: «Le Messager d'Allah (SAW) rapproche un jour 'Ali
et Fatima qu'il fit s'asseoir devant lui puis fit s'asseoir Hassan et Hussayn
sur ses cuisses ...».(146)
La mère des Croyants 'Ummu Salamah dit
dans un autre récit: «Ce verset (celui de la purification) fut
révélé chez moi où il y avait sept (personnes):
Jabrâ'îl, Mikâ'îl (a. s.), 'Ali, Fatima, Al-Hassan et
Al-Hussayn (a. s). Moi, j'étais près de la porte. J'ai
demandé: Ô Messager d'Allah! Ne fais-je pas partie d'Ahlul-Bayt?. Le prophète répondit: tu es dans le bien;
tu fais partie des épouses du Prophète».(147)
Dans le verset coranique précité,
Allah parla des gens infaillibles vivant en particulier à
l'époque du Messager qui se chargea de les désigner par l'acte,
de les couvrir de son manteau et par la récitation du même verset
à la porte de leur maison des mois durant au vu et au su de plusieurs de
ses Compagnons.
Ce verset et ce que le Messager d'Allah (SAW) a
dit et fait pour son interprétation suffisent largement pour prouver
l'infaillibilité des gens de la maison, Ahlul-Bayt (a. s.). Sur le plan
pratique, l'histoire n'a pas enregistré une infraction à cette
infaillibilité de la part des Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) quand bien
même l'histoire islamique fut écrite par des savants appartenant à
l'Ecole des califes et souvent acculés des siècles durant
à noter dans leurs livres ce qui devrait satisfaire les califes. Ceux-ci
s'activaient à travers les époques pour éteindre la
lumière des Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) de peur de voir les Musulmans
portés à les suivre ou à leur prêter serment
d'allégeance. C'est pour cette raison que ces Imams (a. s.) furent
assassinés ou emprisonnés et persécutés surtout
à l'époque des banî 'Umayyah (ou mayyades) qui avaient
donné l'ordre d'insulter l'Imam 'Ali (a. s.) dans les sermons des
Vendredis, sur les chaires des mosquées et de châtier la
Shî'ah d'Ahlul-Bayt, c'est à dire leurs partisans et ceux qui les
aimaient et croyaient en leur Imamat. Malgré tout cela, on ne trouve pas
dans l'Histoire quelque petite faute ou erreur imputée aux Imams
d'Ahlul-Bayt (a. s.); ce qui prouve qu'effectivement Allah les a
éloignés de toute souillure et les a purifiés totalement,
comme le dit le verset coranique précité.
Ce qui précède consiste l'argument
le plus important dans l'Ecole d'Ahlul-Bayt, relativement à l'infaillibilité
des gens de la Maison (a. s.).
Ci-après, un ensemble de traditions
prophétiques se rapportant à l'Imamat d'Ahlul-Bayt (a. s.),
sachant qu'Allah - gloire à Lui -, dit à propos de Son
Prophète:
«Il n'est pas dans l'erreur. Il ne
parle pas sous l'empire de la passion. C'est seulement une
Révélation qui lui a été transmise».
(Vs. 2-3-4/LIII)
L'importance que
donnait le Messager (SAW) à la désignation de ses
légataires
La question de la dévolution de l'Imamat
après le Messager (SAW) (la succession) était d'une grande
importance et ne fut esquivée ni par le Prophète ni par son
entourage. Tous y pensèrent dès le début. C'est ainsi que
Bayharah de Banî 'Amir b. Ça'ça'ah posa comme condition
préalable à la conversion des membres de sa tribu à
l'Islam, que le pouvoir leur soit dévolu après le Messager (SAW).
Dès le début de son apostolat, le
Prophète (SAW) pensait à la question de sa succession et uvrait
dans ce sens. Ainsi, le jour où il reçut l'allégeance pour
l'édification de la société islamique, le Prophète
signala cette question à ses Compagnons. Al-Bukhârî, Muslim,
An-Nassâ'î, Ibn Mâjah, Mâlik, Ahmed et d'autres
traditionnistes rapportent (version d'Al- Bukhârî):
- 'Ubâdah Açâmit dit:
«Nous avons prêté serment
d'allégeance au Messager d'Allah (SAW) aux termes d'écouter et
d'obéir dans l'adversité comme dans la félicité,
quand nous sommes pour et quand nous sommes contre et de ne pas disputer
l'affaire à ses ayants droits...».(148)
Soixante douze hommes et deux femmes
ançarites prêtèrent serment d'allégeance dans ces
termes, s'engageant à ne pas disputer l'affaire à ses ayants
droit. L'affaire dont il s'agit dans cette tradition authentique est la
même qui sera plus tard (après la mort du Prophète)
disputée au préau (la Saqîfah) de Banî
Sâ'idah. Les dépositaires dans cette affaire sont ceux que le
Coran signale dans ce verset:
«Obéissez à Allah,
obéissez au Messager et à ceux d'entre vous détenant
l'autorité». (V. 59/IV)
A l'occasion de l'allégeance
contractée par les Ançars, le Messager d'Allah (SAW) ne
désigna pas par le nom son dépositaire parce qu'il n'était
pas opportun de le faire: n'étant pas un homme d'Al- Ançars,
certaines personnes qui ont prêté serment d'allégeance
auraient mal supporté cela à cette époque. Mais les termes
du serment d'allégeance étaient clairs: qu'on ne dispute pas
l'autorité à celui qui sera désigné par
après!
Lors d'une autre cérémonie, dans
une communauté plus petite que celle d'al-Ançars
(susmentionnée) le Messager d'Allah (SAW) désigna le
détenteur de l'autorité après lui et nomma son
dépositaire et son calife. C'était le jour où il invita
ses proches à embrasser l'Islam lorsque Allah
lui enjoignit de le faire dans ce verset:
«Avertis ton clan le plus proche!».
(V. 214/ XXVI); le récit y afférent est rapporté par
plusieurs traditionnistes et biographes tels: At-Tabarî, Ibn
'Assâkir, Ibn al-Athîr, Ibn Kathîr, Al-Muttaqî et
d'autres.(149)
D'après ce récit, le Messager
(SAW) dit à 'Ali b. Abî Tâlib: «Certes, voici mon
frère, mon dépositaire et mon calife parmi vous. Ecoutez-le donc
et obéissez-lui. Les gens se sont levés alors en riant et en
disant à Abî Tâlib: il t'a ordonné d'écouter
ton fils et de lui obéir».
C'était en l'an trois de l'apostolat et
la première fois que le Messager d'Allah (SAW) appela ouvertement
à l'Islam, désigna l'Imam après lui et le présenta
à ses proches. La raison pour laquelle le Messager l'a fait à
cette occasion et non dix ans après, lors de l'allégeance
contractée par al-Ançar en vue d'établir la
société islamique, est que l'Imam en question ('Ali (a. s.)
n'appartient pas à l'une des tribus d'al-Ançars et les
sociétés s'édifiaient à cette époque sur une
base tribale. Il n'était pas alors opportun ou sage d'obtenir leur
allégeance pour un Imam non ançarite. Il se contenta en cette
occasion de les faire s'engager à ne pas disputer l'autorité
à son dépositaire.
Le Messager d'Allah (SAW) donnait donc beaucoup
d'importance à sa succession: tantôt il nomma son successeur,
tantôt il stipula dans le contrat de l'allégeance qu'on ne lui
disputerait pas son rang, tantôt il récusait la convoitise des
prétendants à ce poste.
Un autre fait concrétisait l'importance
accordée par le Messager (SAW) à sa succession: chaque fois qu'il
lui arrivait de sortir de Médine, de s'absenter pendant quelques jours,
il désigna quelqu'un pour l'y représenter durant son absence
fût-elle d'un seul jour comme se fut le cas lors de la bataille d'Uhud
(une montagne située à un mile de Médine) ou lors de la
bataille du fossé (al-Khandaq) qui s'est déroulée à
Médine même mais comme le Prophète (SAW) était pris
par la guerre, il dut désigner quelqu'un (pour l'expédition des
affaires courantes); (voir à ce sujet: Al-Mas'ûdî, At-Tanbîh
wal-'Ishrâf, de "L'an 2 à l'an 8 de
l'hégire").
Si c'était donc une habitude du Messager
(SAW) que de désigner quelqu'un pour le remplacer à Médine
pendant une partie de la journée ou quand il est très
occupé à l'intérieur même de Médine, que
ferait-il alors pour sa communauté avant de la quitter pour
l'au-delà? La laisserait-il sans berger? Ne désignerait-il
personne pour être sa référence après lui? C'est ce
que nous allons étudier inchâ Allah dans ce qui suit:
Les traditions
prophétiques relatives à la désignation; De son
dépositaire (le détenteur de l'autorité après lui)
Commençons ici par la tradition des
prophètes (a.s) relative à la désignation de leurs
successeurs dans leurs communautés respectives. Al-Mas'ûdî(150) en donna la chaîne depuis Adam jusqu'au
sceau des Prophètes (SAW):
- Le dépositaire d'Adam était
Hibatullah ou Sheth (a. s.) en hébreu.
- Le dépositaire d'Ibrâhîm
était Ismâ'îl (a. s)
- Le dépositaire de Ya'qûb
était Yûssuf (a. s).
- Le dépositaire de Mûssâ
était Yusha' b Nun (Josué), descendant de Yûssuf (a. s.),
ce dépositaire fut combattu par Safûrâ, l'épouse de
Mûssâ (a. s.).
- Le dépositaire de 'Issâ
(Jésus) était Sham'ûn (a. s.).
- Le dépositaire du Sceau des
prophètes Muhammad (SAW) était 'Ali b. Abî Tâlib, puis
les onze Imams de ses descendants (a. s.).
Le dépositaire
du Messager (SAW): Son ministre, son héritier et son successeur. Al-Waçîy (le dépositaire) dans les hadiths du
Messager (SAW)
Nous avons déjà rapporté le
récit de l'avertissement de ses proches par le Prophète (SAW) qui
leur dit en présence de Banî Hâshim: «Certes voici mon
frère, mon dépositaire et mon successeur parmi vous,
écoutez-le donc et obéissez-lui».
Par ce propos, le Messager (SAW) désigna
son dépositaire et son calife et ordonna de lui obéir. Or, Allah
- gloire à Lui - dit: «Prenez ce que le Messager vous donne».
(V. 7/LIX).
At-Tabarânî rapporte à partir
de Salmân (r. d.) qui dit:
«J'ai demandé, ô Messager
d'Allah! chaque prophète avait un
dépositaire; qui est le tien?». Le Prophète ne me
répondit pas sur le coup mais, par après, lorsqu'il m'a vu, il
m'appela: «Salmân!». Je répondis: «Oui, et
j'accourus vers lui. Il me demanda: «Sais-tu qui était le
dépositaire de Mûssâ?». Je répondis:
«Oui, c'était Yusha' b. Nun». Il demanda alors: «Pour
quelle raison?». J'ai dit: «Parce qu'il était le plus savant
de la communauté». Le Prophète me dit alors: «Mon
dépositaire, mon confident et le meilleur que je puisse laisser
après moi pour l'accomplissement de ma promesse et l'acquittement de ma
dette est 'Ali b. Abî Tâlib».(151)
Abû Ayyûb rapporte que le Messager
d'Allah (SAW) dit à sa fille Fatima (a. s.): «Ne sais-tu pas
qu'Allah - gloire à Lui - s'est penché sur les Habitants de la
terre, en choisit d'abord ton père et en fit un prophète; ensuite
il en choisit ton époux et me révéla l'ordre de vous
marier et de le prendre pour dépositaire».(152)
Abû Sa'îd rapporte aussi que le
Messager d'Allah (SAW) dit: «Certes mon dépositaire, mon confident
et le meilleur que je puisse laisser après moi pour l'accomplissement de
ma promesse et l'acquittement de ma dette est 'Ali b. Abî
Tâlib».(153)
Anas b. Mâlik rapporte aussi que le
Messager a fait (un jour) ses ablutions, a accompli une prière de deux
Rak'at et me dit: «Le premier qui entre par cette porte est l'Imam des
Vertueux, le maître des Musulmans, le bourdon de la religion et le sceau
des dépositaires ...». 'Ali (a. s.) vint le premier. Alors Le
Messager (SAW) se leva rayonnant et lui donna l'accolade ...».(154)
Buraydah, à son tour, rapporte que le
Prophète (SAW) dit: «Chaque prophète a un
dépositaire et un héritier. Le mien est 'Ali».
Dans son livre Al-Mahâssine et Al-Massâwi',
Al- Bayhaqî rapporte un récit dont voici le résumé:
Jabrâ'îl (a. s.) apporta d'Allah un don pour que le Messager (SAW)
en fît cadeau à son cousin et dépositaire 'Ali b. Abî
Tâlib ...
Le testament dans les
livres des nations antérieures
Dans son livre Waq'atu Saffîne,
Nasru b. Muzâhim rapporte ceci (un récit semblable se trouve dans Târikh
Bagdâd d'Al-Khatîb):
«En se dirigeant vers Saffîne,
l'Imam 'Ali constata que son armée avait soif en plein désert. Il
la conduisit alors jusqu'à une roche et aida les hommes à
l'arracher (pour trouver de l'eau). L'armée y but à satisfaction.
A côté, il y avait un monastère. Quand l'abbé fut
informé de l'événement, il dit: ce monastère n'a
été construit que par cette eau (de la roche) et ne put l'en
extraire qu'un prophète ou un dépositaire de
prophète».(155)
Le testament dans les récits des
Compagnons et des Tâbi'îne
1)- Dans le sermon d'Abî Dhar: A l'époque de 'Uthmân, Abû Dhar
se tint un jour debout à la porte de la mosquée du Messager
d'Allah (SAW), donna un sermon et dit: «... et Muhammad est
l'héritier de la science adamique et des mérites des
prophètes tandis que 'Ali b. Abî Tâlib est le
dépositaire de Muhammad et l'héritier de sa science ...».
2)- Dans des propos d'al-Ashtar: Quand les gens prêtèrent serment
d'allégeance au Prince des Croyants (a. s), Mâlik b.
al-Hârith al-Ashtar dit: «Ô les gens! Voici le
dépositaire des dépositaires, l'héritier de la science des
prophètes; celui dont l'effort est grandiose et beau; le Livre d'Allah
témoigne de sa foi et le Messager témoigne de ce qui l'attend
comme agrément au Paradis. Ses Vertus sont complètes; son
passé glorieux, sa science et son mérite sont indubitables tant
chez les Contemporains que chez les Anciens».(156)
3)- Le récit de 'Amru b. al-Hamiq
al-Khuzâ'î: Lorsque
le Prince des Croyants rassembla les gens à Al-Khûfah (en Iraq)
pour leur parler de sa décision d'aller à Saffîne où
il combattrait Mu'âwiah, 'Amru b. al-Hamiq al-Khuzâ'î se leva,
s'adressa à l'Imam et dit: «Ô Prince des Croyants! Ce n'est
ni pour une quelconque parenté entre toi et moi, ni pour recevoir
quelque bien que ce soit de toi, ni pour me faire accorder un pouvoir
susceptible de me rendre célèbre, que je t'ai aimé et
prêté serment d'allégeance! Je t'ai aimé pour tes
cinq qualités: tu es le cousin du Messager d'Allah (SAW), son
dépositaire, le père de sa descendance qui reste parmi nous (en
souvenir) du Messager d'Allah (SAW), le premier à avoir embrassé
l'Islam et, de tous les Muhâjirîne, ta contribution au Jihâd
est la plus importante!».(157)
4)- Dans une lettre de Mohamed b. Abî Bakr: de la lettre qu'il a envoyée à
Mu'âwiah, Mohamed b. Abî Bakr écrivit ceci: «Comment,
malheur à toi! Te permets-tu de te comparer à 'Ali alors qu'il
est l'héritier du Messager d'Allah, son dépositaire, le
père de sa descendance, le premier homme à l'avoir suivi et le
dernier à l'avoir quitté pour l'au-delà. Il lui confiait
ses secrets et le fit participer à son affaire!».(158)
5)- Dans une lettre de 'Amru b. al-'Açi: Al- Khawârizmî rapporte le contenu
d'une lettre envoyée par 'Amru b. al-'Aç à Mu'âwiyah
à qui il dit: «Quant à l'affaire à laquelle tu m'as
invité: t'aider dans le faux et brandir l'épée contre 'Ali
alors qu'il est le frère du Messager d'Allah, son dépositaire,
son héritier, celui qui acquitte sa dette, remplit sa promesse et il est
l'époux de sa fille ...».(159)
6)- Dans les propos de l'Imam 'Ali (a. s.) et
dans son argumentation:
Al-Khawârizmî rapporte ce propos de l'Imam 'Ali (a. s.): «Je
suis le frère du Messager d'Allah (SAW) et son dépositaire
...».(160)
Al-Ya'qûbî évoque aussi
l'argumentation des Khawârij (les dissidents), dans laquelle ils lui
reprochent d'avoir gâché le testament. En guise de réponse,
l'Imam (a. s.) leur dit: «Quant à votre propos selon lequel
j'étais effectivement le dépositaire mais j'ai
déconsidéré le testament, sachez qu'Allah - gloire
à Lui - dit: «IL incombe aux hommes - à celui qui en
possède les moyens - d'aller, pour Allah, en pèlerinage à
la Maison. Quant à l'incrédulité, qu'il sache qu'Allah se
suffit à Lui-Même et qu'IL n'a pas besoin de l'univers».
(V. 97/III)
»La Maison à laquelle on est tenu
de se rendre en pèlerinage aurait-elle été
incrédule si personne n'y avait été en pèlerinage?
Non, c'est celui qui en a les moyens et ne s'y rend pas qui devient incrédule.
Vous, en me laissant, vous êtes tombés dans l'incrédulité
et non moi ...».(161)
Ibn Abîl-Hadîd dit: «Un jour
'Ali (a. s.) dit dans son sermon: «Je suis le
serviteur d'Allah et le frère de Son Messager. Personne ne le dit avant
moi et personne ne le dira après moi. J'ai hérité le
Prophète de la Miséricorde et épousé la meilleure
des femmes de cette Communauté et je suis le sceau des
dépositaires». (162)
7)- Dans le sermon d'Al-Hassan (a. s.): Après l'assassinat de son père,
l'Imam Al-Hassan (a. s.) dit alors dans son sermon: «Je suis Al-Hassan b.
'Ali. Je suis le fils du Prophète et je suis le fils du
dépositaire».(163)
8)- Dans les condoléances de la Shi'ah
présentées à l'Imam Al-Hussayn (a. s.) après la
mort de son frère l'Imam Al-Hassan (a. s.): A cette occasion les Shi'ites d'al-Kûfah se
réunirent dans la maison de Sulaymân b. Çurad et
écrivirent à Al-Hussayn b. 'Ali (a. s.) pour lui présenter
leurs condoléances: «La calamité qui s'est abattue sur
cette Communauté en général et sur toi et les Shi'ites en
particulier, est immense. On a perdu le fils du dépositaire et le
petit-fils du Prophète ...».(164)
Selon Al-Mas'ûdî (Murûjudh-Dhahab),
quand la nouvelle de la mort de l'Imam Al-Hassan est parvenue en Syrie, Ibn
'Abbâs dit à Mu'âwiyah: «Si aujourd'hui nous sommes
atteints par sa perte, nous l'avons été auparavant par la perte
du Maître des Prophètes, l'Imam des Vertueux, le Messager du Seigneur
de l'Univers et après lui par la perte du maître des
dépositaires. Qu'Allah répare ce malheur (cette perte)
...».(165)
9)- Dans le sermon de l'Imam Al-Hussayn (a. s.): Le 10e jour d'Al-Muharram ('Ashûrâ),
l'Imam Al- Hussayn (a. s.) donna un sermon devant l'armée de
Yazîd:
«... Savez-vous qui je suis? Pensez-y
ensuite, revenez à vous-mêmes en vous blâmant et
demandez-vous s'il vous est permis de me tuer et de profaner ma dignité?
Ne suis-je pas le petit-fils de votre Prophète (SAW) et le fils de son
dépositaire qui fut son cousin, le premier à avoir
embrassé l'Islam, à avoir cru en Allah et en Son Messager?
Hamzah, le maître des Martyrs n'est-il pas l'oncle de mon père?
Ja'far, le martyr-ailé n'est-il pas mon oncle?».(166)
De cette argumentation de l'Imam Al-Hussayn (a.
s.) il apparaît que la qualité de dépositaire qu'il donna
à son père était aussi célèbre que la
prophétie de son grand-père (SAW) et le martyr de Hamzah et de Ja'far.
C'est pour cette raison que personne de ceux qui ont entendu le serment
d'Al-Hussayn (a. s.) n'a contesté son affirmation.
10)- Dans les propos de 'Abdullah b. 'Ali,
l'oncle du 1er calife 'Abbasside As-Saffâh (le sanguinaire): Adh-Dhahabî rapporte à ce sujet le
récit d'Abî 'Amru al-Awzâ'î. En voici l'essentiel:
«Quand 'Abdullah b. 'Ali l'oncle d'As-Saffâh s'était rendu
en Syrie, après avoir massacré Banî 'Umayyah, il me fit
venir et me demanda: «Bon sang! Le califat n'est-il pas à nous de
par la religion même?
- Comment est-ce? Répondis-je. Le
Messager d'Allah (SAW) ne l'avait-il pas confié (légué)
à 'Ali?».
11)- Dans les propos de Mohamed b. 'Abdillah b.
al- Hassan lors de son argumentation à l'encontre du calife 'Abbasside,
Al-Mançur.
En évoquant les événements
de l'an 145 h., At-Tabarî et Ibn Athîr respectivement dans leurs
traités de L'Histoire, rapportèrent que lorsque Mohamed
b. 'Abdillah b. al-Hassan b. 'Ali b. Abî Tâlib s'était
soulevé contre le calife Abbasside Abî Ja'far al-
Mançûr et que les gens lui avaient prêté serment d'allégeance
à Médine, il écrivit une lettre - réponse
détaillée au calife Al-Mançur - et lui présenta les
arguments selon lesquels il avait la primauté sur lui quant à la
dévolution du califat:
«Notre père 'Ali était le
dépositaire et l'Imam. Comment alors héritiez-vous de son califat
du vivant même de ses enfants? ...
A son tour, Al-Mançur lui écrivit
sa réplique dans laquelle il récusa les arguments de son
concurrent mais garda le silence sur cet argument (celui de la priorité
au droit de commander). Le silence d'Al-Mançur est une reconnaissance de
la part des 'Abbassides de la validité de cet argument.(167)
Waçîyyun-Nabîy:
(le dépositaire du Prophète) (SAW)
Un sermon très connu de l'Imam 'Ali (a.
s.) et très répandu dans la poésie des Compagnons et des
Tâbi'îne ainsi que dans les recueils de la langue
Au début de l'Islam:
Dès le début, l'Imam 'Ali (a. s.)
fut surnommé Al- Waçîy (le légataire, le
dépositaire) et cela était célèbre à tel
point qu'il serait relaté par les auteurs des grands traités de
la langue. Ainsi, dans (le grand dictionnaire) Lissânul-'Arab le
terme Al-Waçîy ... surnom de 'Ali (a. s.). De même
dans Tâjul-'Arûs = Al-Waçîy = surnom de 'Ali
(a. s.).
A l'époque des Compagnons, ce surnom fut
évoqué dans leurs poèmes tel celui que composa le
Compagnon et poète du Prophète (SAW), Hassân b.
Thâbit, après la mort du Messager (SAW):
Qu'Allah dont les récompenses sont entre
les mains rétribue
Abâ Hassan ('Ali) et qui peut être
comme Abûl-Hassan?
Tu as gardé en nous le souvenir du
Messager d'Allah et son pacte
Et qui est plus digne de lui que toi? Qui?
N'es-tu pas son frère dans la guidance et
son dépositaire?
N'es-tu pas plus savant qu'eux du Livre et des
traditions?(168)
Dans son livre Al-Muwaffaqiyyât, Az-Zubayr
b. Bakkâr rapporte la poésie d'un Qurayshite faisant
l'éloge de 'Abdullah b. 'Abbâs:
Par Allah! Personne après 'Ali le
Dépositaire ne sut parler aux gens comme l'a fait Ibn 'Abbâs!(169)
Le poète d'al-Ançar,
An-Nu'mân b. 'Ajlân dit dans un poème, après la mort
du Prophète (SAW):
Notre penchant était pour 'Ali et il en
est
Certainement digne mais tu ne le sais pas
Ô 'Amru!
Le dépositaire du Prophète
élu et son cousin
Et le tueur des cavaliers égarés
et impies.
Ces vers furent composés en
réponse à 'Amru b. al- 'As qui, lors de l'événement
de la Saqîfah, attisa la colère d'al-Ançar que l'Imam 'Ali
a bien défendus à l'encontre des émigrés
Qurayshites.(170)
Ibn Abîl-Hadîd dit aussi: «De la
poésie qui comporte l'attribution du surnom d'al-Waçîy
à 'Ali (a. s.), au début de l'Islam, il y a ces vers de 'Abdillah
b. Abî Sufyân b. al-Hârith b. 'Abdil-Muttalib»:
'Ali est de nous, l'homme de Khaybar
Et de Badr aux troupes déferlantes.
Le dépositaire du Prophète
élu, et son cousin,
Qui pourra l'égaler? Qui pourra en
être près?
De même, Abdur-Rahmân b. Ju'ayl dit:
Par ma vie! Vous avez prêté serment
d'allégeance à un homme
Protecteur de la religion, vertueux et bien
guidé
'Ali est le dépositaire du
prophète élu, et son cousin
Le frère de la religion et de la
piété
Et le premier qui ait fait une prière(171)
Ce sermon est resté célèbre
des siècles durant.
Al-Mubarrid rapporte dans Al-Kâmil)
ce vers d'Al- Kumayt:
Le dépositaire que le Tujubûy (Ibn
Muljam) a assassiné
En vue de faire pencher le trône de la
communauté vers la destruction
Dans son commentaire, Al-Mubarrid dit:
Le surnom Al-Waçîy (le
dépositaire)!
On en parlait beaucoup.
On savait donc très bien que le surnom de
dépositaire était tel bel et bien attribué à l'Imam
'Ali (a. s.) au même titre que son autre surnom Abû Turâb.
Dans le même sillage, Al-Mubarrid pour
prouver que le surnom d'Al-Waçîy attribué à l'Imam
'Ali était très célèbre, cita de la poésie
d'Abîl Aswad Ad-Du'abîy qui, sans citer 'Ali par le nom, se
contenta du surnom pour parler de lui:
D'un grand amour,
J'aime Muhammad, 'Abbâs, Hamza et
Al-Waçîy.
De même Al-Himyarîy dit :
Mon culte préféré est celui
que pratiqua la Dépositaire ...
Allah les gratifia de Muhammad
Les a guidés, vêtus et nourris
Puis ils s'attaquèrent à son
dépositaire et son allié
Par leurs actes abominables.
Ainsi ils lui firent boire la coloquinte(172)
L'imam des shafi'ites, Mohamed b. Idriss (mort
en 204h) dit aussi:
Si l'amour que je porte pour le
Dépositaire est considéré comme un refus
Eh bien! Je suis le plus grand
"refuseur" des humains!(173)
Dans le recueil de poésie
d'Al-Mutanabbîy on trouve cette conversation: «Pourquoi ne
composes-tu pas de poèmes pour faire l'éloge du Prince des
Croyants 'Ali b. Abî Tâlib (a. s.)?»
Je n'ai pas fait l'éloge du
dépositaire exprès.
C'est une lumière totale allant du ciel
à la terre
Quand un être est indépendant il se
tient de lui-même
Comme la lumière du soleil, qui passe
inaperçue(174)
répondit-il en vers.
De même Sheykhul-Islâm
al-Hamwînî al-Juwaynî (mort en 722 h.) dit en vers:
Le frère de l'Elu, le meilleur de
Banî Hâchim
Le père des Maîtres,
célèbres et bénis, l'homme de confiance
Le dépositaire de l'Imam des Messagers
Muhammad.
'Ali le Prince des Croyants Abîl-Hassan(175)
A son tour, le Mufti d'Al-Moçul,
en Iraq (Mohamed Habîb Al-'Ulbaydî) (mort en 1383 h.), lors de la
révolution irakienne en 1920 contre la colonisation britannique,
réfuta la prétention de celle-ci au droit
d'Al-Wiçâyah (le protectorat) sur l'Irak et les Irakiens en
composant son poème intitulé:
"Le Premier cri"
Ô l'Occident, tu dis là quelque
chose de monstrueux!
De Waçîy, on ne connaît que
le Waçîy (du Prophète)!
Par le Coran et l'Evangile,
On n'acceptera guère de protectorat
d'autrui
Du sang coulerait alors comme un torrent
Après le Waçîy, époux
de la dame purifiée
Accepterons-nous la Wiçâyah des
Anglais?(176)
De ce qui précède, il
apparaît que le surnom d'al- Waçîy était
célèbre chez les partisans de l'Ecole des califes depuis le
premier siècle de l'hégire jusqu'au 14e siècle.
Déjà, à l'époque de 'Aïsha, lors de la
bataille du chameau, Addabbîy, l'un de ses partisans, dit en vers:
Nous, Banû Dabbah, sommes les ennemis de
'Ali
Celui-là qu'on surnommait autrefois le
Waçîy.
En fait ce n'était que dans un moment
d'inattention, le sens du terme passant inaperçu dans ce cas là,
que les partisans de l'Ecole des califes parlaient de l'Imam 'Ali en citant son
surnom: le Dépositaire.
Mais quand ils faisaient attention à sa
signification, ils le nièrent ou l'occultèrent. Ainsi, «...
ils détournaient le Discours de ses sens ...». (fragment du V. 46/IV).
L'Ecole des califes
fournit de grands efforts en Vue de masquer les récits relatifs au
testament et d'interpréter ceux qui s'étaient répandus
La personne qui uvra, en premier lieu, dans ce
sens fut 'Aïsha la mère des Croyants. Les récits
rapportés à partir d'elle le montrent clairement mais ses
hadîths qui nient le testament (en faveur de 'Ali) prouvent (par le fait
même) que l'Imam 'Ali était connu déjà à
cette époque pour être le dépositaire du Prophète.
Les traditions rapportées par 'Aïsha
prouvent que 'Ali (a. s) était le dépositaire du Messager d'Allah
(SAW)
Muslim rapporte dans son Sahîh
que lorsqu'on a évoqué chez 'Aïsha le fait que 'Ali soit le
Waçîy, elle dit: «Quand l'a-t-il institué alors qu'il
appuyait son dos contre ma poitrine et rendit l'âme sans que je m'en
aperçusse, quand alors l'a-t-il institué?»(177)
'Aïsha, la mère des Croyants avait
besoin de mobiliser les gens pour alimenter sa guerre déclarée
contre l'Imam 'Ali, guerre connue dans l'histoire sous le nom de "Guerre
du Chameau". La conversation susmentionnée était tenue dans
ce contexte. Dans ces conditions de guerre fratricide, on voulait
sûrement arguer auprès d'elle du fait que l'Imam 'Ali qu'elle
combattait était le Waçîy, le Dépositaire du
Prophète (SAW). En tout cas, son attitude à cette époque
ressemble à ce que relate la réalité historique quant
à la position de 'Aïsha à l'égard de l'Imam 'Ali.
Dans le récit relatif à la maladie du Messager d'Allah (SAW), Ibn
Sa'd rapporte que 'Aïsha dit:
«Il (le Prophète) est sorti,
appuyé sur deux hommes, entre Ibn 'Abbâs, Al-Fadl, et un autre
homme. 'Ubaydullah dit: «J'ai rapporté son récit à
Ibn 'Abbâs (le frère du précédent) qui me demanda
alors: «Sais-tu qui était l'autre homme que 'Aïsha n'a pas
nommé?». «Non», répondis-je.
«C'était 'Ali», ajouta Ibn 'Abbâs, mais 'Aïsha ne
supportait pas qu'on dise du bien de lui».(178)
Ainsi, Aïsha, la mère des Croyants,
ne voulait pas nommer 'Ali (a. s.) dans ses récits et
préférait dire: un homme ... Cette dureté ne lui suffisait
pas: Abûl-Faraj rapporte à propos de l'assassinat de l'Imam 'Ali
(a. s.) que «lorsque la nouvelle de sa mort parvint à 'Aïsha,
celle-ci s'est prosternée» en guise de remerciement pour Allah.
Les hadîths rapportés par la
mère des Croyants 'Aïsha comparés à ceux
rapportés par d'autres Compagnons
Ce récit selon lequel «quand
l'a-t-il institué alors qu'il est mort contre moi (entre mes seins et
mon menton)»(179) est une
narration unique, spécifique à elle. D'autres récits s'y
opposent:
Ibn Sa'd dit dans sa Tabaqât:
(titre: "Ceux qui disent que le Prophète (SAW) est mort entre les
bras (dans le giron) de 'Ali b. Abî Tâlib):
Le Messager d'Allah (SAW) dit dans sa maladie:
«Faites venir (appelez) mon frère», 'Ali fut
"appelé". «Approche-toi», lui ordonna-t-il.
«Je me suis alors approché de lui, raconta 'Ali. Il s'appuyait
alors contre moi, me parlait de si près à tel point que je
recevais de la salive du Prophète (SAW). Enfin, il commença
à agoniser et à s'alourdir dans mes bras (mon giron) ...».
On rapporta aussi que 'Ali b. al-Hussayn dit: Le
Messager d'Allah (SAW) fut mort la tête dans le giron de 'Ali.
Ash-Sha'bî dit: même récit
avec en plus cette précision: 'Ali lui fit le lavage rituel.
Abû Ghatafân dit: j'ai
demandé à Ibn 'Abbâs: «Le Messager d'Allah (SAW)
est-il mort, la tête entre les bras de quelqu'un?». «Oui,
répondit-il, il est mort appuyé sur la poitrine de 'Ali».
Je dis: «Mais 'Urwah m'a raconté que 'Aïsha avait dit: le
Messager d'Allah (SAW) est mort dans mes bras!». Ibn 'Abbâs me
rétorqua alors: «Comprends-tu? Par Allah! Le Messager (SAW) est
mort appuyé contre la poitrine de 'Ali, et c'est lui qui a fait son
lavage rituel ...».
Ka'bul-Ahbâr se leva un jour, à
l'époque de 'Umar, alors que nous étions assis chez ce dernier,
et demanda : «Quelle fut la dernière parole du Messager
d'Allah (SAW)?». 'Umar lui dit: «Demande à 'Ali, il est
ici». 'Ali répondit en disant: «Appuyé contre ma
poitrine, il posa (finalement) la tête sur mon épaule et dit: La
prière, la prière». Ka'b dit alors: «Oui, elle est la
dernière injonction des prophètes. C'est sur cela que l'ordre
leur a été notifié et c'est sur cela qu'ils seront
ressuscités». Puis Ka'b demanda: «Ô prince des
Croyants! Et qui l'a lavé?». 'Umar dit: «Ddemande à
'Ali». 'Ali, en répondant à Ka'b, dit: «C'est moi qui
faisais le lavage; 'Abbâs était assis (là); 'Ussâmah
et Shuqrân m'apportaient de l'eau».(180)
Si le Prophète avait faibli et mourut
dans le giron de 'Aïsha ou entre son estomac et son menton comme elle l'a
dit, le calife 'Umar aurait dit à Ka'bul-Ahbâr: «Demande
à la mère des Croyants 'Aïsha pour t'informer de la
dernière parole du Prophète (SAW)», et ne l'aurait pas
renvoyé à 'Ali (a. s).
Mais le récit le plus solide reste celui
d'un témoin oculaire, de la mère des Croyants Ummu Salamah qui
dit:
«Par Allah! 'Ali fut la dernière
personne ayant abordé le Messager d'Allah (SAW) avant sa mort. Nous lui
avons rendu visite un matin alors qu'il demandait: «'Ali est-il venu?
'Ali est-il venu?», plusieurs fois. Fatima dit alors:
«Peut-être l'as-tu envoyé effectuer quelque chose».
Par après 'Ali vint. Croyant qu'il avait besoin de lui (pour
régler une affaire), nous sommes sortis de la pièce et
restés à la porte. J'y étais la proche, affirma Ummu
Salamah «le Messager d'Allah (SAW) s'est penché alors sur 'Ali et
entama avec lui un entretien confidentiel. Ensuite le Prophète (SAW)
mourut le même jour. 'Ali était la dernière personne
l'ayant abordé avant sa mort».(181)
Dans le récit de 'Abdullah b. 'Amru, le
Messager d'Allah (SAW) dit dans la maladie qui précéda sa mort:
«Faites venir mon frère!». 'Ali vint auprès de lui,
il le cacha d'un rideau et se pencha sur lui (en confident) ...».(182)
En parlant de la mort du Messager (SAW) l'Imam
'Ali (a. s.) dit:
«Le Messager d'Allah (SAW) a rendu le
dernier souffle, sa tête sur ma poitrine. J'ai recueilli ce souffle et
l'ai passé sur mon visage. Je me suis chargé de lui faire les
dernières ablutions (lavage rituel consécutif à la mort),
aidé par les anges qui se succédaient groupe après groupe;
cela créait un véritable grouillement dans la demeure. Leurs
louanges murmurées ne cessèrent de chatouiller mes oreilles
jusqu'à sa mise dans la tombe».(183)
Comparaison des
hadîths rapportés par la mère des Croyants 'Aïsha
Face aux hadîths précédents,
'Aïsha, la mère des Croyants fut donc la seule à avoir
rapporté que le Prophète (SAW) était mort dans son giron.
Il est fort probable qu'elle a raconté
cela lors de la guerre d'al-Baçurah, c'est-à-dire après
les deux califes 'Umar et 'Uthmân. Cela coïncidait aussi avec
l'époque de Mu'âwiyah où celui-ci défendait de
rapporter les mérites de l'Imam 'Ali (a. s.) et ordonnait de raconter
des récits contraires.
Mais même dan l'hypothèse où
le Prophète (SAW) aurait été mort contre sa poitrine, cela
contredirait-il les nombreux récits affirmant que l'Imam 'Ali (a. s) fut
institué comme dépositaire par le Messager d'Allah (SAW)? N'y
avait-il pas d'autres occasions dans un autre temps (que celui de sa
dernière maladie) où le Messager (SAW) aurait pu transmettre son
testament à l'Imam 'Ali? Si. Le prouvent de nombreux récits
rapportés par les traditionnistes, dont ceux qui suivent:
L'Imam 'Ali dit: «J'avais deux
entrées chez le Messager d'Allah (SAW): l'une pendant la nuit, l'autre
pendant la journée. S'il m'arrivait de me rendre chez lui alors qu'il
priait, il toussa (pour m'avertir)».(184)
Dans une autre version, il dit: «J'avais
auprès du Messager d'Allah (SAW) un rang qu'aucune autre créature
n'avait: à l'aube de chaque jour, je me rendais chez lui et je saluais
(pour entrer) à moins qu'il toussât (pour m'avertir qu'il
était occupé)».(185)
Ibn 'Asâkir dans son Târîkh,
rapporte que Jâbir dit: «Le jour d'At-Tâ'if, le Messager
d'Allah (SAW) eut avec 'Ali un long conciliabule. Certains Compagnons dirent
alors, il est vraiment long le conciliabule qu'il a eu avec son cousin! Quand
le Prophète (SAW) en prit connaissance, il dit: «Ce n'est pas moi
qui ai ordonné ce conciliabule à son profit, c'est Allah».
Dans une autre version: ils parlaient longtemps
en confidents alors qu'Abû Bakr et 'Umar regardaient parmi d'autres gens.
Une fois devant ceux-ci, ils dirent: «Ô Messager d'Allah! Ton
conciliabule aujourd'hui est long!». Le Prophète leur dit alors:
«Ce n'est pas moi qui aie tenu ce conciliabule avec lui; c'est
Allah!».(186)
L'attitude de la mère des Croyants
'Aïsha face aux hadîths de l'institution de 'Ali faisait partie des
actes du califat qurayshite dont la position à l'égard des
hadîths relatifs au rang d'Ahlul-Bayt, dépendait de la politique
générale de Quraysh: la prophétie et le califat ne doivent
pas être cumulés par Banî Hâshim (le clan du
Prophète).
L'occultation des mérites de l'Imam 'Ali
(a. s.). Les raisons pour lesquelles il fut insulté et maudit (par ses
adversaires)
Commençons d'abord par les raisons pour
lesquelles on l'a insulté et maudit notamment sur les chaires des
mosquées avant d'évoquer les récits relatant l'occultation
de ses mérites.
Quraysh a refusé le cumul de la
prophétie et du califat par Banî Hâchim
At-Tabarî rapporte que deux conversations
avaient lieu entre le calife 'Umar et Ibn 'Abbâs.
Dans l'une d'elles, le calife demanda à
Ibn 'Abbas:
«Qu'est ce qui a empêché
votre peuple (Quraysh) d'accepter votre califat?.
- Je ne sais pas, répondit Ibn
'Abbâs.
- Moi, je sais, affirma 'Umar. Ils (les
Quraychites) détestent votre tutelle en cette affaire. Pourquoi alors
que nous sommes pour eux comme le bien (une incarnation du bien?)
- Pardon! Dit 'Umar, ils détestent que
soient cumulés en vous la prophétie et le califat; ce cumul vous
aurait donné matière à vous enorgueillir. Peut-être
dites-vous que c'était Abû Bakr qui a fait cela. Non, par Allah,
mais en cette situation il a fait preuve de fermeté...».
Dans la deuxième conversation, 'Umar demanda:
- Ibn 'Abbâs! Sais-tu ce qui a
empêché votre peuple de vous après Muhammad?
- Je n'ai pas aimé, lui répondre
et j'ai dit: Si je ne sais pas, le prince des Croyants me fera savoir.
- Ils ont détesté le cumul de la
prophétie et du califat par vous; ce qui vous aurait donné
matière à vous montrer orgueilleux à leur égard.
Quraysh a donc fait son choix et elle a vu juste et fut bien guidée!
- Si tu me permets de parler sans que tu t'en
fâches, je parlerai, proposa Ibn, 'Abbas
- Parle, ô Ibn Abbas!
- Pour ce qui est du choix qu'avait fait
Quraysh, si elle avait accepté le choix d'Allah pour elle, la rectitude
aurait été entre ses mains, ni contestée ni enviée.
En ce qui concerne l'aversion de Quraysh pour le cumul de la prophétie
et du califat par nous, eh bien! Allah - gloire à Lui - parla de cette
aversion dans ces termes: «Il en est ainsi parce qu'ils ont
éprouvé de l'aversion pour ce que Allah a
révélé: IL rendra vaines leurs oeuvres». (V.
9/XLVII)
- Loin de toi! Par Allah! Ô Ibn
'Abbâs, des choses répréhensibles me parvenaient sur toi
mais je ne voulais pas te les faire reconnaître pour ne pas abaisser ton
rang à mes yeux.
- Quelles sont ces choses ô prince des
Croyants? Si j'étais dans le Vrai, tu ne devrais pas abaisser mon rang
à tes yeux, si par contre j'étais dans le faux, je serais
à même d'écarter le faux de moi-même!
- Il m'est parvenu que tu disais que nous avions
écarté le califat de vous par envie et injustement!
- Ô prince des Croyants! Que cela ait
été injuste, tout le monde en convient - Quant à l'envie,
eh bien! Iblîs (Satan) avait envié Adam et nous sommes les
enviés parmi ses fils.
- Loin de toi! Vos coeurs - ô Banî
Hâchim sont rongés par une envie qui dure et une rancune qui ne
s'en va pas.
- Doucement, ô prince des Croyants ne
parle pas ainsi des curs de ceux qu'Allah veut seulement éloigner d'eux
toute souillure et les purifier totalement. Le cur du Messager d'Allah (SAW) ne
fait-il pas partie des curs de Banî Hâchim?
- Ecarte-toi de moi, ô Ibn 'Abbâs!
- Oui, je m'en vais.
Quand je me fus apprêté à me
lever, il eut honte et me rappela: ta place ô Ibn 'Abbâs! Par
Allah, je considère bien tes droits et j'aime ce qui te contente.
- Oui, ô prince des Croyants!
- J'ai des droits sur toi et sur tout Musulman
(le respect dû à la famille du Prophète) quiconque les
considère bien, oeuvre pour son propre bien; quiconque les bafoue, fait
sûrement fausse route!
Ensuite 'Umar se leva et s'en alla.(187)
Qu'on médite ces deux hadîths!
Le calife a dit clairement dans les deux
récits que Quraysh refusèrent que la prophétie et le
califat fussent cumulés par Banî Hâchim qui en auraient
été fiers.
Dans le deuxième récit, il
reconnaît que Quraysh a vu juste quand elle a choisi pour
elle-même. Cela veut dire que la question de la succession et du pouvoir
fut discutée par Quraysh et tranchée dans l'intérêt
- celui d'ici-bas - de la seule tribu de Quraysh et non dans
l'intérêt général des Musulmans.
Pour mettre en valeur son appréciation du
choix qurayshite, 'Umar n'a avancé aucun argument, ni du Livre d'Allah
ni de la sunnah du Messager (SAW).
De la réplique d'Ibn 'Abbâs (si
Quraysh s'était contentée du choix que fit Allah pour elle ...),
on comprend deux choses:
Le choix de Quraysh n'a pas coïncidé
avec celui d'Allah Qui choisit l'Imam 'Ali (a. s.) (pour
présider à la destinée de cette Communauté) comme
nous le montrerons plus loin inshâ Allah.
Quraysh n'aurait pas dû effectuer de choix
en présence de celui que fit Allah. Ibn 'Abbâs fait ainsi allusion
au contenu de ce verset:
«Lorsque Allah et Son Messager ont
pris une décision, il ne convient ni à un croyant ni à une
croyante de maintenir son choix sur cette affaire». (V. 36/XXXIII)
Quand Ibn 'Abbâs souligna la
gravité de l'aversion qu'on a pour ce qui fut
révélé (verset 9/XIVII), 'Umar en guise de réplique
passa à l'attaque et à l'accusation - (Quraysh
évinça Banî Hâchim injustement et par envie) ...
Malgré ces arguments
"incontournables" avancés par Ibn 'Abbas, Quraysh continua
d'avoir en horreur la prise du pouvoir par Banî Hâchim. Le montre
clairement cette conversation entre le calife 'Umar et Ibn 'Abbâs,
après la mort du gouverneur de Hims (en Syrie):
- Ô Ibn 'Abbâs! Le gouverneur de Hims est mort, il était un
homme de bien et les hommes de bien sont peu nombreux!
- En fait j'ai toujours espéré que
tu ferais parti de ces hommes de bien! En moi-même, j'ai quelque chose
à te reprocher mais comme tu ne le manifestes pas, je ne dis rien et cela
me chiffonne. Bref, que penses-tu de l'exercice de la fonction?
- Non, je ne m'en chargerai que si tu m'informes
de ce que tu nourris à mon égard!
- Pourquoi? Que veux-tu en faire?
- Je veux savoir. S'il s'agit de quelque chose
de nuisible pour moi-même, je partagerai ta crainte à ce sujet. Si
par contre, je suis innocent, je saurai que ce défaut n'est pas des
miens et j'accepterai alors ma nomination à la fonction que tu me
désigneras (être gouverneur) car je sais que tu arrives toujours
promptement à ce que tu veux. Ô Ibn 'Abbâs! Si je te
nommais à cette fonction, je crains que mes jours prennent fin et que tu
dises (exploitant ton poste de gouverneur): Venez à nous; or, vous
n'avez pas de venue à vous à l'exclusion des
autres...».(188)
Il semble que cette conversation se passa vers
la fin du califat de 'Umar voire même durant le dernier mois de sa vie.
Ibn Abbâs rapporte ce récit:
«Je faisais réciter du Coran
à des Muhâjirîne y compris 'Abdur-Rahmân b. 'Awf. Un
jour je l'attendais chez lui à Minâ alors qu'il était chez
'Umar b. al-Khattâb lors de son dernier pèlerinage. Quand
'Abdur-Rahmân revint auprès de moi, il dit: «Si tu avais vu!
Un homme est allé aujourd'hui voir le prince des Croyants et lui
rapporta qu'un tel avait dit: «Si 'Umar venait à mourir, je
prêterai serment d'allégeance à un tel, car, par Allah,
l'allégeance d'Abû Bakr était brusque mais achevée.
'Umar se fâcha alors et dit: «Ce soir, inshâ Allah,
j'avertirai les gens et les mettrai en garde contre ceux qui veulent s'emparer
de leur affaire».
- Non, ô prince des Croyants!, dis-je.
Cette cérémonie réunit des foules du bas peuple et, une
fois près de toi, j'ai peur que ces gens, après avoir mal-compris
ce que tu auras dit, diffusent ta parole à tort et à travers.
Attends de revenir à Médine, ville de l'hégire et de la
tradition; les gens cultivés et les notables seront près de toi,
comprendront bien ta parole et sauront l'apprécier...
'Umar dit: Par Allah, je le ferai inshâ
Allah dès que je reviendrai à Médine!.
Ibn 'Abbâs raconte qu'une fois à
Médine, après le mois Dhul-Hijjah, il s'est rendu un vendredi
à midi à la Mosquée afin d'y rencontrer Sa'îd b.
Zayd b 'Amru b. Nufayl.
Je me suis assis à côté de
lui, ajouta Ibn 'Abbâs, quelques instants après, quand je vis
surgir 'Umar b. al-Khattâb je dis à Sa'îd b. Zayd: «Il
va dire cet après midi ce qu'il n'a jamais dit depuis qu'il est
calife!».
Mon interlocuteur ne me crut pas. Quand les
muezzins se sont tus, 'Umar prit place sur la chaire, loua Allah et dit:
«... Ensuite, je vais bien vous dire
quelque chose qui, d'après le destin, doit-être dit,
peut-être est-ce un prélude à l'extinction de mes jours.
Quiconque le conçoit bien et le comprend, qu'il en parle là
où il arrivera; sinon je ne permets à personne de mentir à
mon compte...». Ensuite 'Umar dit: «Il m'est parvenu que l'un
d'entre vous a dit: «Par Allah! Si 'Umar vient à mourir, je
prêterai serment d'allégeance à un tel». Qu'on ne se
trompe pas en disant «l'allégeance prêtée à
Abû Bakr était brusque, pourtant elle est arrivée à
terme!». Elle l'a été effectivement mais Allah nous en a
épargné les méfaits. Parmi vous, il n'y a sûrement
pas quelqu'un comme Abû Bakr. Si, sans délibération
préalable entre les Musulmans, quelqu'un veut prêter serment d'allégeance
à un autre, qu'il ne le fasse de peur qu'on les tue tous les deux. A la
fin de son discours, cette dernière phrase fut
répétée: «Si un homme veut prêter serment
d'allégeance à un autre sans délibération
préalable des Musulmans, qu'il ne le fasse pas de peur qu'on les tue
tous les deux».(189)
A qui donc allait-on prêter serment
d'allégeance après la mort de 'Umar? Et à qui appartient
le propos qui a provoqué la colère du calife? Le Shâfi'ite
Ibn Abîl-Hadîd donna la réponse à cette question:
l'homme à qui on voulait prêter serment d'allégeance
était 'Ali; celui qui l'a proclamé était 'Ammâr b.
Yâsir.(190)
L'étude de ce discours
Il est clair que le calife eut peur que Quraysh
perde le contrôle de la situation après sa mort et que des
Musulmans - Compagnons et Tâbi'îne - se hâtent de
prêter serment d'allégeance à quelqu'un dont Quraysh
déteste l'investiture, à savoir l'Imam 'Ali. Pour barrer la route
aux prétendants, il les menaça en disant: «si un homme veut
prêter serment d'allégeance à un autre sans
délibération préalable des Musulmans, qu'il ne le fasse
pas de peur qu'on les tue tous les deux». alors
qu'il avait accédé lui-même sans délibération
préalable des Musulmans. La légitimité de son pouvoir ne
s'est basée que sur sa désignation par Abû Bakr. En tous
cas, par ce stratagème il prit les choses en main et, quand il fut
poignardé, il concrétisa sa pensée dans un
procédé inédit: «six hommes de Quraysh devront,
dit-il, se réunir pour choisir, en fin de compte, l'un d'entre eux, qui
serait le successeur de 'Umar. Il posa deux conditions: que la candidature de
l'un ou de l'autre soit cautionnée par 'Abdur-Rahmân b. 'Awf qui
imposerait, à son tour, au candidat prétendant - et c'est la
deuxième condition convenue, l'obligation de suivre à la fois le
Livre d'Allah, la sunnah du Messager et la Sîrah des deux
Sheikhs (Abû Bakr et 'Umar). On savait que l'Imam 'Ali refuserait de
placer sur le même pied d'égalité, la politique des deux
Sheikhs et la guidance du Livre d'Allah et de la Sunnah du Messager.
'Uthmân, l'un des six candidats, s'y engagea et fut ainsi investi de
l'autorité suprême.
Ceci avait été conçu et
préparé d'avance. Le prouve ce que le calife 'Umar dit à
Sa'îd b. al-'Âçi, l'umayyade: «c'est un proche parent
de Sa'îd qui me succédera», c'est-à-dire,
'Uthmân b. 'Affân l'umayyade.
On savait aussi qu'Abû Bakr, avant de
mourir, invita 'Uthmân seul chez lui et lui dicta son testament mais,
avant de pouvoir l'achever, il s'évanouit. 'Uthmân écrivit
alors: «Je désigne, pour diriger, 'Umar b. al-
Khattâb», quand Abû Bakr reprit conscience et prit
connaissance de ce qu'avait écrit 'Uthmân, il en fut content parce
que cela coïncida avec sa volonté.
A son tour, 'Uthmân allait désigner
'Abder-Rahmân b. Awf à sa succession. Al-Ya'qûbî
rapporte ceci:
«Quand 'Uthmân fut tombé
gravement malade, il fit venir Humrân b. Abân son serviteur
affranchi, lui fit écrire son testament où il laissa vide la
place du nom du successeur institué. Mais, de sa propre main,
'Uthmân écrivit le nom de 'Abder-Rahmân b. 'Awf, à
part et après l'avoir noué, il l'envoya à Ummu
Habîbah, fille d'Abû Sufiân. Humrân le descella en
route, le lut et informa 'Abder-Rahmân b. 'Awf de son contenu. Au lieu
d'en être content, 'Abder-Rahmân s'est mis en colère et dit:
«Je l'ai désigné ouvertement (à la succession de
'Umar) et il me désigne maintenant en cachette!». La nouvelle est
répandue à Médine et les Umayyades (le clan de
'Uthmân) se mirent en colère (parce que l'homme qui allait
succéder n'était pas des leurs). 'Uthmân pour punir
Humrân qui divulgua le secret, lui fit infliger cent coups de fouet et un
exil à Bassorah. C'était cet incident qui provoqua
l'animosité (connue) entre 'Uthmân et 'Abder-Rahmân b. Awf.
Par après, ce dernier envoya son fils avec cette missive à
'Uthmân: «Par Allah, je t'avais prêté serment
d'allégeance alors que j'avais trois qualités qui me rendaient
meilleur que toi ...».(191)
Il semble que même la succession de
'Uthmân fut tranchée d'avance mais 'Abder-Rahmân b. Awf
mourut avant 'Uthmân en l'an 31 ou 32 h. après qu'ils
s'étaient très fort disputés.(192)
A leur tour les Banî Umayyah,
connaîtront, par après, la discorde et disputeront le pouvoir aux
autres clans de Quraish.
Le clan d'Abû Bakr (Taym) avec à sa
tête la mère des Croyants 'Aïsha, conduisait à son
tour l'opposition contre 'Uthmân qui fut assassiné chez lui
à Médine sous les yeux des Muhâjirîne et des
Ançars.(193)
Ce n'est qu'après ces
événements que les Musulmans prirent leur affaire en main
après s'être débarrassés de tout pacte
d'allégeance contraignant. Ils se précipitèrent alors vers
l'Imam 'Ali (a. s.) pour lui prêter serment d'allégeance. Les
Compagnons du Messager d'Allah (SAW) furent les premiers à le faire.
Quand l'Imam 'Ali (a. s.) eut pris le pouvoir, il annula toutes les
prérogatives que Quraysh s'était attribuées à
l'époque de ses prédécesseurs. Les quraychites et les
autres Musulmans, les Arabes et les Mawâlî furent traités
sur le même pied d'égalité quant à la distribution
des revenus économiques de l'Etat et au rang social au sein de la
Communauté. Quraysh, jalouse de ses intérêts, se ressaisit
et quatre mois après la prise du pouvoir par l'Imam (a. s.),
déclara la guerre du chameau contre lui, attisée par Marwân
qui voulait venger le sang de 'Uthmân, Talhah et Az-Zubayr qui avaient
auparavant incité à l'assassinat de 'Uthmân et à
leur tête, 'Aïsha la mère des Croyants qui avait émis
un avis religieux (une fatwâ) autorisant le meurtre de
'Uthmân.
Après la bataille du chameau, Quraysh
déclara contre l'Imam, la bataille de Çaffîne au nom de la
vengeance due au sang de 'Uthmân, ce qui brouilla à
l'extérieur de Médine, les idées des Musulmans et leur
position. Après l'arbitrage de Çaffine, Al-Khawârij (les
dissidents) se soulevèrent à Nahrawân contre l'Imam (a.
s.).
C'était pour tout cela que l'Imam se
plaignait de l'injustice de Quraysh et disait par exemple à son
frère Aqîl: «Laisse donc tomber Quraysh qui patauge dans
l'égarement et erre dans la discorde. Laisse-les (les qurayshites) se
pervertir car ils sont unanimes à me faire la guerre comme ils l'ont
été à la faire auparavant au Messager d'Allah (SAW). Que
leur récompense (châtiment) ne leur soit pas
épargnée! Ils ont coupé mes liens de parenté
...».(194)
Après que l'Imam 'Ali (a. s.) eut eu une
querelle avec l'un d'entre eux, il rapporta la conversation suivante:
Il (l'adversaire) dit: Tu tiens très fort
à cette affaire (le califat)!
Je répondis: Non! Par Allah! Vous y tenez
encore plus tout en étant plus loin. Moi, je suis le plus
concerné et le plus proche! Je n'ai demandé que mon droit auquel
vous vous êtes opposés. Vous vous êtes interposés
entre moi-même et mon droit de façon à m'en
détourner. Quand je l'ai accablé par l'argument incontournable,
devant les gens qui assistaient (à notre querelle), il se leva confondu
et ne sut que répondre!
Ô Allah! Je Te demande secours contre
Quraysh et ceux qui les ont aidés, ils ont tranché ma
parenté, rabaissé mon illustre rang; ils furent unanimes à
me disputer une chose qui est mienne puis ils dirent: «aux yeux de la
justice c'est égal que tu aies ce droit ou que tu ne l'aies point».(195)
Dans un autre sermon, en plus du passage
précédent, l'Imam (a. s.) ajoute:
«J'ai regardé, je n'ai
trouvé de soutien que chez ma famille, je leur ai épargné
la mort, j'ai fait abstraction de la douleur, j'ai bu l'amertume et contenu ma
colère, plus amère que la coloquinte et faisant souffrir le cur
plus que ne le font des lames acérées».(196)
Enfin l'Imam 'Ali (a. s) fut assassiné en
martyr, par un dissident dans la mosquée d'al-Kûfah. Après
lui, Mu'âwiyah s'empara du pouvoir en l'an 40 de l'hégire. Cette
année fut appelée l'année de la collectivité (Al-
Jamâ'ah), celle de Quraysh bien entendu! Mu'âwiyah reste vingt ans
au pouvoir et mourut en l'an 60 de l'hégire.
L'une des conséquences de l'aversion
qu'avaient les Quraïshites pour la dévolution du pouvoir à
l'Imam 'Ali (a. s.) fut leur acharnement à empêcher la diffusion
des hadîths prophétiques.
La prohibition
d'écrire le hadîth du Messager (SAW)
'Abdullah b. Amru b. 'Açî rapporte
ceci: J'avais l'habitude d'écrire tout ce que disait le Messager
d'Allah (SAW) mais Quraïsh me le défendit en disant: «Tu
écris tout ce que tu entends de la bouche du Messager d'Allah (SAW),
alors qu'il est un être humain qui se fâche, qui agrée
...», je m'en suis alors abstenu. Quand j'ai rapporté cela au
Messager d'Allah (SAW), il montra sa bouche du doigt et dit:
«Eécris! Car, par Allah! Seule la vérité en
sort!».
Quraïsh a donc montré sans
détour la raison pour laquelle elle s'opposa à l'écriture
du hadîth prophétique: celui-ci pouvait relater la colère
du Prophète contre quelqu'un d'entre eux ou sa satisfaction à
l'égard d'un autre. Dans le premier cas, le hadîth du Messager
d'Allah (SAW) serait, pour la personne en question, une tare, une diminution
pour elle. A cet égard on sait combien le Prophète (SAW) a
parlé des tyrans de Quraïsh et expliqué les versets
coraniques qui furent révélés pour les blâmer! Dans
le deuxième cas, le hadîth du Messager (SAW) serait un texte
fondateur de droit au profit de la personne agréée par le
Prophète (SAW). Or cela ne devait surtout pas avoir lieu.
C'est d'ailleurs pour cette raison qu'on a
empêché l'écriture du testament du Prophète (SAW)
lors de la maladie précédant sa mort, quand il dit:
«Apportez que je vous fasse écrire ce qui vous épargnera de
l'égarement». 'Umar dit alors: «Le Prophète est
souffrant; vous avez le Livre d'Allah; cela nous suffit».
«Qu'est-ce qu'il a? Délire-t-il?».(197) Dirent-ils.
La prohibition de l'écriture et
l'empêchement d'écrire furent donc motivés par la crainte
chez les Quraïshites de la diffusion d'un texte prophétique
susceptible de favoriser quelqu'un dont ils détestent la tutelle
éventuelle dans le cas où le califat et la prophétie
seraient concentrés dans le même clan!
C'était aussi la même raison qui
poussa le calife 'Umar à empêcher l'écriture du
hadîth à son époque et à brûler ce que des
Compagnons en avaient écrit.
Cette mesure d'interdiction est restée de
vigueur jusqu'à l'époque du calife umayyade 'Umar b.
'Abdil-'Azîz ...
La politique du califat
quraishite et des Banî Umayyah
1)-
À l'époque de Mu'âwiyah
Ibn
Abîl Hadîd rapporte à partir d'Al-Jâhidz
l'essentiel de la politique du califat quraïshite à l'époque
de Mu'âwiyah:
«Mu'âwiyah
ordonna aux gens, en Irak, en Syrie et ailleurs d'insulter publiquement 'Ali
(a. s.) et de s'innocenter à son égard.
»Ainsi
il était obligatoire d'exécuter cet ordre du haut des chaires des
Mosquées dans le monde islamique de telle manière que cela est
devenu une tradition établie jusqu'à l'avènement de 'Umar b.
Abdil-'Azîz (r. d.) qui annula l'ordre susmentionné.
Mu'âwiyah
lui-même avait l'habitude, comme le rapporta notre Sheikh Abû
'Uthmân al- Jâhidz, de dire à la fin de son sermon de
vendredi: «Ô Allah! Certes, Abû Turâb ('Ali, a. s.) a
profané Ta religion et écarté les gens de Ton chemin,
maudis-le alors très fort et inflige-lui un châtiment
douloureux!». Ce texte fut un mot d'ordre envoyé dans tous les
horizons pour être divulgué dans les mosquées. Cela dura
jusqu'au califat de 'Umar b. al-Abdil-'Azîz».(198)
Ibn
Abîl Hadîd rapporte aussi à partir d'Al-Madâ'inî
dans son livre Al-Ahdâth: «Après l'année de
la collectivité (de l'union) Mu'âwiyah écrivit à ses
gouverneurs une copie unique (de ce qui devrait être fait à ce
sujet): «Nulle protection ne sera accordée à celui qui
rapporte quelque chose relatant le mérite d'Abî Turâb ('Ali,
a. s.) ou de sa famille... Les plus
éprouvés furent alors les habitants d'al-Kûfah».(199)
a)-
L'enseignement de la haine et de la malédiction de 'Ali (a. s.) aux
habitants de la grande Syrie fut systématique depuis l'époque de
Mu'âwiyah
Ath-Thaqafîy
dans son livre Al-Ghârât rapporte que 'Umar b.
Thâbit montait à cheval et allait tour à tour dans tous les
villages de la grande Syrie (Ash-Shâm) et, quand il eut rassemblé
les habitants d'une bourgade, il leur dit: «Ô les gens! 'Ali b.
Abî Tâlib était un homme hypocrite. Pendant la nuit d'al-'Aqabah, il voulut piquer la monture du Messager
d'Allah (SAW) (afin de le dégringoler du haut d'une crête),
maudissez-le alors! Les villageois le maudirent alors. Ensuite il ('Umar b.
Thâbit) fit de même dans les autres villages. C'était
à l'époque de Mu'âwiyah.(200)
b)-
Les raisons de la rancune que nourrissait Mu'âwiyah à
l'égard de Banî Hâchim
Pour
connaître ces raisons, il convient de lire le chapitre (avec
Mu'âwiyah) dans notre livre intitulé: Hadîths de la
mère des Croyants 'Aïsha. Parmi ces raisons il y eut
l'éducation maternelle. Mu'âwiyah hérita cette rancune de
sa mère Hind qui, à la bataille d'Uhud avait mâché
le foie de Hamzah, l'oncle du Prophète (SAW), et fait de ses membres un
collier dans le but d'assouvir sa colère contre Banî Hâchim.
Mais
cette rancune umayyade ne fut vraiment assouvie que par Yazîd b.
Mu'âwiyah qui tua la famille du Messager à Karbalâ', coupa
les têtes des hommes et réduisit les femmes en captivité.
c)-
La politique d'Ibnuz-Zubayr
Ibn
Abî Hadîd expliqua cette politique en disant: «'Umar b.
Shubbah, Ibnul-Kalbîy, Al-Wâqidîy et d'autres biographes
rapportent qu'Ibnuz-Zubayr, à l'époque de son califat,
s'abstenait pendant quarante vendredis de prier sur le Prophète (SAW) et
dit: «C'est le fait que des hommes puissent s'en enorgueillir qui m'empêche
de le faire!»
Dans
une autre version (celle de Mohamed b. Habîb et d'Abî 'Ubaydah
Ma'mar b. Al-Muthannâ) il dit: «(je ne
prie pas sur le Prophète) parce que de mauvais membres de sa famille
secouent leurs têtes quand son nom est évoqué».
Sa'îd
b. Jubayr rapporte aussi que 'Abdullah b. Zubayr dit un jour à 'Abdullah
b. 'Abbâs: «J'ai entendu dire que tu médis de moi!».
«J'ai entendu le Messager d'Allah (SAW) dire : ... est mauvais
musulman, celui qui mange à satiété alors que son voisin a
faim», répondit Ibn 'Abbâs. L'autre dit alors: «Sachez
ô les membres ce cette famille que je cache votre haine depuis quarante
ans ...»
Ibn
Abîl-Hadîd rapporte qu'Ibnuz-Zubayr détestait 'Ali (a.s)
cherchait à le diminuer et le calomniait.(201)
d)-
Après Ibnuz-Zubayr
La mort
d'Ibnuz-Zubayr (tué par l'armée umayyade) laissa le champ libre
aux califes marwanîy (un clan umayyade) qui, au sujet de 'Ali (a. s.)
poursuivirent la politique de Mu'âwiyah:
2) A
l'époque de 'Abdul-Malik et de son fils Al- Walîd
Ibn
Abîl-Hadîd rapporte ce récit à partir
d'Al-Jâhidz:
«'Abdul-Malik
n'était pas l'homme à ignorer le mérite de 'Ali (a. s.),
lui qui était méritant, posé et intelligent. Il savait que
maudire 'Ali devant les gens, dans les sermons et du haut des chaires retomberait
sur lui et le diminuerait car il appartenait comme 'Ali à la tribu de
'Abdi Manâf (englobant Banî Hâchim et Banî umayyad)
mais (que faire?). Il voulait édifier la royauté, insister sur le
bien-fondé des actes de ses prédécesseurs, inculquer aux
gens que Banî Hâshim n'avaient aucun droit au califat, que leur
maître ('Ali (a. s.) par le nom duquel ils prétendaient et de qui
ils étaient fiers, était en deçà de l'estimation;
donc ceux qui s'apparentent à lui sont encore plus loin de
"l'autorité suprême". Son fils Al-Walîd qui ne
parlait même pas correctement la langue arabe n'hésitait pas
à insulter l'Imam 'Ali (a. s.) en disant de lui par exemple: voleur fils
de voleur! Les témoins de cette insulte s'étonnèrent à
la fois de l'imputation du vol à l'Imam 'Ali (a. s.) et de
l'incorrection dans son langage.(202)
Exemples
de ce que fit Al-Hajjâj dans la mise en application de la politique
quraïshite.
Ibn
Abîl-Hadîd en rapporte ce qui suit:
Connaissant
l'habitude d'Al-Hajjâj (qu'Allah le maudisse) qui maudissait et ordonnait
aux autres de maudire 'Ali (a. s.). Un homme le croisa un jour et lui dit:
-
Ô prince! Ma famille était méchante avec moi puisqu'elle
m'a nommé 'Ali; je t'en prie donne-moi un autre nom et de quoi pourvoir
à ma subsistance car je suis pauvre!»
- Pour
la délicatesse du moyen que tu as utilisé pour m'aborder, je te
donne le nom de tel, et je te nomme à ce poste là ... Vas-y
alors!».(203)
Dans
la biographie de 'Attiyyah b. Sa'd Al'ûfî, Ibn Sa'd rapporte dans At-Tabaqât
Al-Kubrâ que (le gouverneur) Al-Hajjâj écrivit à
(son subalterne) Mohamed b. al-Qâsim Ath-Thaqafîy une lettre et lui
enjoignit d'inviter 'Atiyyah à maudire 'Ali b. Abî Tâlib;
s'il ne le fait pas inflige-lui quatre cents coups de fouet et rase sa
tête et sa barbe! Quand il lui a lu la lettre d'Al-Hajjâj et qu'il
a refusé d'obtempérer, il lui donna quatre cents coups de fouet
et rasa sa tête et sa barbe.(204)
Comme
Al-Hajjâj, son frère Mohamed b. Yûssuf allait dans le
même sillage pendant qu'il était gouverneur du Yaman
Adh-Dhahabîy
rapporte le récit de Hujr Al Madarîy qui dit:
«Un
jour Ali b. Abî Tâlib me demanda:
- Que
feras-tu quand on t'ordonnera de me maudire?
- Cela
pourra-t-il arriver?
- Oui,
répondit 'Ali (a. s.)
-
Comment ferai-je alors?, lui demandai-je.
-
Maudis-moi (sous la contrainte) mais ne t'innocente pas de moi!
Par
après, Mohamed b. Yûssuf, le frère d'Al-Hajjâj lui
ordonna de maudire 'Ali.
- Le
prince m'ordonne de maudire 'Ali, maudissez le (le prince)!
-
Qu'Allah le maudisse!, dit-il en guise de réponse. (Hujr n'a pas maudit
'Ali), mais ne s'en-est aperçu qu'un homme!
La
politique quraïshite et umayyade s'est poursuivie ainsi jusqu'à
l'époque du calife 'Umar b. Abdil-'Azîz.
3)- A l'époque de 'Umar b.
Abdil-'Azîz
Ce calife umayyade ordonna aux gens de cesser de
maudire l'Imam 'Ali (a.s). La raison de ce changement de politique est
évoquée par les historiens dont Ibn Abîl Hadîd:
'Umar b. Abdil-'Azîz raconte lui-même
et dit:
«Quand j'étais enfant
j'étudiais le Coran chez l'un des fils de 'Utbah b. Mas'ûd. Un
jour, celui-ci passa près de moi alors que je jouais avec des enfants,
que nous maudissons 'Ali - j'ai vu qu'il n'a pas aimé ce que nous avons
dit. Lorsqu'il fut entré à la mosquée, je laissai les
enfants et je le joignis pour étudier auprès de lui, la partie de
la journée. Quand il m'a vu, il s'est levé pour effectuer une
prière. Mais sa prière devenait si longue que j'ai senti
finalement qu'il m'évitait. A la fin de sa prière, il me regarda
méchamment. Je lui demandai alors: «Qu'est ce qu'a le
Sheikh?»
- Ô fils!, est-ce toi qui as maudit 'Ali?,
demanda-t-il.
- Oui, répondis-je
- Depuis quand sais-tu qu'Allah Qui avait
agréé les guerriers musulmans de Badr les a ensuite maudits?, me
demanda-t-il encore.
- Mais 'Ali était-il un guerrier de
Badr?, demandai-je.
- Malheur à toi! La bataille de Badr
n'était-elle pas en totalité pour lui?
- Je ne recommencerai pas, dis-je
- Pour Allah, n'y reviendras-tu point?
- Oui, répondis-je.
Depuis, je n'ai pas maudit 'Ali (a. s.). A
Médine, j'assistais à la prière du vendredi
présidée alors par mon père qui était le Gouverneur
de la ville. Je m'asseyais sous la chaire de la mosquée où mon
père donnait son sermon. Il le faisait très bien, parlait avec
éloquence et facilité jusqu'à la phrase du sermon dans
laquelle il devait maudire 'Ali (a. s.). Là, il commença à
bégayer, éprouva des difficultés à continuer. Cela
m'étonnait beaucoup de lui. Un jour je lui ai demandé: - «Papa,
tu es le plus éloquent des gens, pourquoi alors te voyais-je, le jour de
ta cérémonie, le plus éloquent des orateurs jusqu'à
ce que tu commences à maudire cet homme là?
- Aucun de tous ceux que tu vois sous notre
chaire - syriens et autres - ne nous suivrait un instant s'ils savaient du
mérite de cet homme ('Ali) ce qu'en sait ton père, me
répondit-il». En plus de ce que le maître d'école
m'avait dit à mon bas âge, la parole de mon père est
restée gravée dans mon cur à tel point que je me suis
engagé devant Allah de changer cet état de chose si une partie du
pouvoir m'incombait un jour. Quand Allah m'octroya l'accès au califat,
j'ai annulé cette malédiction et je l'ai remplacée par le
verset suivant. J'en fis un mot d'ordre transmis à tous les lieux de
l'Islam et cela est devenu une sunnah (une tradition): «Certes, Allah
ordonne l'équité, la bienfaisance et la libéralité
envers les proches parents. IL interdit la turpitude, l'acte
répréhensible et la rébellion. IL vous exhorte,
peut-être, réfléchirez-vous». (V. 90/XVI)
Pourtant 'Umar b. Abdil-'Azîz
échoua finalement dans l'entreprise de sa réforme pour deux
raisons:
Les Musulmans à cette époque,
s'étaient habitués à la malédiction de l'Imam 'Ali
(a. s.) à tel point qu'ils y voyaient une tradition qu'ils ne devraient
pas délaisser. Les habitants de Harrân, comme le rapportent
Al-Hamawî et Al-Mas'ûdî, refusèrent d'obéir
à l'ordre de délaisser l'insulte à l'époque
même de 'Umar b. Abdil-'Azîz:
«Les habitants de Harrân - qu'ils
soient maudits par Allah - quand fut annulée la malédiction
d'Abî Turâb - 'Ali (r. d.) - du haut des chaires les jours de
vendredis, refusèrent d'en exécuter l'ordre et dirent: «Pas
de prière sans la malédiction d'Abî Turâb». Ils
restaient accrochés à cette "tradition" pendant une
année jusqu'aux bouleversements que connut l'Orient (le Proche-Orient)
et l'apparition des drapeaux noirs (les 'Abbassides)».(205)
Après 'Umar b. Abdil-'Azîz les
califes umayyades réinstallèrent cette mauvaise
"tradition"?
Les Umayyades tuaient les hommes nommés
'Ali
Ibn Hajar rapporte dans la biographie de 'Ali b.
Rabâh ce qui suit:
«Quand les Banî Umayyah entendaient
dire qu'un nouveau-né s'est fait nommer 'Ali, ils le turent. Quand
Rabâh qui détestait 'Ali (a. s.) le sut, il dit: «Le nom de
mon fils est Ulay». Ibn Hajar ajoute ceci: «'Ali ('Ulay) b.
Rabâh dit: «Je ne pardonne pas à quiconque m'appelle 'Ali,
car mon nom est 'Ulay».(206)
4)- A l'époque des Abbassides
A cette époque des séquelles de ce
que firent les califes et les gouverneurs umayyades restaient encore manifestes
dans la société musulmane. Prenons en trois exemples
empruntés à trois classes sociales différentes.
a)- Des actes des savants
Ibn Hajar rapporte dans la biographie
d'Abî 'Uthmân Hurayz b. 'Uthmân Al-Himçî(207):
«Hurayz avait l'habitude de diminuer 'Ali
(a. s.) et de le maudire. Ismâ'îl b.
'Ayyâsh dit: «J'ai partagé la monture avec Hurayz b.
'Uthmân de l'Egypte à Makkah (la Mecque) et il insultait 'Ali et
le maudissait. Il dit aussi: j'ai entendu Hurayz dire: ce récit que
rapportent les gens, selon lequel le Prophète (SAW) a dit à 'Ali:
«Tu as pour moi le même statut qu'avait Hârûn pour Mûssâ»
est juste mais (pas dans ces termes) celui qui l'avait entendu (le rapporteur)
s'est trompé. Je lui ai demandé: «Quelle est son
erreur?»
Le récit est ainsi: «Tu as pour moi
le même statut qu'avait Qârûn (Coré) pour
Mûssâ», me répondit-il.
Al-Azdî raconte aussi que Hurayz b.
'Uthmân rapporta que le Prophète (SAW) faillit tomber de sa
monture parce que 'Ali b. Abî Tâlib avait détaché
dans ce but la sangle de sa mule.
On demanda à Yahyâ b.
Sâlih pourquoi il ne rapportait pas de hadîth à partir de
Hurayz - comment pourrais-je me faire dicter des hadîths par un homme
avec qui j'avais fait la prière de l'aube pendant sept ans durant
lesquels, il ne sortait de la mosquée qu'après avoir maudit 'Ali
soixante-dix fois.
b)- Les actes des dirigeants
Ibn Hajar rapporte dans la biographie de Nasr b.
'Ali, le récit suivant: «Nasr b. 'Ali rapporta (à ses
étudiants, aux interlocuteurs) le hadîth de 'Ali b. Abî
Tâlib, selon lequel le Messager d'Allah (SAW) prit (un jour) la main de
chacun de Hassan et Hussayn et dit: «Quiconque aime ces deux-ci, leur
père et leur mère, sera, le jour de la Résurrection, au
même rang que moi». Quand le calife abbasside Al-Mutawakkil l'a
appris, il ordonna d'infliger à Nasr b. 'Ali (le rapporteur du
hadîth) mille coups de fouet. Heureusement, Ja'far b. 'Abdil-Wâhid
intercéda en sa faveur en répétant au calife:
«Celui-là appartient à l'Ecole sunnite ...».(208)
c)- Des actes du reste de la population
Adh-Dhahabî rapporte dans la biographie
d'Ibn As-Saqqâ(209) le
récit suivant: Ibn As-Saqqâ, érudit, imam, le
traditionniste de Wâsit (contrée musulmane), Abû Mohamed,
'Abdullah b. Mohamed b 'Uthmân al- Wâsitî. Un jour, il dicta
le hadith de l'oiseau(210) à son
assistance. Alors les curs de ces gens ne le supportant pas, ils
sautèrent sur lui, le chassèrent et lavèrent sa place
après lui. Il s'en alla, garda la maison et ne donna plus de
hadîth à un Wâsitî. C'est pour cela qu'on rencontre
peu de ses hadîths parmi les Wâsitiyyîne.
Les épreuves d'Ahlul-Bayt (a. s.),
à travers les siècles, et leur persécution par les
dirigeants ne se limitaient pas aux exemples cités (les insulter, les
maudire, masquer leurs mérites et leurs hadîths) mais comportaient
toutes sortes de mauvais traitements y compris l'assassinat et l'extermination
(les martyrs d'Ahlul-Bayt à Karbalâ par exemple). Cela s'est
enchaîné aux deux époques umayyade et abbasside comme le
rapporte Abul-Faraj dans son livre Maqâtilu-Tâlibiyyîne.
* * * * *
Dix sortes
d'occultation et de falsification de la Sunnah du Messager (SAW) et
des récits
relatifs à la sîrah d'Ahlul-Bayt et des Compagnons.
Le comportement de l'Ecole des califes à
l'égard de la Sunnah du Messager (SAW), qui s'oppose à son
orientation
La négation du testament
Comme le surnom du Waçi
(dépositaire institué par le Prophète SAW) qu'avait l'Imam
'Ali (a. s) était très célèbre et que cette
célébrité contrariait la politique de l'Ecole des califes,
celle-ci réagit par la négation d'Al- Waçiyyah (le
testament) et l'occultation des textes qui s'y rapportaient.
La mère des Croyants Aïsha
commença par concrétiser cette réaction par une campagne
de contre information très forte visant à la négation du
testament puis cette campagne a été continuée sous
d'autres formes, à travers les siècles. L'occultation des textes
relatifs au testament fut l'entreprise la plus importante de l'Ecole des
califes dans ce domaine. Le chercheur qui s'y penche et persévère
dans l'exploration des documents découvrira sûrement quelque chose
d'énorme et de grave. Ci-après dix sortes de cette occultation,
allant de la moins importante à la plus importante.
|1|- La suppression d'une partie du hadith
prophétique; Et son remplacement par un mot vague.
Citons à titre d'exemple ce que firent
At-Tabarî et Ibn Kathîr du récit relatif à l'appel
lancé par le Prophète (SAW) à Banî Hâshim. A
propos du commentaire du verset 214/XXVI (Avertis ton clan le plus proche),
les deux exégètes supprimèrent une partie du hadîth
prophétique: «mon dépositaire et mon calife parmi
vous» et la remplacèrent par (comme ci, comme çà).
Le même sort fut réservé au
récit relatif à la consultation par le Messager (SAW) de ses
Compagnons au sujet de la bataille de Badr et à leur réponse.
Ibn Hishâm et At-Tabarî
rapportèrent ceci:
«L'information parvient au Messager (SAW)
que Quraïsh s'est mobilisée pour défendre sa caravane. Le
Prophète (SAW) consulta alors les gens à ce sujet. Abû Bakr
as-Siddîq se leva et parla bien. Ensuite 'Umar b. al-Khattâb se
leva et parla bien. Al-Miqdâd b. Amru, lui, dit: «Ô Messager
d'Allah! Va à l'exécution de l'ordre d'Allah et nous sommes avec
toi. Par Allah, nous ne te disons pas comme avaient dit les fils d'Israël à
Mûssâ («Mets-toi en marche, toi et ton Seigneur;
combattez tous deux; quant à nous, nous restons ici» V. 24/V)
mais nous te disons: mets-toi en marche, toi et ton Seigneur; combattez et nous
combattons sûrement avec vous!». Jusqu'alors le Messager d'Allah
(SAW) apprécia son propos et invoqua Allah pour le récompenser en
bien.
La réponse de Sa'd b. Mu'âdh
al-Ancârîy fut celle-ci: «Mets-toi en marche ô Messager
d'Allah en vue de réaliser ce que tu veux. Nous sommes avec toi. Par
Celui Qui t'a envoyé avec la Vérité, si tu affrontes avec
nous cette mer, nous y plongerons avec toi sans que l'un de nous ne s'en
abstienne...»
Le Prophète (SAW) fut très content
de la parole de Sa'd et cela l'encourage (à y aller).
Voyons! Quelle était, au juste, la
réponse des deux Compagnons Abû Bakr et 'Umar au Messager d'Allah
(SAW)??
Il est clair que le contenu de leur
réponse fut supprimé et remplacé par une expression vague:
parla bien. Si cela était bien pourquoi le supprimer tandis que le
propos d'al-Miqdâd le Muhâjirite et celui de Sa'd b. Mu'âdh
l'ançarite furent rapportés? Consultons le recueil (Sahîh)
de Muslim. Voici comment il rapporta le récit précédent
(le début): «Le Messager d'Allah (SAW) consulta ses Compagnons
lorsqu'il apprit l'arrivée d'Abî Sufiân. Quand Abû
Bakr parla, le Prophète lui tourna le dos; ensuite parla 'Umar et il lui
tourna le dos ...».(211) Pourquoi le
Prophète (SAW) leur a-t-il tourné le dos s'ils avaient dit du
bien? Quel était au juste le propos de chacun d'eux? Nous avons
cherché et trouvé le contenu de la réponse chez Al-
Wâqidîy et Al-Maqrîzîy:
«'Umar dit: Ô Messager d'Allah! il s'agit - par Allah - de Quraïsh et de sa puissance!
Par Allah, elle n'a jamais succombé depuis qu'elle est devenue
puissante! Elle n'a jamais cru depuis qu'elle s'est accrochée à sa
mécréance. Par Allah! elle ne
cédera jamais et elle te déclarera la guerre; prépare-toi
donc à cela et amasse ton équipement...»
Nous avons vu que d'après le récit
d'Ibn Hishâm d'At-Tabarî et de Muslim le Compagnon 'Umar parla
après Abû Bakr, que chacun d'eux (selon At-Tabarî et Ibn
Hishâm) parla bien, que selon Muslim, le Prophète tourna le dos
à l'un puis à l'autre. De là on déduit que leur
parole (celle d'Abû Bakr et de 'Umar) était identique. En faisant
abstraction de la parole d'Abû Bakr et en se contentant d'évoquer
celle de 'Umar, Al- Wâqidî et Al-Maqrîzîy, nous mettons
le doigt sur le fait que la parole de ces deux Compagnons était
identique.
Comme leur propos contrarie certaines personnes,
une partie en fut supprimée dans chacun des récits rapportés
par At-Tabarî, Ibn Hishâm et Muslim.
C'est pour avoir réussi ce genre
d'occultation, que ces livres sont devenus les références par
excellence de l'Ecole des califes.
Le recueil d'Al-Bukhârî qui,
à ce sujet, n'en souffla pas mot, est devenu le plus célèbre,
le plus authentique et le plus sûr!
At-Tabarî et Ibn Kathîr
remplacèrent, donc, dans le hadith prophétique, «mon
dépositaire et mon calife» par «comme ci, comme
çà», parce que le récit dans son intégralité
était susceptible d'aviser la communauté du droit de l'Imam 'Ali
(a. s.) au pouvoir suprême. Or cela ne devait pas être
diffusé!
Ce genre d'occultation est très
répandu chez les savants de l'Ecole des califes.
|2|- La
suppression de la totalité du récit relatif à la sîrah des Compagnons, avec, toutefois, une allusion
à cette suppression.
Citons, à ce propos, l'exemple de la
correspondance qui fut entretenue par Mohamed b. Abî Bakr et
Mu'âwiyah. L'auteur de Çaffine, Nasr b. Muzâhim
(mort en 212 h.) et celui de Murûj Adhahab,
Al-Mas'ûdî (mort en 346 h.) donnèrent en détail le
texte de la lettre envoyée par Mohamed b. Abî Bakr à
Mu'âwiyah. Comme le texte comporte les mérites de l'Imam 'Ali y
compris celui d'être le dépositaire du Prophète et la
réponse de Mu'âwiyah qui reconnut ces mérites en plus des
détails en opposition avec l'auréole des califes, At-Tabarî
supprima les deux lettres de son livre en citant la chaîne des
rapporteurs de ces deux lettres, jusqu'à lui-même. Comme excuse,
il affirme que les gens ne supporteraient pas d'entendre le contenu des deux
lettres. Cela veut dire qu'il a caché la vérité (aux
lecteurs et aux gens).
Après lui, Ibn al-Athîr fit de
même et donna la même excuse.
Ensuite Ibn Kathîr fit allusion à
la lettre de Mohamed b. Abî Bakr dans son encyclopédie de
l'histoire(212) et se contenta
de dire: «elle est dure» (les gens ne supporteraient pas d'entendre
le contenu de ces deux lettres) signifie en fait qu'après avoir pris
connaissance des deux lettres, la foi des gens en les califes sera ébranlée,
voire perdue. Ce genre d'occultation (supprimer le récit tout en
reconnaissant l'existence de son contenu) est rare chez les savants de l'Ecole
des califes.
|3|-
L'interprétation du sens du hadith prophétique.
Citons ici l'exemple d'Adh-Dhahabî(213) qui, à propos de la biographie
d'An-Nasâ'î, rapporta ce qui suit:
On demanda à An-Nasâ'î de
rapporter les mérites de Mu'âwiyah. An-Nasâ'î dit:
«Que rapporterai-je? Ô Seigneur! Ne rassasie jamais son
ventre!».
Adh-Dhahabî commente:
«Peut-être est-ce là un
mérite, une vertu de Mu'âwiyah en raison du hadith selon lequel le
Prophète (SAW) aurait dit (dit): «Ô Seigneur! Fais que la
malédiction ou l'insulte que j'inflige à quelqu'un soit pour lui
une purification et une miséricorde!».
Adh-Dhahabî (mort en 748 h.) se contenta
de dire (peut-être, il est probable ...) Mais, après lui, Ibn
Kathîr (mort en 774 h.) dit carrément: «Mu'âwiyah tira
bénéfice dans sa vie d'ici-bas et dans l'autre vie de cette
invocation (faite par le Prophète contre lui: Ô Seigneur! Ne
rassasie jamais son ventre!).
Ainsi les hadiths et les récits qui
comportent une condamnation des dirigeants, des califes ou des gouverneurs sont
interprétés de telle manière que cela se transforme en un
éloge de leurs mérites.
Enfin examinons de plus près ces
récits selon lesquels le Prophète (SAW) aurait - Qu'Allah nous en
préserve - maudit des croyants.
Méditons ces récits imputés
au Messager d'Allah (SAW).
Il aurait dit: «Ô Seigneur! J'ai contracté auprès de
Toi un pacte; Tu n'y manqueras pas, pour moi: je ne suis qu'un homme donc quel
que soit le croyant que j'offense, que j'insulte, que je maudisse ou que je
fouette, Tu feras que cela soit transformé pour lui en prière,
purification et oblation susceptible de le rapprocher de Toi le Jour de la
résurrection».
En écrivant cela, je sens comme si
j'étais poignardé dans le cur à cause de
l'énormité de ce qu'on a imputé au Messager d'Allah (SAW).
Ces gens rapportent ce récit en opposition avec la parole d'Allah -
gloire à Lui -: «En vérité, tu es d'une
moralité éminente». (V. 4/LXVIII)
Ce récit aurait pu être cité
aussi comme exemple de la huitième sorte de l'occultation (le
remplacement des hadîths authentiques par des récits
fabriqués).
|4|- La
suppression d'une partie du propos d'un Compagnon sans y faire allusion.
Prenons comme exemple de ce genre d'occultation
l'amputation du poème du Compagnon ançarite An-Nu'mân b.
'Ajlân, dont nous avons déjà cité deux vers dans le
cadre des traces de la Waçiyyah (le testament) dans la poésie
arabe. Ce poème fut rapporté dans son intégralité
par Az-Zubayr b. Bakkâr au cours des événements relatifs
aux disputes et argumentations d'al-Muhâjirîne et d'al-Ançar
à la Saqîfah. Pour répliquer à 'Amru b.
al-'Açi qui parla, en cette occasion, contre al-Ançar,
An-Nu'mân b. 'Ajlân récita ce poème dans lequel, il
rappelait l'attitude d'al-Ançar lors des batailles menées par le
Messager d'Allah (SAW) contre Quraïsh, l'hospitalité dont ils
avaient fait preuve à l'égard des Muhâjirîne
quraïshites (par le partage notamment de leurs biens avec eux) et, enfin,
les événements de la Saqîfah:
Et vous dites que l'investiture de Sa'd est
illicite. Que celle de 'Atîq b. 'Uthmân (Abû Bakr) est
licite!
Certes Abû Bakr en est digne ...
Mais 'Ali en est plus digne.
Notre tendance était pour 'Ali!
Comprends-tu, ô 'Amru qu'il en est digne
à ton insu? Par la force d'Allah, il appela à la guidance,
Prohibe la turpitude, l'injustice et le
blâmable
Dépositaire du Prophète élu
et son cousin
Tueur des cavaliers de l'égarement et de
la mécréance.
Et celui-ci - Abû Bakr - louange à
Allah -, guide les yeux contre l'aveuglement et ouvre des oreilles alourdies
par la fissure, confident du Messager d'Allah, seul, avec lui dans la grotte et
son ancien ami As-Siddîq.
Dans son livre, Alistî'âb,
Ibn 'Abdil-Bar rapporta le poème précédent à
l'exception des vers suivants:
Par la fore d'Allah, il appela à la
guidance,
Prohibe la turpitude, l'injustice et le
blâmable.
Dépositaire du Prophète élu
et son cousin
Tueur des cavaliers de l'égarements
et de la mécréance.
Ibn 'Abdil-Bar supprima ces vers du fait qu'ils
comportent l'éloge de 'Ali (a. s.) le Dépositaire du
Prophète (SAW) et son cousin mais il garda bien les vers qui vantent les
mérites d'Abû Bakr.
Après lui vint Ibn al-Athîr qui,
à propos de la biographie du même poète ançarite,
rapporte (dans son livre 'Usudul-Ghâbah) une partie du
poème de ce Compagnon, récité à la Saqîfah.
Mais, à son tour, il en supprima les vers relatifs à la
polémique de ce jour-là et les vers faisant l'éloge de
l'Imam 'Ali (a. s.) et soulignant sa qualité de Waçi ou
Dépositaire du Prophète.
Enfin vint Ibn Hajar et rapporta le poème
sans en citer les vers relatifs à la question du califat.
Ainsi, au fur et à mesure qu'on
s'éloigne de l'époque et de l'événement, les
savants suppriment dans les récits rapportés les passages qui ne
leur plaisent pas. Par conséquent, la compréhension de la
réalité historique devient de plus en inaccessible.
|5|- La
suppression de l'intégralité du hadîth prophétique
sans y faire allusion.
Quand Ibn Hishâm s'était
inspiré de la "Sîrah" prophétique d'Ibn
Ishâq, rapportée par Al-Bakkâ'î, il dit dans la
préface du livre: «... En laissant de côté une partie
de ce que rapporta Ibn Ishâq dans ce domaine ... des choses qu'il ne
conviendra pas de citer dans notre propos afin qu'elles ne l'entachent paset
des choses susceptibles de choquer les gens ...».
Le récit de l'avertissement fait partie
de ce qu'Ibn Hishâm a retranché de la Sîrah
prophétique d'Ibn Ishâq: On a vu qu'après la
révélation du verset 214/XXVI (Avertis ton clan le plus
proche), le Messager (SAW) invita Banî 'Abdil-Muttalib, les appela
à l'Islam et dit : «Qui parmi vous m'aidera à cet
effet? Il serait alors mon frère, mon dépositaire et mon calife parmi
vous!». Quand tous les hommes s'en abstinrent et que 'Ali b. Abî
Tâlib répondit: «Moi, ô Messager d'Allah! Je serai ton
assistant (ministre) en cette affaire», il le prit de la nuque et dit:
«Certes voici mon frère, mon dépositaire et mon calife parmi
vous! Ecoutez-le donc et obéissez-lui!». A ce moment là,
les hommes se levèrent en riant et dirent à Abî
Tâlib: «Il t'a ordonné d'écouter ton fils et de lui
obéir».(214)
Ibn Hishâm supprima ce récit de son
livre ainsi que d'autres récits que la clique du califat n'aimait pas
entendre. C'est pour cette raison que la "Sîrah
prophétique" d'après Ibn Ishâq fut
négligée à tel point qu'on n'en trouve presque pas de
copie.(215) En revanche, la
Sîrah d'Ibn Hishâm est devenue la plus célèbre et la
plus sûre chez les gens.
Lorsque At-Tabarî s'est rendu compte de la valeur du récit
précédent qu'il avait rapporté dans son Histoire,
il se rattrapa dans son oeuvre exégétique et commenta ainsi le
verset précité:
«Qui m'aidera en cela pourvu qu'il soit
frère et comme ci comme çà ...». Ensuite il dit:
«certes voici mon frère et comme ci, comme çà!
Ecoutez-le donc et obéissez-lui! ...».(216)
Ibn Kathîr fit de même dans son
livre Al-Bidâyah wan-Nihâyah et dans son commentaire du
Coran.
Pire encore ce que fera après eux Mohamed
Hussayn Haykal dans son livre Hayât-Muhammad. Dans la page 104
de la première édition de son livre, il rapporta le récit
précédent dans ces termes: «Qui m'aidera en cela et il sera
mon frère, mon Dépositaire et mon Calife parmi vous?». Dans
la deuxième édition de 1354 h., page
139, il supprima le récit tout entier.(217)
Ce genre d'occultation (la suppression du
récit sans y faire allusion est très répandue chez les
savants de l'Ecole des califes).
|6|-
L'interdiction d'écrire la sunnah du Messager (SAW).
C'était l'une des sortes d'occultation de
la sunnah, les plus importantes dans l'Ecole des califes. Cette interdiction débuta
à l'époque du Messager (SAW) quand Quraïsh eut interdit
à 'Abdillah b. 'Amru b. al-'Aç d'écrire le hadith du
Messager (SAW) sous prétexte que celui-ci pourrait parler tantôt
sous l'emprise de la colère, tantôt sous le coup du contentement.
Quraïsh ici signifie al-Muhâjirîne parmi les Compagnons du
Messager (SAW); c'est à dire ceux qui empêchèrent le
Prophète d'écrire son testament à la dernière heure
de sa vie. Lorsqu'ils eurent pris le pouvoir après sa mort, ils
interdirent l'écriture du hadîth et cette interdiction resta de
rigueur jusqu'à l'époque du calife umayyade 'Umar b.
Abdil-'Azîz qui leva la prohibition et ordonna de compiler le hadith du
Messager (SAW).
L'auteur d'Al-Aghânî
rapporta selon sa propre chaîne, à partir d'Ibn Shihâb, le
récit suivant: «Khâlid b. 'Abdillah al-Qasrî me dit:
- Écris-moi les lignées arabes.
Je commençai alors par Mudar (ensemble de
tribus arabes). J'y suis resté des jours durant. Une fois chez lui, il
me demanda:
- Qu'as-tu fait?
- J'ai commencé par les lignées de
Mudar mais je n'ai pas fini, répondis-je.
- Déchire le (le
travail écrit). Qu'Allah le déchire avec leurs racines!,
m'ordonna-t-il, et écris-moi la sîrah (biographie et vie
du Prophète (SAW)).
- Oui, remarquai-je, mais quelques traits de la sîrah
de 'Ali b. Abî Tâlib interviendront au passage, les noterai-je
aussi?.
- Non, répondit-il à moins que tu
le voies au fond de la Géhenne!!».(218)
On le voit bien. Les autorités en place
empêchèrent d'écrire le nom de l'Imam 'Ali (a. s.) à
moins que cela constitue une diminution pour lui; comment permettent-elles
alors d'écrire la sunnah du Messager (SAW) qui stipule que le Messager
le désigna comme successeur et dépositaire??
Les califes ont prohibé donc et à
travers les siècles la diffusion de la sunnah du Messager (SAW) et
condamné ceux qui s'opposaient à leur orientation à la
liquidation au sens propre ou au sens figuré.
|7|- La
dépréciation des récits, des narrateurs de la sunnah du
Messager (SAW) et des livres qui critiquent l'Autorité en place et -
parfois - le meurtre des opposants.
Le chercheur ne peut pas recenser les actes par
lesquels les savants (de l'Ecole des califes) déprécient le
narrateur ou le livre qui diminue le sultan ou le gouverneur. Parfois la foule,
portée contre les opposants, tue le savant qui marche en sens inverse du
courant comme cela fut arrivé à An-Nasâ'î, l'auteur
de l'un des recueils de hadîths les plus authentiques (chez l'Ecole des
califes).
Le compagnon Abû Dhar (r. d.) fut aussi,
bien avant An-Nasâ'î, éprouvé et offensé.
Plusieurs savants furent tués pour s'être opposés aux choix
politiques en vigueur. L'érudit Al-Amînî dressa la
biographie de certains d'entre eux dans son livre Shuhadâ'ul-Fadîlah
(Les Martyrs de la Vertu).
|8|- La mise
à feu des livres et des bibliothèques.
Ce genre d'occultation des hadiths
prophétiques commença à l'époque du calife 'Umar b.
al-Khattâb. Ibn Sa'd rapporte dans At-Tabaqât que les
hadiths devenaient, à l'époque de 'Umar, de plus en plus
nombreux. Alors le calife pria les gens de les lui apporter. Une fois entre ses
mains, il les brûla.
Az-Zubayr b. Bakkâr(219) rapporte aussi que Sulaymân b. 'Abdil-Malik,
quand il était seulement prince héritier, passa en pèlerin
par Médine et ordonna à Abân b. 'Uthmân de lui
écrire (composer) la biographie (la sîrah) du
Prophète (SAW) et ses expéditions militaires. Abân lui dit
alors: «Je l'ai déjà; je l'ai eue de quelqu'un de confiance
et authentifiée». L'ordre fut donné à dix scribes de
la recopier sur un parchemin. Quand le prince l'eut parcourue et trouvé
l'allégeance d'al-Ançar aux deux 'Aqabah, leurs mérites
à la bataille de Badr, il dit:
«Je ne croyais pas que ces gens avaient
tout ce mérite; ou bien les membres de ma famille - c'est à dire
les califes umayyades - les ont brimés ou bien ils ne sont pas aussi
valeureux que cela». Adâm dit alors: «Ô prince! Leur
attitude à l'égard du martyr tué injustement -
'Uthmân, le calife - ne nous empêchera pas de dire la
vérité: ils sont tels que le raconte notre livre. Je n'en
ferai une copie qu'après avoir averti le prince des Croyants - son
père 'Abdil Malik - peut-être s'y opposera-t-il. Finalement, il
brûla le livre. Quand son père fut informé de ce qui s'est
passé, il dit: «Que veux-tu d'un livre où nous n'avons
aucun mérite? Veux-tu apprendre aux Syriens les choses que nous voulons
qu'ils n'apprennent jamais?, demanda 'Abdil Malik. Sulaymân
répondit: «C'est pour cela que j'ai ordonné de brûler
la copie et attendu de connaître le point de vue du prince des
croyants».
Le calife apprécia son opinion.
Ainsi les califes des Musulmans et leurs princes
héritiers ordonnèrent de brûler les livres de la sunnah du
Messager (SAW) pour que les Musulmans n'apprennent pas ce qui pourrait
s'opposer aux intérêts de l'Autorité en place. En outre,
des bibliothèques entières comportant des livres de hadiths
furent brûlées.
La bibliothèque d'Al-Karkh,
édifiée à Bagdad par le ministre des Buwayhî et
partisan de l'Ecole d'Ahlul-Bayt (a. s) fut brûlée par les
Saljuqides (partisans de l'Ecole des califes) après leur conquête
du pouvoir.
La bibliothèque du Sheikh
At-Tûsî, à Al-Karkh, fut brûlée aussi.
En Egypte, après la conquête du
pouvoir par Salâhud-Dine, les bibliothèques des califes fatimides
furent brûlées. Voyons! Qui peut savoir combien de hadîths
sont allés en pure perte à cause de ces incendies volontaires?
Combien y avait-il de hadîths authentiques
relatant les droits d'Ahlul-Bayt (a. s.), le testament du Prophète (et
les autres trésors de la sunnah)?
|9|- La suppression
d'une partie du récit relatif à la sîrah des Compagnons et
sa falsification.
Citons
l'exemple du sermon de l'Imam Al-Hussayn (a. s.) rapporté par
At-Tabarî et Ibn al-Athîr dans leurs traités respectifs de
l'histoire:
«Savez-vous
qui je suis? Pensez-y ensuite, revenez à vous-mêmes en vous
blâmant et demandez-vous s'il vous est permis de me tuer et de profaner
ma dignité. Ne suis-je pas le petit-fils de votre Prophète (SAW)
et le fils de son dépositaire (Waçi) qui fut son cousin, le premier
à avoir embrassé l'Islam, à avoir cru en Allah et en Son
Messager? ... Hamzah, le maître des martyrs n'est-il pas l'oncle de mon
père? Ja'far, le martyr ailé n'est-il pas mon oncle?».
Dans son Histoire,
Ibn Kathîr falsifia le récit et rapporta le récit comme
suit:
«Revenez
à vous-mêmes et jugez-vous vous-mêmes! Vous convient-il de
combattre un homme comme moi alors que je suis le petit-fils de votre
Prophète? Il n'y a pas sur terre un autre petit-fils du Prophète
que moi, 'Ali est mon père, Ja'far, celui qui a deux ailes est mon oncle
et Hamzah le maître des martyrs est l'oncle de mon père».(220)
On le voit; Ibn
Kathîr supprima l'évocation du testament et en amputa le sermon de
l'Imam Al- Hussayn parce que la mention d'al-Waçiyyah attirerait
l'attention de la communauté au droit de l'Imam 'Ali et des petits-fils
du Messager (SAW) à la succession et au pouvoir. Or la diffusion de ce
statut inquiète - l'autorité en place. Alors Ibn Kathîr falsifia
le sermon (pour y parer).
|10|- La fabrication des récits inventés pour remplacer
les hadîths authentiques.
Prenons un
exemple: At-Tabarî rapporte à propos des événements
de l'année 30 de l'hégire le récit concernant Abû
Bakr (r. d.): «En cette année, Mu'âwiyah bannit Abû
Dhar de la Syrie à Médine. On en a cité plusieurs
motivations que je n'aime pas citer. Ceux qui trouvent une excuse à
Mu'âwiyah évoquèrent une anecdote que m'a envoyée
Assarîy qui rapporte que Sayf raconta à Shu'ayb ...».
Ibn al-Athîr
emboîta le pas à At-Tabarî et dit à propos de
l'année 30 de l'hégire: «En cette année, Abû
Dhar fut expulsé par Mu'âwiyah de la Syrie à Médine.
Parmi les conditions et les causes de cet exil auquel fut assujetti Abû
Dhar, on a cité les insultes, la menace de meurtre
proférée par Mu'âwiyah contre lui, le bannissement de la
Syrie à Médine sur une monture sans selle, sans bât et
l'expulsion de Médine dans de très mauvaises conditions qu'il ne
convient pas de transmettre ...».
Qui
était donc ce Sayf qui rapporta l'anecdote qui comportait les excuses
trouvées à Mu'âwiyah dans sa persécution d'Abû
Dhar?
C'est Sayf b.
'Umar At-Tamîmîy (mort en 170 h.). Il a rapporté des
récits relatifs à l'époque du Messager (SAW), à la Saqîfah,
à l'allégeance prêtée à Abu Bakr, à la
guerre menée contre les apostats, aux conquêtes islamiques,
à la Guerre du Chameau ...
Les
traditionnistes et critiques des narrateurs disent de lui:
- Faible; son
hadîth délaissé; il est nul; grand menteur; inventeur de
hadîths; accusé d'hérésie.(221)
Dans ses
récits, il a inventé plus de 150 compagnons du Prophète
(SAW). Nous avons publié des études détaillées sur
soixante treize d'entre eux dans le 1e et 2e tomes de
notre livre (cent cinquante Compagnons inventés).
Ses
récits fabriqués ont été diffusés dans plus
de 70 (soixante-dix) recueils et références concernant des
domaines divers comme le hadith, l'histoire, la littérature et d'autres
sources d'études islamiques dans l'Ecole des califes. L'auteur qui puisa
le plus des écrits de Sayf fut At-Tabarî dans son
"histoire".
Les autres textes prophétiques se rapportant au droit
d'Ahlul-Bayt
Il était
nécessaire de présenter au lecteur les sections de recherche
précédentes qui montrent combien la tradition prophétique
avait souffert des différentes sortes d'occultation du fait qu'elle
contrariait à travers les siècles la politique des califes. Allah
- gloire à Lui - nous a guidés à trouver le peu qui en
reste dans les livres, qui échappa à la vigilance de la
"censure". En plus des textes significatifs précédents
dans le domaine de la succession du Prophète (SAW) et de la
dévolution du pouvoir politique, en voici d'autres qui indiquent
clairement le droit des Imams d'Ahlul-Bayt (a. s.) au gouvernement islamique.
La désignation
du dépositaire par des termes différents
Dans la section
consacrée à la terminologie, nous avons vu que la
désignation du Waçi peut se faire par le substantif
d'Al-Waçiyyah ou par les termes de la même famille comme le verbe
Awçâ-Yûçi ou encore par des termes différents
qui portent le même sens que celui par lequel l'instituant dit à
l'institué: «je te demande de faire ceci ou cela» ou sous
forme d'information donnée à d'autres personnes que
l'institué. Par exemple: j'ai institué un tel ou j'ai mandaté
un tel, de faire ceci ou cela après moi comme l'avait fait le Messager
d'Allah (SAW) pour la désignation de son dépositaire sous des
formes différentes.
Le Ministre
(l'assistant) du Prophète (SAW)
a) Dans le
Saint Coran avec l'éclairage de la sunnah.
Les versets
29-35 de la sourate Tâhâ parlent du rang du Prophète
Hârûn (a. s.) à côté de son frère le
prophète Mûssâ (a. s.). Or, le Messager d'Allah (SAW) dit
à l'Imam 'Ali (a. s. ): «N'es-tu pas
content d'avoir pour moi le même statut qu'avait Hârûn pour
Mûssâ, sauf qu'il n'y aura pas de prophète après
moi».
A propos de ce
statut, Allah - gloire à Lui - dit:
«Donne-moi
un assistant de ma famille; Mon frère Aaron; Accrois ainsi ma force;
Associe-le à ma tâche, afin que nous Te glorifiions sans cesse et
que, sans cesse nous t'invoquions. Oui, Tu nous vois parfaitement».
(Vs. 29-35/XX)
Allah
exauça Mûssâ (a. s.) et dit dans le Sait Coran :
«Certes,
Nous avons donné l'Ecriture à Mûssâ et Nous avons
placé à côté de lui son frère Aaron
(Hârûn) comme assistant». (V. 35/XXV)
b)- Quand le
Messager (SAW) fit-il de 'Ali son assistant
Ce fut le jour
où il invita Banî 'Abdil-Muttalib et leur proposa ceci: «Qui
parmi vous m'assistera en cette affaire ...». Seul l'Imam 'Ali
répondit positivement à sa demande. Le Messager d'Allah (SAW) le
prit alors pour wazîr (assistant, auxiliaire, ministre) dans son
entreprise (céleste). Dans son Tafsîr
(exégèse), As-Suyûtî rapporte qu'après la
révélation des versets précédents concernant
Hârûn et Mûssâ, le Messager d'Allah (SAW) invoqua Allah
et dit:
«Ô
Seigneur! Accrois ma force par mon frère 'Ali» et Allah
l'exauça.
Ibn 'Umar
rapporte que le Messager d'Allah (SAW) dit à l'Imam 'Ali: «Tu es
mon frère et mon wazîr (assistant, ministre), tu rembourses ma
dette et tu remplis ma promesse ...».(222)
Ainsi, en
disant à 'Ali «tu as pour moi le même statut qu'avait
Hârûn pour Mûssâ sauf qu'il n'y aura pas de
prophète après moi», le Messager d'Allah (SAW) attribua
à l'Imam 'Ali (a. s.) tout ce qu'avait Hârûn auprès
de Mûssâ à l'exception de la prophétie. Or la
première qualité dans le statut de Hârûn (a. s.) fut
l'assistance, le ministère, le "vicariat"...
Le Calife,
l'Adjoint du Prophète (SAW)
Quand le
Messager sortit à la tête de l'expédition pour Tabûk
et désigna 'Ali pour le remplacer à Médine, celui-ci lui
dit:
«Me
laisses-tu avec les enfants et les femmes?».
Le
Prophète lui dit alors: «N'es-tu pas content que tu aies pour moi
le même statut qu'avait Hârûn pour Mûssâ sauf
qu'il n'y a pas de prophète après moi? Alors qu'Allah dit
à propos de Hârûn, Moïse dit à son frère
Aaron:
«Remplace-moi
auprès de mon peuple, fais ce qui est bien et ne suis pas le chemin
des Pervers ». (V. 142/VII)
Dans l'une des
deux versions du récit précédent, rapportées par
Ahmed b. Hanbal dans son Musnad,(223) le Messager (SAW) dit «... et mon
Calife».
Ce fut ce que
nous pouvions citer à propos des termes: waçi, wazîr,
khalifah respectivement dépositaire- assistant- calife.
Ci-après
d'autres textes qui échappèrent à l'occultation
systématique de l'Ecole des califes.
Waliyyul-Muslimîne,
le Souverain allié, le Tutélaire des Musulmans après le
Messager (SAW).
Cette
qualité fut donnée par le Messager (SAW) à l'Imam 'Ali
dans divers lieux et sous plusieurs formes.
i)- Le récit de la plainte
Buraydah rapporte que le Messager d'Allah (SAW)
envoya deux expéditions au Yaman à la tête de l'une 'Ali b.
Abî Tâlib (a. s.) et à la tête de l'autre Khalid b.
al-Walîd et leur donna cette instruction: «Si vous vous rencontrez,
'Ali sera à la tête (des expéditions), sinon chacun
conduira la sienne». Nous avons rencontré, ensemble, Banî
Zayd, des Yamanistes. Après le combat et la victoire remportée
par les Musulmans sur les polythéistes, 'Ali (a. s.) prit une captive
pour lui-même. Alors, raconta Buraydah, Khalid b. al-Walîd
écrivit une lettre et me la fit porter au Messager d'Allah (SAW) pour
l'en informer. Quand je suis arrivé auprès de lui et qu'il a lu
la lettre, je vis la colère sur son visage. Alors je dis: «Ô
Messager d'Allah! Je cherche refuge auprès de toi, tu m'as envoyé
avec un homme et tu m'as ordonné de lui obéir. Alors j'ai
exécuté ce qu'il avait ordonné». Sur ce, le Messager
d'Allah (SAW) me dit: «Ne médis pas d'Ali, il est de moi et je
suis de lui et il est votre Walî (tutélaire) après
moi». Il l'a dit deux fois.(224)
Dans une autre version, Buraydah ajouta:
«Par notre compagnie! Tends la main pour que
je te renouvelle mon serment d'allégeance! Je ne l'ai quitté
qu'après lui avoir prêté serment d'allégeance sur
l'Islam».(225)
'Imrân b. Huçayn rapporta au sujet de
cet incident le récit suivant:
«Quatre des Compagnons du Messager d'Allah
(SAW) se sont mis d'accord, lors de cette expédition pour porter plainte
contre 'Ali dès qu'ils se trouveraient auprès du Messager (SAW).
Une fois arrivés, l'un d'eux se leva et dit:
«N'as-tu pas vu ô Messager d'Allah ce qu'avait fait 'Ali b.
Abî Tâlib?». Mais le Messager lui tourna le dos. Le
2è, le 3è et le 4è firent comme le premier et, à
chaque fois, le Messager tournait le dos au plaignant. Ensuite, la
colère bien manifeste sur le visage, le Messager (SAW) les envisagea et
dit: «Que voulez-vous de 'Ali (trois fois). Certes 'Ali est de moi et moi
de lui (2 fois) et il est le Walî (le tutélaire) de tout croyant,
après moi».(226)
Une deuxième plainte.
Wahb b. Hamzah rapporta ceci:
«J'ai tenu compagnie à 'Ali (r. d.) de Médine à Makkah. J'ai vu de sa part quelque
chose que je n'ai- pas aimé et lui ai dit: «Je porterai plainte
contre toi lorsque nous serons revenus, auprès du Messager d'Allah
(SAW)». Quand je l'ai rencontré je lui ai dit: «J'ai vu ceci
et cela de 'Ali». Il me rétorqua alors: «Ne dis pas cela car
il est après moi le plus digne de vous (commander)».(227)
La période de la plainte
Les historiens et les biographes parlent de deux
expéditions pour le Yaman, présidées par 'Ali. Nous
croyons qu'elles sont trois. En tout cas la dernière fut en l'an 10 de
l'hégire, à l'issue de laquelle, l'Imam 'Ali (a. s.) rejoignit le
Messager d'Allah (SAW) au pèlerinage d'Adieu avant le Jour de la
Tarwiyah (le 8e jour du mois Dhul-Hijjah).
En ce qui concerne la plainte évoquée
dans le contexte de l'expédition envoyée au Yaman, si elle a
été portée par deux fois au Messager d'Allah (SAW), la
première a eu donc lieu à Médine avant l'an 10 et la
deuxième à Makkah après l'arrivée des compagnons de
l'Imam auprès du Prophète (SAW) avant le Jour de la Tarwiyah,
avant le commencement proprement dit des jours du pèlerinage.
Donc ceux parmi les savants qui ont avancé
que l'événement d'Al-Ghadîr avait eu lieu à cause de
la plainte précitée, n'ont fait que conjecturer parce que
l'événement d'Al-Ghadîr eut lieu après le
pèlerinage à Juhfah et en présence des masses musulmanes
alors que l'audience relative à la plainte était limitée
aux plaignants et se déroula séance tenante, juste après
la formulation des griefs. Quant à la deuxième plainte, le texte
du hadîth précise bien qu'elle eut lieu à leur retour
à Médine.
ii) D'autres traditions dont le contexte ne fut
pas déterminé.
Ibn 'Abbâs rapporte que le Prophète
(SAW) dit à 'Ali «tu es après moi le Tutélaire de
tout croyant».(228)
'Ali lui-même rapporte que le Prophète
(SAW) lui dit: «Certes, tu es le Tutélaire des Croyants
après moi».(229)
La
cérémonie de l'institution de l'Imam 'Ali (s.a) Successeur du
Messager(SAW) et Tutélaire de l'Islam et des Musulmans
Ce fut une grande cérémonie
organisée par le Messager (SAW) en vue de désigner son successeur
héritier et le tutélaire de l'Islam et des Musulmans.
Al-Hâkim al-Haskânî rapporte à ce sujet le
récit suivant:
Ibn 'Abbâs et Jâbir dirent:
«Allah ordonna à Muhammad (SAW) de présenter 'Ali aux gens
pour les informer de son institution (comme successeur)». Le Messager
(SAW) craignit alors qu'on parlât de favoritisme à l'égard
de son cousin et qu'on critiquât la décision. Mais Allah lui
révéla ce verset:
«Ô Messager! Fais connaître
ce qui t'a été révélé par Ton Seigneur. Si
tu ne le fais pas, tu n'auras pas fait connaître Son message. Allah te
protège contre les hommes ...». (V. 67/V)
Alors, le Messager d'Allah (SAW) déclara
l'institution de 'Ali le jour de "Ghadîr Khum".
Ziyâd b. al-Mundhir racontait:
«J'étais chez Abî Ja'far Mohamed
b. 'Ali (a. s.) alors qu'il enseignait aux gens des
hadîths. Soudain un homme de Baçorah nommé 'Uthmân
al-A'shâ, un disciple de Hassan al-Baçrî, se leva et dit:
«Ô fils du Messager d'Allah! (Qu'Allah me sacrifie pour toi).
Al-Hassan (Al-Baçrî) nous informe que ce verset
(susmentionné) fut révélé à propos d'un
homme mais ne précise pas de qui il s'agit». Abû Ja'far (a.
s.) lui dit: «S'il avait voulu le nommer, il l'aurait fait mais il a
peur. (Sache alors que) Jabrâ'îl descendit voir le Prophète
(SAW) ... et lui dit: «Allah t'ordonne d'indiquer à Ta
Communauté leur Tutélaire (Walî) comme tu leur as enseigné
leur prière, leur aumône, leur jeûne et leur pèlerinage,
pour que l'argument (décisif) soit établi contre eux».
Le Messager d'Allah (SAW) dit alors: «Ô
Seigneur! (Tu sais que) mon peuple est encore proche de la Jâhiliyyah
(l'obscurantisme antéislamique). Ils (les gens du peuple) sont remplis
de rivalité et de vanité. Il n'est parmi eux personne qui ne soit
proche parent d'un impie tué par leur Walî ('Ali). Alors j'ai peur
... qu'ils me traitent d'imposteur. Allah - gloire à Lui -
révéla alors le verset (précité, V. 67/V)».
Quand Allah lui garantit Sa protection et le menaça (de
considérer sa mission comme non accomplie parfaitement dans le cas
où il ne transmettrait pas l'ordre de la Wilâyah) le
Prophète (SAW) prit la main de 'Ali ...».(230)
Al-Hâkim al-Haskânî rapporte aussi
ce récit à partir d'Ibn 'Abbâs:
«Lors de l'Ascension (Al-Mi'râj)
du Messager (SAW), Allah que son Nom soit exalté lui dit: «Je n'ai
envoyé de prophète que Je n'aie pas assisté d'un
auxiliaire et tu es le Messager d'Allah et 'Ali ton assistant».
Ibn 'Abbâs ajouta: «Quand le Messager
(SAW) fut descendu, il n'aimait pas tellement en informer les gens du fait
qu'ils étaient encore proches de la Jâhiliyyah ... Le
Prophète (SAW) supportait alors (le fardeau de la mission jusqu'au
18è jour du moi Dhul-Hijjah quand le verset 67/V fut
révélé. Alors il dit: «Ô les gens! Allah m'a
chargé de vous faire parvenir un message lourd à porter car je
craignais que vous me traitiez d'imposteur jusqu'à ce que Allah me
reprochât (cette crainte) et me menaçât par le Verset révélé
...».(231)
D'après Al-Haskânî et Ibn
'Asâkir, le verset précédent voulait dire, selon le
Compagnon Abû Hurayrah, qu'il était nécessaire de faire
connaître aux gens ce qui fut révélé au sujet de
'Ali.
D'autres récits similaires furent
rapportés par Al- Haskânî, Al-Wâhidî,
As-Suyûtî à partir de 'Abdillah b. Abî Awfâ,
Abû Sa'îd al-Khudrî et Ibn Mas'ûdî.
A son retour du pèlerinage d'Adieu, le
Messager d'Allah (SAW) reçut la révélation du verset 67/V.
alors il descendit à l'étang (Ghadîr) Khom, à Al-
Juhfah(232) qui
était le croisement de trois chemins: celui de Médine, celui de
l'Egypte et celui de la grande Syrie (Ash-Shâm).(233) Le
Prophète (SAW) attendit ceux parmi ses Compagnons qui étaient
derrière et y fit revenir ceux qui avaient devancé.(234) Il se
réserva alors une place sous quelques arbres à épines,
qu'on eut d'abord déblayée. On appela à la prière(235) et le
Prophète (SAW) prit place sous ces arbres(236) après
qu'on eut tendu une pièce de tissu sur un arbre en guise de parasol.(237) Après
avoir fait la prière du Dhuhr à une heure très chaude de
la journée,(238) il donna son
sermon qu'il commença par les louanges d'Allah, l'appel à la
vertu et l'exhortation (à faire le bien). Ensuite il dit:
- Bientôt Allah me rappellera à Lui et
je suis responsable et vous êtes responsables. Qu'en dites-vous alors
(comme réponse au jugement dernier)?
- Nous attestons que tu as transmis; tu as bien
conseillé, qu'Allah te récompense bien!, dirent-ils.
- N'attestez-vous pas qu'il n'y a d'autre
divinité qu'Allah, que Muhammad est Son Serviteur et Son Messager, que
le Paradis est vrai et que le Feu est vrai?, leur demanda-t-il.
- Si, nous l'attestons, répondirent-ils.
- Ô Seigneur! Sois-en témoin,
affirma-t-il. N'écoutez-vous pas?
- Si!
- Ô les gens! Je vous devancerai au Bassin
(paradisiaque de l'au-delà) dont la largeur est comme la distance entre
Buçrâ et San'â' et dont les verres en argent pur sont aussi
nombreux que les étoiles. Là, je vous demanderai compte au sujet
d'Ath-Thaqalayn (les deux charges). Regardez donc bien comment vous
les traitez après moi.
Un homme appela pour demander: - que sont-ils
Ath-Thaqalayn? Ô Messager d'Allah!
- Le Livre d'Allah, tel une corde entre Allah et
vous; attachez-vous-y, ne vous égarez pas, ne changez pas. Et Ahlu-Baytî
(ma famille). Allah, le Doux, l'Omniscient m'informa qu'ils (le Livre et
Ahlul-Bayt) ne se sépareront pas jusqu'à ce qu'ils reviennent
vers moi près du Bassin ... J'avais demandé cela à mon
Seigneur! Ne les devancez donc pas! Sinon vous péririez. Ne vous
attardez pas à les rejoindre! Sinon vous péririez; ne leur
enseignez rien non plus car tous deux (le Livre et Ahlul-Bayt) sont plus
savants que vous,(239)
ajouta-t-il.
Ensuite le Prophète (SAW) leur demanda:
- Ne savez-vous pas que je suis plus responsable
des Croyants qu'eux-même?
- Si, Ô Messager d'Allah!,(240)
répondirent-ils.
- Ne savez-vous pas que je suis plus responsable de
tout croyant qu'il ne l'est de lui-même?
- Si, Ô Messager d'Allah! (Ahmed, Ibn Kathîr, idem).
Alors le Prophète (SAW) saisit la main de
'Ali b. Abî Tâlib et la leva jusqu'à ce que les gens vissent
la blancheur de leurs aisselles, puis il dit:
- Ô les gens! Allah est mon Maître; je
suis aussi votre maître. Quiconque me prend pour maître, voici
'Ali, son maître. Ô Seigneur, sois l'allié de ses
alliés et l'ennemi de ses ennemis. Soutiens ceux qui le soutiennent et
abandonne ceux qui l'abandonnent, aime ceux qui l'aiment et hais ceux qui le
haïssent.(241)
Puis le Prophète dit: «Ô
Seigneur sois-en Témoin!»
Ensuite le Messager et 'Ali ne se
séparèrent pas jusqu'à ce que ce verset fût
révélé:
«Aujourd'hui, J'ai rendu votre Religion
parfaite, J'ai parachevé ma grâce sur vous; J'agrée l'Islam
comme étant votre Religion». (V. 3/V)
Le Prophète (SAW) dit alors: «Allahu
Akbar pour le perfectionnement de la Religion, le parachèvement de
la grâce et l'agrément du Seigneur relativement à mon
apostolat et à la Wilâyah pour 'Ali».(242)
Al-Ya'qûbî rapporte dans son Târikh
(histoire) que le dernier verset révélé à
Médine fut le verset 3 de la sourate "La Table Servie",
à l'occasion de l'institution du Prince des Croyants 'Ali b. Abî
Tâlib (a. s.) à Ghadîr Khum.(243)
Par après, 'Umar b. al-Khattâb le
rencontra et lui dit, dans plusieurs versions: «Félicitations
ô Ibn Abî Tâlib! Tu es devenu - matin et soir - Maître
de tout croyant et de toute croyante!»(244)
Al-Wilâyah (la
Souveraineté) et les détenteurs de l'autorité dans le
saint Coran
i) La Wilâyah de 'Ali dans le Sait Coran
Les hadîths que nous avons cités
confirment l'institution de 'Ali par le Prophète (SAW) comme Walî
sur les croyants en conformité avec le verset coranique suivant:
«Vos n'avez pas de maître en dehors
d'Allah et Son Messager et de ceux qui s'acquittent de la prière, ceux
qui font l'aumône tout en s'inclinant humblement (en
génuflexion)». (V. 55/V)
D'après Ibn 'Abbâs, Abî Dhar,
Anas b. Mâlik, l'Imam 'Ali et d'autres Compagnons: «Un Musulman
pauvre entra un jour dans la Mosquée du Messager (SAW) et
quémanda quelque chose. 'Ali qui était en train de faire une
prière facultative fut néanmoins sensible à l'appel du
mendiant et lui fit signe par la main droite derrière le dos afin qu'il
prît la bague de son auriculaire. L'homme l'a fait, invoqua Allah pour
'Ali puis s'en alla. Avant que l'assistance ne sorte de la Mosquée,
Jabrâ'îl (a. s.) descendit avec le verset
précédent».(245)
Hassân b. Thâbit, le poète, dit
alors des vers à ce sujet:
Ô Abâ Hassan! Que mon âme et mon
cur soient sacrifiés pour toi,
Ainsi que tout homme lent ou actif dans le chemin
de la guidance.
C'est toi qui donna en
pleine génuflexion
Ô le meilleur incliné! que les âmes du peuple soient sacrifiées pour
toi
Allah révéla à ton sujet la
meilleure Wilâyah
Qu'Il affirma dans les législations
confirmées.
Critique de la signification donnée au
verset
D'aucuns ont dit que les pronoms personnels dans la
partie du verset relative à ceux qui font la prière,
l'aumône ... sont au pluriel tandis que l'homme désigné est
une seule personne (l'Imam 'Ali)?
L'auteur fait à ce propos la remarque
suivante: «cette critique n'est qu'une conjecture! Car ce qui n'est pas
correct c'est l'emploi du terme singulier pour désigner un pluriel. En
revanche, l'inverse, comme dans le verset en question, est fort possible et
permis dans les conversations arabes. Cela se trouve aussi dans
différents lieux du Sait Coran. Prenons en l'exemple de ce qu'il y a
dans la sourate Al- Munâfiqîne (les Hypocrites):
«Au Nom d'Allah le Clément le
Miséricordieux. Quand les hypocrites viennent à toi, ils disent:
«Nous attestons que tu es le Messager d'Allah.»
Allah sait que tu es Son Messager. Et Allah sait
que les hypocrites sont menteurs ...
Quand on leur dit: «Venez le Messager d'Allah
va demander pardon pour vous», ils détournent la tête. Et tu
les vois s'éloigner, remplis d'orgueil ...
Ce sont eux qui dirent: «Ne dépensez
rien pour ceux qui sont auprès du Messager d'Allah afin qu'ils se
séparent de lui».
Les trésors des cieux et de la terre
appartiennent à Allah. Mais les hypocrites ne comprennent pas.
Ils disent: «Si nous revenions à
Médine, le plus puissant de cette ville en expulsera le plus
faible».
La puissance appartient à Allah, à
Son Messager et aux Croyants. Mais les hypocrites ne savent pas». (Vs. 1-8/LXIII)
Dans son exégèse, At-Tabarî
dit: «Seul 'Abdullah b. Abî Salûl était visé
par tous ces versets. Selon les récits rapportés et les livres
des savants, toute la sourate fut révélée à son
sujet».(246)
A son tour, As-Suyûtî rapporte, citant
Ibn 'Abbâs que celui-ci dit: «Tout ce qui fut
révélé dans cette sourate, ne concernait que 'Abdullah b.
Ubay».(247)
Son histoire, en résumé, est
relatée par les biographes et dans les oeuvres
exégétiques: «Jahjâh al-Ghifârî,
travailleur salarié de 'Umar b. al-Khattâb et Sinân al-Juhaniy
l'allié de Banîl-Khazraj se bousculèrent après la
bataille de Banî Mustaleq, au sujet de l'eau (qu'ils voulaient puiser) et
en venaient à se battre. Al-Juhaniy cria alors: «Au secours
ô Al-Ançar!». Et Jahjâh cria, à son tour,
«Au secours! ô les Muhâjirîne!».
Sur ce, 'Abdullah b. Ubay se fâcha en présence d'un groupe
d'Ançarites qui étaient avec lui - parmi eux il y avait Zayd b.
Arqam, encore un jeune homme à cette époque. Ibn Ubay dit:
«L'ont-ils fait? Ils nous ont bousculés, concurrencé
dans notre propre pays! Par Allah! Le proverbe qui s'applique à nous en
rapport avec ces Quraïshites est celui qui dit: Engraisse bien ton chien
pour qu'il te morde, par Allah, si nous revenions à Médine le
plus puissant de cette ville en expulserait le plus faible .
Ensuite, parlant à l'assistance il dit: «Voici ce que vous avez
fait de vous-mêmes! Vous les avez hébergés chez vous, et
partagé vos biens avec eux; par Allah, si vous les empêchez
d'avoir accès à ce qu'il y a entre vos mains, ils quitteront
sûrement votre pays». Zayd b. Arqam rapporte alors ses propos au
Messager d'Allah, qui était entouré de ses Compagnons, parmi eux
'Umar b. al-Khattâb».(248)
Dans le même sens, on peut citer les versets
suivants: Le Prophète en disant: «il est tous oreilles»
(V. 61/IX).
«Ceux auxquels les gens disaient: (les
gens les impies) ont sûrement réuni leurs forces contre vous ...».
(V. 173/III)
«... Ils disaient: «y a-t-il quoi
que ce soit qui nous concerne en cette affaire? ...». (V. 154/III)
Et d'autres versets encore où le pluriel est
employé mais une seule personne est visée.
ii)- Les détenteurs de l'autorité:
'Ali et les Imams de sa descendance (a. s.)
Les récits et les narrations successives et
concordantes ont confirmé l'institution de 'Ali (a. s.) successeur du
Messager (SAW) et que les détenteurs de l'autorité
signalés par le verset coranique précité n'étaient
que 'Ali et les Imams parmi sa descendance.
«Ô vous qui croyez! Obéissez
à Allah! Obéissez à Son Messager et à ceux, d'entre
vous, qui détiennent l'autorité». (V. 59/IV)
Les récits suivants le confirment aussi:
D'après Shawâhid At-Tanzil, 'Ali
demanda au Messager d'Allah: «Qui sont-ils?». «Tu es le
premier d'entre eux», répondit-il.
D'après Mujâhid, «les
détenteurs de l'autorité parmi vous», il s'agit de
'Ali b. Abî Tâlib que le Messager d'Allah (SAW) désigna
après lui à Médine. Allah ordonna alors à Ses
serviteurs de lui obéir, de ne pas être en désaccord avec
lui.
«Que dis-tu de ce verset (V. 59/IV)?, demanda
Abû Baçîr à Abî Ja'far.
- Ce verset fut révélé
à propos de 'Ali b. Abî Tâlib, répondit-il.
- Les gens disent: qu'est ce qui L'empêcha de
nommer 'Ali et Ahlul-Bayt dans Son Livre?, redemandai-je.
- Dis-leur: Allah a descendu sur Son Messager les
Versets relatifs à la prière sans préciser s'il s'agissait
de trois ou de quatre "Ra'kat" inclinantes. Et c'était le
Messager d'Allah qui en donna l'explication. Le verset 59/IV fut
révélé à propos de 'Ali, Hassan et Hussayn et le
Messager d'Allah (SAW) dit à sa Communauté: «Je vous
recommande le Livre d'Allah et Ahlul-Bayt. J'ai demandé à Allah
de ne les séparer qu'une fois revenus à moi au Bassin
(paradisiaque) et IL m'a exaucé».
iii)- La
tradition de 'Arche:
La tradition
prophétique selon laquelle l'exemple d'Ahlul-Bayt dans cette
Communauté est celui de l'Arche de Noé (a. s.) et celui de la
porte du "pardon" chez les Israéliens
Ahlul-Bayt et des
Compagnons tels que Abû Dhar, Abû Sa'îd al-Khudrî, Ibn
'Abbâs et Anas b. Mâlik rapportèrent ce récit:
«Le Messager
d'Allah (SAW) dit: «Ahlu-Baytî comme l'arche de Noé: celui
qui y monte sera sauvé et celui qui s'y attarde périra (sera
noyé)».
Dans certaines
versions: «... sont comme la porte du "Pardon" (Hittah)
que devaient franchir les Israélites».
Les
références qui comportent ces hadiths sont Dhakhâ-irul
'Uqbâ (Al-Muhib At-Tabarî) p. 20; Mustadrak,
Al-Hâkim (2/343, 3/150); Hilyatul-Awliyâ' (Ibn Nu'aym,
4/306); Târîkh Bagdad (Al- Khatîb, 12/19); Majma'uz-Zawâ'id
(Al-Haythamî, 9/168); Ad-Durrul-Mantûr
(As-Suyûtî, commentaire du verset 58/II). Dans un autre livre
d'As-Suyûtî (Târîkhul-Khulafâ', p. 270),
Al-Ma'mûn citant Ar-Rachîd citant Al-Mahdî citant
Al-Mansûr citant son père, citant son grand-père, tous
rapportent qu'Ibn 'Abbâs entendit le Prophète (SAW) dire:
«Ahlu-Baytî sont comme l'Arche de Noé; celui qui y monta fut
sauvé et celui qui s'y est attardé, a péri». Voir
aussi Kanzul-'Ummal, 6/153-216. Aç-Çawâ'iqul-Muhriqah
(Ibn Hajar p. 75) cité à partir du Dâruqutnî,
At-Tabarânî, Ibn Jarîr, Ahmed b. Hanbal et d'autres.
Tous ces arguments
puisés du Livre et de la sunnah prouvent la désignation de son
successeur par le Messager (SAW). Corroborent cette thèse d'autres
textes et d'autres récits relatés dans ce qui suit:
La fonction des
Imams: 'Ali et ses onze descendants (a. s.): Transmettre et faire
connaître la Sunnah du Messager d'Allah (SAW)
Dans plusieurs versets
coraniques, la fonction des messagers est limitée à la
transmission (de la parole d'Allah à leur peuple):
«Il n'incombe
au Prophète que de transmettre le message». (V. 99/V)
«Il incombe
seulement au Messager de transmettre en toute clarté Ses messages».
(V. 54/XXIV; 18/XXIX et 35/XVI)
La fonction du Sceau
des prophètes Muhammad (SAW) fut limitée à la transmission
du message divin:
«Tu es
seulement chargé de transmettre le message prophétique».
(V. 20/III; V. 48/XLII)
La transmission est de
deux sortes: directe et indirecte. Elle a aussi pour objet l'acte qu'il est
temps d'accomplir ou celui qu'on devra accomplir par après. Ainsi on
peut citer à titre d'exemples: l'urgence de l'arbitrage entre les deux
groupes de Musulmans qui se combattent; le devoir des Musulmans - après
le Prophète - à l'égard d'un dirigeant injuste.
Ce que transmet le
Prophète se devise aussi en deux parties:
Le Livre d'Allah,
c'est-à-dire dans cette Communauté le Sait Coran dont le sens et
la lettre sont révélés par Allah au Messager: «...
Ce Coran m'a été révélé pour que je vous
avertisse vous et ceux auxquels il est parvenu». (V. 19/IV)
Ce dont le
Prophète a reçu en révélation le sens et non la
lettre comme la transmission par le Prophète (SAW) dans son propre style
des détails de la Shari'ah - (la législation islamique).
«IL a établi pour vous, en fait d'obligations religieuses; ce
qu'IL avait prescrit à Noé ce que nous te révélons
et ce que Nous avons prescrit à Abraham à Moïse et à
Jésus: «acquittez-vous du culte! Ne vous divisez pas en sectes!».
(V. 13/XLII)
Le Messager (SAW) ne
fit que transmettre en dehors du Sait Coran ce qui lui a été
révélé en matière du nombre des inclinations de la
prière, de ses invocations, des jugements législatifs, de
l'histoire des communautés anciennes, des événements
ultérieurs dans ce bas-monde et dans l'au-delà. L'objet de cette
sorte de transmission s'appelle: "Le noble hadîth du
Prophète".
«Il ne parle
pas sous l'empire de la passion. C'est seulement une Révélation
qui lui a été inspirée». (Vs. 3-4/LIII)
La fonction du
Prophète est donc limitée à la transmission. C'est sa
qualité principale quand il dit alors: «cet homme est de
moi», cela signifie qu'il est de lui en cette matière, dans le
domaine de la transmission. Ce n'est pas arbitrairement que nous
avançons cette explication. Le Prophète lui-même le dit
clairement dans une partie de ses hadîths dont celui-ci:
Histoire de la
transmission de la sourate «L'Immunité»
Anas, Ibn 'Abbâs,
Sa'd b. Abî Waqqâs, 'Abdullah b. 'Umar, Abû Sa'îd
al-Khudrî, 'Umar b. Maymun, Abû Bakr et 'Ali b. Abî
Tâlib rapportèrent tous le verset de la transmission de
l'Immunité. En voici selon 'Ali (a. s.) telle qu'elle fut relatée
par Ahmed b. Hanbal dans son Musnad:
«Le
Prophète fit venir Abâ Bakr et l'envoya avec la sourate de
l'Immunité vers les habitants de Makkah pour leur transmettre ces
instructions: «Il est désormais (après cette année
là) défendu qu'un polythéiste fasse le pèlerinage
qu'une personne nue fasse la circumanbulation autour de la Maison (d'Allah).
Qu'on sache qu'une âme non musulmane n'aura pas accès au Paradis,
que ceux (parmi les impies) qui ont conclu un pacte avec le Messager d'Allah
(SAW), leur pacte sera respecté jusqu'à son terme et que Allah et
Son Messager désavouent les Associateurs». Trois jours du
départ d'Abû Bakr avec l'Immunité, le Prophète dit
à 'Ali: «Rejoins-le, renvois-le moi et transmets
l'Immunité!». Ce que 'Ali fit. A son retour, Abû Bakr pleura
et demanda: «Ô Messager d'Allah! Quelque chose (de mal) fut-il
révélé à mon sujet?»
- Non, répondit
le Prophète, il ne s'est passé que du bien; seulement, il m'a
été ordonné de transmettre moi-même ou un homme de
moi». (249)
Les versions de ce
récit, rapportées par Ibn 'Umar et Abû Sa'îd
al-Khudrî sont similaires.
Ainsi tant le texte que
le contexte nous renseignent du but visé par la transmission: il s'agit
de faire connaître ce qui a été
révélé, en premier lieu par Allah à Son Messager en
matière de prescriptions religieuses adressées aux individus
responsables. Or, seul un Messager ou un homme de lui peut s'en acquitter. En
revanche, la transmission en second lieu c'est à dire après celle
faite par le Messager ou par un homme de lui, pourrait être accomplie par
les sujets responsables à leurs semblables. Cette permission de
transmettre, voire son obligation sera ainsi et pour toujours poursuivre par
tous ceux auxquels le message est parvenu. Seule donc la transmission au sens
premier du terme fut visée par le Messager (SAW).
Un autre récit
prophétique corrobore l'interprétation donnée au terme
"Minnî" (de moi) employé par le Messager (SAW):
'Ali
était du Prophète (SAW) ce qu'était Hârûn de
Mûssâ (a. s.)
Le Messager d'Allah dit
à 'Ali: «Tu es de moi ce qu'était Hârûn de
Mûssâ sauf qu'il n'y a pas de prophète après
moi».(250)
Ce que signifie
"minnî" (de moi)
dans les récits prophétiques
Le hadîth
précédent montre clairement le sens de cette locution
employée dans d'autres récits: comme Hârûn
était l'associé de Mûssâ (a. s.) dans la
prophétie et son auxiliaire dans la transmission du message, 'Ali qui a
pour le Sceau des prophètes (SAW) le même statut qu'avait
Hârûn pour Mûssâ à l'exception de la
prophétie garde l'autre qualité c'est à dire la fonction
d'auxiliaire dans la transmission.
Le Prophète
(SAW) clarifia lui-même le sens du terme "minnî"
le Jour de 'Arafat durant le pèlerinage d'Adieu:
«'Ali est de moi
et je suis de 'Ali. Ne transmettra mon message que moi-même ou
'Ali».(251)
La narration de
Buraydah (histoire de la plainte) et celle de 'Imrân b. Huçayn
sont similaires.
Ainsi donc la fonction
de 'Ali et des Imams parmi ses descendants consiste en la transmission directe
du message religieux aux sujets de la Communauté. La différence
qui sépare leur statut de celui du Prophète (SAW) est que
celui-ci reçoit les stipulations par l'intermédiaire d'Al-Wahye
(la Révélation) tandis qu'ils ne font que transmettre ces
prescriptions religieuses par l'intermédiaire du Prophète (SAW)
à la Communauté. Le Messager d'Allah les a préparés
à porter le fardeau de la transmission, aidés par l'infaillibilité
que leur accorda Allah contre toute souillure, par le fait qu'il les a
purifiés totalement et par l'éducation spécifique que
donna le Prophète (SAW) à l'Imam 'Ali qui eut grand soin de
transmettre ses connaissances et sa sagesse aux Imams parmi sa descendance.
Le porteur des
connaissances prophétiques
D'après
Ar-Râzî (Tafsîr) et Al-Muttaqî al-Hindî
(Kanz-Al-'Ummâl) 'Ali (a. s.) dit: «De la science, le
Messager d'Allah m'enseigna mille portes (voies). Chacune de ces portes s'est
ramifiée en mille portes».
Abût-Tufayl dit:
«J'ai assisté à un sermon donné par 'Ali et je l'ai
entendu dire: «Demandez-moi à savoir, car par Allah! des événements (choses) qui se produisent
d'ici jusqu'au Jugement dernier, il n'y a pas un seul au sujet duquel vous me
questionnerez que je ne vous en donne le récit. Demandez-moi à propos
du Livre d'Allah car, par Allah, il n'y a pas de verset que je ne sache! Je
vous dirai s'il fut révélé de jour ou de nuit dans une
plaine ou sur une montagne ...».(252)
D'où le
hadîth rapporté par Jâbir b. 'Abdillah: «Je suis la
Cité de la science et 'Ali en est la porte (le portail); quiconque
désire se rendre à la cité doit passer par la
porte». En commentant ce hadîth, Al- Hâkim dit: «C'est
un hadîth authentique de par sa chaîne de transmission».(253)
Dans une autre version:
«quiconque veut la science qu'il aille voir la porte».(254)
Selon un autre
récit: «Le Messager d'Allah (SAW) saisit la main de 'Ali le Jour
de Hudaybiyyah et dit: «Voici le Prince des Vertueux, le tueur des
Pervers, est victorieux celui qui le soutient; est abandonné celui qui
l'abandonne. - Il le disait à haute voix - je suis la Cité de la
science et 'Ali sa porte. Quiconque veut la maison qu'il passe par la porte».(255)
Les traditions
relatives au statut des petits-fils du Messager d'Allah (SAW)
Dans son Musnad,
Ahmed rapporte à partir d'Al- Miqdam b. Ma'dîy Karib que «Le
Messager d'Allah (SAW) posa Al-Hassan dans son giron et dit: «celui-ci
est de moi».(256)
Al-Barâ' b. 'Azib
rapporte aussi que le Prophète (SAW) dit à Hassan ou à
Hussayn: «celui-ci est de moi».(257)
De même,
Al-Bukhârî, At-Tirmidhî, Ibn Majah et d'autres rapportent que
le Messager d'Allah (SAW) dit: «Hussayn est de moi et moi, suis de
Hussayn. Qu'Allah aime celui qui aime Hussayn. Hussayn est Sibt mina
Al-Asbât (mon descendant)».(258)
Plusieurs autres
récits similaires sont rapportés dans ce sens (Kanz
Al-'Ummâl, Al-Muttaqî 16/270, 13/106, 13/101-105; 16/270)
Ici encore, lorsque le
Messager d'Allah (SAW) dit que Hassan et Hussayn sont de lui (minnî),
cela veut dire que dans le domaine de la transmission du Message divin et des
prescriptions de l'Islam, ils sont de lui (et sont chargés de la
même fonction).
Quand le
Prophète dit que Hassan et Hussayn sont ses petits-fils, ses descendants
(Asbât), il ne s'agit pas d'une redondance inutile - loin du
Prophète ce genre de bavardage - mais il fait là le rapprochement
entre ses petits-fils et ceux d'Ibrâhim et d'Isaâq (a. s.)
cités par le Sait Coran dans le verset suivant:
«Dites:
Nous croyons en Allah,
à ce qui nous a
été révélé,
à ce qui a
été révélé à Abraham, à
Ismâ'îl, à Isaâq, à Jacob et à
Al-Asbât (descendants de Ya'qub),
à ce qui a
été donné à Moïse et à Jésus;
à ce qui a
été donné aux prophètes, de la part de leur
Seigneur.
Nous ne
distinguerons point l'un d'entre eux. Nous sommes soumis à Allah». (V. 136/II)
(voir
aussi le verset 140/II, et le verset 84/III et le verset 163/IV)
Ainsi le récit
relatif à Hassan et à Hussayn s'apparente à celui du
statut de l'Imam 'Ali (a. s.). Celui-ci est du Prophète ce
qu'était Hârûn de Mûssâ. Le statut de
Hârûn (a.s) est décrit dans le St Coran: (Tâhâ,
Vs. 29-36), (Le Récit, Vs. 34-35), (Al-A'râf, V. 142),
(Al-Furqân, V. 35), (Les Croyants, V. 45).
D'après ces
versets Allah fit de Hârûn un auxiliaire de son frère et un
associé dans la prophétie. Il l'aide et le fortifie; il le
remplace à la tête de son peuple ... De même 'Ali (a. s.)
avait, à l'exception de la prophétie, le même statut que
celui de Hârûn c'est à dire qu'il était l'auxiliaire
du Sceau des prophètes, de son vivant, son associé dans la
fonction de la transmission seulement. Après sa mort, il incombait
à l'Imam 'Ali de le remplacer dans son peuple et de continuer à
porter le fardeau de la transmission. Ce même statut fut attribué,
après leur père, à Hassan et à Hussayn (a. s.)
à l'exception de la prophétie, la seule différence qui les
distingue d'Al-Asbât (les fils d'Israël) à cause du fait
qu'il n'y a pas de prophète après Muhammad (SAW). Leur reste la
responsabilité de la transmission des prescriptions islamiques
émanant d'Allah.
Le dernier
dépositaire de ce statut jouit aussi d'une place particulière
dans la sunnah prophétique.
Le
Prophète (SAW) annonce la bonne nouvelle de l'apparition
d'Al-Mahdî (a. s.) vers la fin des temps: Al-Mahdî (a. s.) porte le
même prénom que celui du Prophète (SAW)
Le Messager d'Allah
(SAW) dit: ne disparaîtra ce bas monde qu'après le règne
sur les Arabes d'un homme issu de ma famille, portant le même
prénom que le mien.(259)
Selon Abû
Sa'îd al-Khudrî, le Messager (SAW) dit: «L'heure ne
viendra que lorsque la terre aura été remplie d'injustice et
d'agression. Ensuite paraîtra un homme des Ahlu-Baytî et y fera
régner l'équité et la justice».(260)
Al-Mahdî
(a. s) est l'issu d'Ahlu-Bayt (a. s.)
Ibn Mâjah
rapporte à partir d'Abû Hurayrah que le Messager d'Allah (SAW)
dit: «S'il ne restait de ce bas monde qu'un seul jour, Allah allongerait
ce jour pour y faire régner un homme de ma famille (Ahlu-Baytî)
qui s'emparera de la montagne du Daylam et Constantinople».
Ibn Mâjah (Sunan,
chap.: "L'apparition d'Al-Mahdî") et Ahmed (Al-Musnad,
1/84) rapportent à partir de 'Ali (a. s.) que le Messager (SAW) dit:
«Al-Mahdî
est issu de nous (Ahlul-Bayt). En une nuit, Allah le rendra bon à
agir».
Al-Mahdî (a. s.) est descendant de Fatima
(a. s.)
Abû Dâûd rapporte à partir
d'Umm Salamah qui dit: «J'ai entendu le Messager (SAW) dire:
«Al-Mahdî est issu de ma descendance, de Fatima».(261)
Al-Mahdî
(a.s) est descendant d'Al-Hussayn (a. s.)
D'après Al-Muhib
Tabarî (Dhakhâ'ir Al-'Uqbâ, p. 136), Abû Ayyûb
al-Ançârî dit: «Le Messager d'Allah (SAW) dit:
«Des deux (Hassan et Hussayn) naîtra le Mahdî de cette
Communauté».
Dans le même
livre, le récit est rapporté aussi par Hudhayfah: «Le
Prophète (SAW) dit: «S'il ne restait de ce bas monde qu'un seul
jour, Allah allongerait ce jour pour faire apparaître un homme issu de ma
descendance et portant le même prénom que le mien. Salmân
demanda alors: «Issu de qui de tes fils?». De celui-ci,
répondit le Prophète (SAW) en tapotant de sa main sur Al-Hussayn
(a. s.)».
Ainsi, dans les
traditions rapportées, le Messager d'Allah (SAW) insista sur l'Imamat du
premier Imam 'Ali (a. s.) et sur l'annonciation de la bonne nouvelle relative
à l'apparition du dernier Imam: Al-Mahdî (a. s.) tout en signalant
que le nombre des Imams est douze. Si donc on connaît le premier, le
dernier et le nombre des Imams, aucun doute ne subsistera quant à
l'identité des Imams (a. s.).
Des traditions
prophétiques relatives à l'Imamat d'Ahlul-Bayt (a. s.)
Les récits qui
se rapportent à l'Imamat d'Ahlul-Bayt (a. s.), sont nombreux. Les uns et
les autres concernent l'ensemble des Imams, les autres parlent de certains
d'entre eux en particulier. Commençons par la première
catégorie de ces récits.
Hadîth
Ath-Thaqalayn
a)- Lors du
pèlerinage d'Adieu
Jâbir rapporte
qu'il a vu le Messager d'Allah (SAW) sur sa chamelle Al-Quçwâ', le
Jour de 'Arafah' lors de son pèlerinage et qu'il l'a entendu dire dans
son sermon:
«Ô les
gens! J'ai laissé parmi vous ce qui vous préservera de
l'égarement si vous vous y attachez: le Livre d'Allah et 'Itratî
(Ahlu-Baytî)».
Selon At-Tirmidhî
d'autres Compagnons que Jâbir rapportent ce hadîth notamment
Abû Sa'îd al-Khudrî, Zayd b. Arqam et Hudhayfah b. Usayd.(262)
b)- A Ghadîr
Khum
Zayd b. Arqam rapporte,
selon plusieurs traditionnistes, que le Messager d'Allah (SAW) a tenu un sermon
à un étang appelé Khum entre Makkah et Médine ...
et dit:
- «Ô les
gens! Je ne suis qu'un être humain (mortel), bientôt, Allah me
rappellera à Lui. Je laisse parmi vous deux poids, d'abord le Livre
d'Allah comportant guidance et Lumière; attachez-vous au Livre d'Allah
puis Ahlu-Baytî».(263)
- «Je laisse
parmi vous deux choses; si vous vous y attachez, vous ne vous égarerez
pas après moi, l'une étant plus grande que l'autre: le Livre
d'Allah, comme une corde tendue entre le ciel et la terre et ma descendance,
Ahlu-Baytî et ils ne se sépareront qu'une fois arrivés auprès
de moi au Bassin (paradisiaque), alors considérez bien la manière
dont vous m'y remplacerez».(264)
Les récits
rapportés par Al-Hâkim dans Al- Mustadrak sont
similaires.(265)
Comme le
Prophète parla de l'origine de ses Dépositaires, il parla de leur
nombre.
Le nombre des
Imams (a. s.)
Le Messager (SAW)
informa que le nombre des Imams tutélaires et dirigeants de la
Communauté après lui, est douze comme l'ont rapporté les
traditionnistes suivants:
(1)- Muslim rapporte
à partir de Jâbir Samurah qui affirme avoir entendu le
Prophète (SAW) dire: «La religion restera établie (sur
terre) jusqu'à l'avènement de l'Heure, jusqu'à ce que
douze califes aient pris (successivement) le pouvoir parmi vous. Tous, issus de
Quraïsh».
(2)- Dans un autre
récit: «Cette Communauté (Ummah) ira bien droit
(victorieuse sur son ennemi) jusqu'à ce que douze de ses Clifes soient
passés, tous de Quraïshe. Après eux il y aura des troubles
et du chaos».(266)
(3)- «Cette
Communauté aura douze Dirigeants à qui ne nuiront point ceux qui
les auront abandonnés. Tous issus de Quraïshe».(267)
(4)- «Le cours
des choses ira normalement tant que Dirigent la Communauté douze
hommes».(268)
(5)- D'après
Anas, Le Messager (SAW) dit: «Cette religion restera établie
jusqu'au passage de douze issus de Quraïsh. Après leur mort, la
terre s'agitera de ses habitants».(269)
(6)- Une autre version
semblable à (3).
(7)- Ahmed, Al-Hâkim
et d'autres rapportent à partir de Masrûq qui raconte: «Une
nuit, nous étions assis chez 'Abdullah b. Mas'ûd qui nous
enseignait du Coran quand un homme lui demanda: « Ô Abâ
'Abdir-Rahmân! Avez-vous demandé au Messager d'Allah (SAW) combien
de Califes dirigeront cette Ummah (Communauté)?» 'Abddullah dit
alors: «Personne, depuis que je suis venu en Irak, ne m'a posé
cette question! Oui, on le lui a demandé: douze, le même nombre
que celui des chefs des fils d'Israël».(270)
(8)- Dans une autre
version, Ibn Mas'ûd rapporte que le Messager (SAW) dit: «Il y aura
après moi autant de califes qu'il y avait dans la communauté
(compagnons) de Mûssâ»(271) Ibn Kathîr
ajoute que d'autres récits similaires furent rapportés à
partir de 'Abdillah b. 'Amru, Hudhayfah et Ibn 'Abbâs.(272)
Les récits
concordent donc sur le nombre des douze Califes et sur le fait qu'ils sont
issus de Quraïsh. Or, l'Imam 'Ali (a. s.) précise ce qu'il faut
entendre par Quraïsh dans les hadîths du Prophète (SAW):
«Sachez que les
Imams de Quraïsh sont plantés dans sa branche hashimite. L'Imamat
ne convient pas s'il est attribué à d'autres hommes qu'eux, qui
ne peuvent pas non plus convenir à ce poste».(273)
Il dit aussi:
«Par Allah! Oui! La terre ne sera pas privée d'homme
défendant la cause d'Allah publiquement et solennellement ou bien
fébrilement et secrètement afin que ne disparaissent pas les
preuves et manifestations d'Allah!».(274)
Leur perplexité face à ce
hadîth
Les savants de l'Ecole des califes sont perplexes
quant au sens qu'il faudrait donner au nombre Douze sur lequel les
récits rapportés concordent. Leurs paroles divergent et se contredisent:
Ibn al-'Arabî, commentateur des Sunan d'At-Tirmidhî dit:
«Nous avons compté après le Messager d'Allah (SAW) douze
princes: Abû Bakr, 'Umar, 'Uthmân, 'Ali, Al-Hassan,
Mu'âwiyah, Yazîd, Mu'âwiyah b. Yazîd, Marwân,
'Abdul-Mâlik b. Marwân, Al-Walîd, Sulaymân, 'Umar b.
Abdil-'Azîz, Yazîd b. 'Abdil Malik, Marwân b. Mohamed b.
Marwân, As-Saffâh ...».
Puis il compta Vingt sept califes abbassides
jusqu'à son époque ensuite il dit: «Si nous nous limitons
à douze, le compte formel s'arrête sur Sulaymân; si nous
introduisons une interprétation (compte par le sens), on en aura cinq
seulement: les quatre califes et 'Umar b. Abdil-'Azîz. En tout cas, je
n'en sais rien».(275)
Al-Qâdî 'Iyâd, commentant Ibn
al-'Arabî selon lequel, le pouvoir fut pris par plus de douze califes:
«C'est une objection fausse car le Messager (SAW) n'a pas dit qu'il n'y
aurait que douze califes. Rien n'empêche qu'il y en ait plus ...».(276)
As-Suyûtî dit: «Le hadith signifie
l'existence de douze califes, durant tout le règne de l'Islam
jusqu'à la fin des temps, qui oeuvrent dans le vrai, même s'ils ne
se succédaient pas ».(277)
Ibn Hajar, dans Fath-Al Bârî, dit: «Des douze il y eut jusqu'à présent les quatre califes et, avant l'avènement de l'heure, le compte sera fait».(278)